AUX SOURCES DE L'AGRESSION RWANDO-IMPERIALISTE ET DU GENO-COST EN RDC : LEÇONS A TIRER POUR LES EXPERIENCES SOUVERAINISTES ACTUELLEMENT EN COURS EN AFRIQUE ! (PAR DIAGNE FODE ROLAND)

03 - Février - 2025

L’Afrique se réveille à nouveau dans l’espérance et la douleur. L’espérance à l’ouest avec l’AES et le Sénégal souverainistes, la douleur au centre avec l’agression génocidaire du Rwanda en RDC.

Un pays africain, le Rwanda, s’empare militairement d’une région d’un autre pays africain, la RDC, pour le compte des Multinationales impérialistes. C’est le contraire que font le Mali, le Burkina, le Niger qui ont créé l’AES contre l’agression de la françafrique, l’eurafrique, l’usafrique et leurs valets de la CEDEAO.

En guise de protestation, la jeunesse congolaise brûle les ambassades du Rwanda, de l’Ouganda, de la Belgique, de la France et des États-Unis parce que les chiffres s’amoncellent en millions de victimes que les footballeurs de la RDC ont dénoncé la main sur la bouche et les doigts en forme de revolver sur la tempe. Les doigts accusateurs du sud au nord, de l’est à l’ouest du continent pointent le « geno-cost » associant « génocide et coût ».

Kagame, le Front Patriotique Rwandais (FPR) et l’État rwandais sont devenus des proxy-mercenaires, des « nègres sous-traitants » de la mainmise impérialiste sur la RDC tout comme le sont en Afrique de l’ouest les djihado-terroristes protéiformes d’El Qaïda ou de Daesh et la CEDEAO néocoloniale.

Et pourtant au milieu des années 90 en Afrique centrale, la défaite des génocideurs ethnofascistes pro-impérialistes du Hutu-Power au Rwanda avait vu se mettre en place une alliance panafricaine des neuf (9) États frontaliers du grand pays, la RDC, dont Franz Fanon disait que « l’Afrique a la forme d’un revolver dont la gâchette est au Congo » et une alliance nationale congolaise, l’AFDLC, dirigée par Laurent Kabila pour débarrasser le pays et l’Afrique des génocidaires ethnicistes du Hutu-Power et du régime fasciste de Mobutu, ce grand serviteur des intérêts colonialistes contre les mouvements de libération nationale de l’Angola, de la Namibie et anti-apartheid de l’Afrique du Sud.

Cette alliance panafricaine d’alors s’est transformée en son contraire avec l’agression en 1998 du Rwanda contre le pouvoir souverainiste congolais et l’assassinat de Mzee Laurent Kabila, successeur de Patrice Emery Lumumba et de Pierre Mulélé.

Cette guerre prédatrice du Rwanda dirigé par le Front Patriotique Rwandais (FPR) n’a en réalité jamais cessé depuis lors mais se camoufle derrière des milices ethnicistes Tutsis dans le Kivu pour y piller les immenses richesses en entente avec les entreprises Multinationales des USA et de l’UE.

On a ainsi assisté à la transformation du FPR rwandais de mouvement antifasciste contre le Hutu-Power génocidaire en mouvement sioniste Tutsi génocidaire contre la RDC.

Comment en est-on arrivé à cette terrible mutation anti-souverainiste et anti-panafricaine pro-impérialiste ? C’est ce que nous analysions dans notre texte dès 1999/2000 intitulé « CONTRIBUTION A LA RÉFLEXION SUR L’EXPÉRIENCE REVOLUTIONNAIRE ET LA CRISE DANS LES GRANDS LACS - Rwanda et Congo - ».

Nous écrivions alors : « Fin juillet 98, l’implosion de l’AFDLC s’est soldée par une guerre qui oppose les ex-alliés congolais et africains qui s’étaient coalisés pour débarrasser le pays de Lumumba et Mulélé du plus grand assassin de congolais depuis la colonisation belge. Les formidables espérances nées de la chute de cette tyrannie, et avant, de la défaite militaire du Hutu-Power au Rwanda viennent de se briser. Le fascisme, dictature terroriste du capital financier, trouve un prolongement aussi dans les pays semi-coloniaux sous domination impérialiste ».

L’ethnofascisme de Habyarimana et le mobutisme sont des dictatures fascistes inféodées à l’impérialisme. « Le mobutisme est un régime ethniciste qui oppose les 250 nationalités de l’ex-Zaïre. C’est un pouvoir familial, tribaliste et régionaliste. C’est un État semi-colonial, valet de l’impérialisme, qui déstabilise les États frontaliers africains. C’est un gouvernement qui a soutenu l’apartheid, le fascisme portugais contre les mouvements de libération en Angola, les bandes armées génocidaires rwandaises, les vendus de l’UNITA, agents de la CIA et les islamistes intégristes ougandais. Le mobutisme, c’est aussi la corruption, le pillage, la répression systémique et l’assassinat érigés en mode de gouvernance. En raison de la nature fasciste et des pratiques politiques du mobutisme, le peuple Zaïrois, toutes nationalités confondues, le Rwanda post-génocide, l’Ouganda, l’Angola, mais aussi le Zimbabwe, l’Afrique du Sud, la Namibie, le Mozambique, l’Éthiopie et l’Érythrée avaient un intérêt certain et légitime à la chute de l’autocrate Mobutu. Ce sont là les facteurs objectifs qui furent à la base de la création de l’alliance nationale congolaise et panafricaine, qui, le 17 mai 1997, vint à bout de la tyrannie mobutiste. UNE RÉVOLUTION POPULAIRE ANTI-FASCISTE, tel est le sens que nous donnions à cet évènement majeur qui ouvrait la perspective d’un RETOUR au CONGO de LUMUMBA et MULELE... ».

Il faut le dire clairement : l’assassinat commandité par les impérialistes US/UE de Laurent Kabila a empêché le processus de liquidation du mobutisme.

La principale contradiction à résoudre en RDC est le retour à Lumumba, Mulélé, Kabila pour éliminer le Mobutisme.

L’impérialisme convoite les richesses de la patrie de Lumumba, Mulélé et Kabila

« Le « malheur » du Congo, comme on l’entend de plus en plus chez les natifs mêmes de ce grand pays « cœur de l’Afrique », est d’être gorgé de matières premières minérales et de terres rares et très fertiles. Connu pour le diamant, l’or, l’argent, le cuivre, le manganèse, la bauxite, le zinc, l’énergie hydraulique, le bois, le Congo recèle d’énormes richesses: le pétrole, le charbon, le gaz, l’uranium, le thorium, le zirconium, le tantale, le niobium et le coltan qui sont des métaux et minerais rares servant dans les industries de pointe à forte valeur ajoutée que sont les semi-conducteurs (télécommunication, aéronautique et aérospatial, etc). Le coltan... est par exemple indispensable pour la production des téléphones mobiles. Les vautours que sont les Multinationales ont ainsi aiguisé la cupidité de la bourgeoisie et de la petite bourgeoisie rwandaise et ougandaise les poussant à l’occupation et au partage militaire de cet immense pays afin de le piller... ».

Reniement par Kagame de l’antifascisme panafricain de Fred Rygiema

Nous écrivions : « L’évolution politique de Museveni et de Kagamé n’est pas un phénomène isolé. C’est le chemin suivi par la plupart des « ex-guérilleros » petits bourgeois qui ont foisonné sur le continent africain dans la période de l’existence du camp socialiste d’Europe et de la montée des mouvements de libération nationale. Leur combat légitime pour l’indépendance n’enlève en rien à leur nature de classe petite bourgeoise. Les masses ouvrières et populaires (paysannes) ont été les forces sociales d’appoint, la base de masse des mouvements anti-coloniaux. La direction de ces luttes est restée petite bourgeoise et bourgeoise. C’est aussi une caractéristique des luttes antifascistes qui se sont déroulées au Rwanda et au Congo. De même en Éthiopie, les « ex-marxistes-léninistes » tigréens, éthiopiens et érythréens luttaient pour renverser d’abord l’empereur Haïlé Sélassié, valet de l’occident, et ensuite contre Mengistu, putschiste et militariste, allié des révisionnistes Brejneviens d’URSS. Cette lutte posait aussi la question du droit de l’Érythrée à l’indépendance. L’indépendance obtenue, les « frères d’armes », pour la majorité devenus pro-américains, délimitent aujourd’hui les frontières par une guerre fratricide. Ces alliés d’hier ont chacun et ensemble soutenu néanmoins à juste titre l’AFDLC contre Mobutu en raison du caractère antifasciste de ce combat. Le Rwanda avait un intérêt direct et immédiat à soutenir l’AFDLC, intérêt découlant de la menace armée du Hutu-Power assassin replié dans l’est de la RDC en vertu de « l’opération Turquoise » françafricaine. Mais force est de constater que cela en est resté à des préoccupations sécuritaires, légitimes certes, mais restrictives. Kabila clarifie la question en ces termes: « L’alliance entre le Rwanda et les révolutionnaires congolais est née d’une convergence d’intérêts: d’une part, l’impératif pour le régime politique rwandais de survivre aux menaces d’extinction exercées par les forces de destruction massées au Congo et, d’autre part, pour les révolutionnaires congolais, la nécessité de trouver les moyens d’acquérir les armements et le matériel qui permettraient de combattre la dictature. Avec le concours des forces organisées du Rwanda, l’AFDLC a pu réaliser la formation et ensuite l’encadrement des recrues congolaises sur le champ de bataille. Il n’a jamais été question d’autres accords en dehors de ceux-là ».

Ce qui a caractérisé fondamentalement l’implication des États de la sous-région auprès de l’AFDLC, c’est la mise en avant de préoccupations nationalistes étroites bourgeoises et petites bourgeoises. Une fois l’équation mobutiste levée par sa fuite, l’alliance militaire panafricaine conjoncturelle anti-mobutiste s’est peu à peu délitée au profit de la montée des préoccupations et des ambitions nationalistes étroites des uns et des autres... ».

Ajoutons à l’égoïsme national « l’ethnicisme, manipulé par les impérialistes, est devenu une véritable roue de secours pour les régimes semi-coloniaux, soumis à l’impérialisme, dont l’essence est « diviser pour mieux régner ». Ce processus d’ethnicisation de la politique rwandaise sous Kagame s’est manifesté par l’occupation et le partage prédateur du Congo par les forces d’occupation rwandaises et ougandaises à laquelle Mzee Kabila avait répondu par la « congolisation » sur la base de l’égalité entre toutes les nationalités du pays dans le but de rétablir la souveraineté nationale. Le putsch pro-rwandais fut déjoué par Kabila grâce à l’esprit patriotique du peuple.

L’expulsion des Rwandais par Kabila et la scission ethnique de l’AFDLC trouve leur source dans le non-respect par les alliés panafricains étatiques régionaux de l’AFDLC de la souveraineté nationale du Congo, l’inexistence d’un projet politique panafricain anti-impérialiste et dans la persistance de l’instrumentalisation de l’ethnicisme, du tribalisme et du régionalisme par des élites politiciennes bourgeoisies et petites bourgeoises contre l’égalité des droits entre toutes les nationalités sans laquelle pas d’unité nationale réelle.

Kagame, formé à West-Point aux USA, ex-chef des services secrets Ougandais est le prototype même de ce que dénonçait fort justement Thomas Sankara : « un militaire sans conscience politique est un criminel en puissance ». Kagame a troqué le panafricanisme de Fred Rygiema contre l’alliance avec le sionisme israëlien et les Multinationales US/UE/G7.

Que retenir de l’échec de l’expérience antifasciste des Grands lacs ?

Au milieu des années 90, les forces politiques progressistes, panafricaines de la démocratie petite bourgeoise confrontées à des régimes fascistes, ethnicistes et pro-impérialistes ont initié une nouvelle phase de la démocratisation et de la décolonisation en renversant par la lutte de libération armée ces régimes fascistes dirigés par Mengistu, Milton Obote, Habyarimana, Mobutu, etc. Cette phase succédait à celle de l’Angola et du Mozambique et la fin de l’apartheid politique en Afrique du Sud.

Tant au Rwanda, qu'au Congo, en Éthiopie et en Érythrée, les progressistes souverainistes ont su utiliser tactiquement les contradictions inter-impérialistes pour neutraliser les ingérences et interventions pour frayer la voie à la victoire par la prise du pouvoir.

Toutefois, les limites de la direction petite bourgeoise de ces luttes se révèlent dans la tendance à céder aux pressions de l’impérialisme qui a tout fait pour diviser et ruiner les acquis importants de la lutte de libération antifasciste d’alors, l’embourgeoisement de la petite-bourgeoisie intellectuelle par la gestion de l’État hérité de la colonisation, le chauvinisme national, voire l’ethnicisme, le militarisme prenant le pas sur le politique, le reniement de l’engagement panafricain initial et l’ignorance de la géopolitique mondiale à partir d’une lecture scientifique du rapport et de la corrélation des forces à l’échelle mondiale.

Le chauvinisme et le nationalisme étroit sont des conséquences de la balkanisation coloniale qui a tracé des frontières étatiques artificielles entre nationalités (« ethnies » disent les anthropologues) africaines dont le dépassement n’est possible que par l’union libre des peuples africains libérés du néocolonialisme.

C’est aussi aujourd’hui une équation posée et à résoudre dans l’actuelle expérience souverainiste impulsée par l’AES et le Sénégal en Afrique de l’ouest.

Quelles leçons pour aujourd’hui ?

Dans l’AES et au Sénégal se déroulent dans un contexte d’évolution favorable du rapport des forces à l’échelle mondiale entre poussée multipolaire et conservatisme unipolaire impérialiste de nouvelles expériences souverainistes.

L’agression Otano/US/UE de la Libye de 2011 et ses métastases djihado-terroristes doublées de la capture du président légitime et légal de la Côte d’Ivoire furent le tournant majeur qui a progressivement engendré l’affrontement actuellement en cours entre néocolonialisme et souverainisme en Afrique, notamment dans le Sahel.

Ce tournant majeur a aussi une de ses origines dans le traumatisme profond causé par des émigrations meurtrières piroguières et du Sahara et la surexploitation des rescapés sans papiers par les patrons fraudeurs du fisc de l’UE et des USA dont la fascisation se manifeste par des lois racistes pour alimenter l’économie souterraine du travail clandestin. La jeunesse africaine est ainsi condamnée à fuir la misère néocoloniale consécutive au diktat des plans libéraux d’ajustement du FMI/BM/OMC en empruntant le chemin pris par les richesses du sol et du sous-sol pillées par les Multinationales de l’UE/USA/G7 dont les miettes sont empochées par les bourgeoisies locales néocoloniales.

Ce processus oppressif ancien a été aggravé par la dévaluation du franc colonial CFA de 1994 qui a en même temps accéléré le bradage aux entreprises privées impérialistes des secteurs publics et parapublics stratégiques des pays africains que sont la terre, l’eau, l’électricité, les télécoms, le rail, les ports, les aéroports, les mines, etc, réduisant les États néocoloniaux corrompus à confectionner leurs budgets pour l’essentiel par l’impôt, les douanes et la dette.

Ces principaux facteurs ont peu à peu mis fin aux illusions semées au sein de l’intelligentsia petite- bourgeoise par la dictature de « la mondialisation libérale ». En effet, les « conférences nationales nées du vent d’est de la démocratie » ont été imposées par l’impérialisme à l’Afrique suite à la défaite du camp socialiste d’Europe pour dévoyer les luttes et insurrections populaires en Afrique noire des années 89/90/91, notamment au Bénin et au Mali. Les impérialistes ont ensuite récemment dévoyé les soulèvements populaires antifascistes en Tunisie et en Égypte en « printemps arabes » avant de les utiliser comme prétexte pour attaquer la Libye et la Syrie.

Les élites gouvernantes et les oppositions néocoloniales, y compris les principaux leaders de l’ex-gauche communiste s’étaient tous convertis au « there is no alternativ » au libéralisme laissant un vide que l’actuelle rébellion souverainiste de la jeunesse africaine est en train de combler avec leur prolongation par les coups d’états souverainistes dans l’AES et la victoire électorale souverainiste au Sénégal.

C’est donc au milieu de ces années 90 qu’a commencé à se mettre en place tous les ingrédients de la ré-émergence du souverainisme panafricain actuel contre le néocolonialisme dans notre région ouest-africaine dont les facteurs politiques déclencheurs ont été la destruction de la Libye en 2011 et le renversement violent par la capture du président Ivoirien en 2010.

Tirer les leçons des expériences souverainistes avortées est devenu indispensable pour éviter les erreurs commises qui ont fait échouer les tentatives indépendantistes de la génération 1945/1960, puis celle de Sankara en 1984/87, celles des luttes antifascistes dans les Grands lacs de 1994/97, celles des luttes qui ont conduit au multipartisme des années 90/91 et aux alternances libérales en 2000 puis en 2012 comme au Sénégal.

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

17 - Décembre - 2024

Après l'Assemblée nationale et la Mairie de Dakar : Barthélémy Dias va perdre également son poste de conseiller municipal à la mairie de Mermoz Sacré Coeur

Barthélémy Dias n'est pas au bout de ses peines. Dans sa livraison du jour, Les Échos se demande quel sort lui sera réservé au niveau du Conseil municipal de la...

16 - Décembre - 2024

SERIGNE MBAYE THIAM S’EXPRIME SUR « LES IRREFUTABLES RAISONS DE LA DELIQUESCENCE DU PARTI SOCIALISTE »

La commission électorale, sous la présidence du chargé des élections, le camarade Serigne Mbaye Thiam, a réuni contre la volonté de certains caciques,...

16 - Décembre - 2024

Après la presse, le nouveau régime viserait l'assainissement des partis politiques

Se dirige-t-on vers la fin de la prolifération des partis politiques ? Oui, si l’on en croit L’Observateur, repris par Seneweb, rapporte dans son édition de ce lundi que...

16 - Décembre - 2024

La Cédéao acte la sortie du Niger, du Burkina et du Mali de l’organisation avec un délai de rétractation de 6 mois

La 66e Session ordinaire de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de la CEDEAO, qui s’est tenue hier, dimanche 15 décembre 2024, à Abuja, au...

16 - Décembre - 2024

Diomaye à nouveau mandaté pour négocier la réintégration du Burkina Faso, du Mali et du Niger au sein de la CEDEAO

Lors de la 66ème session ordinaire de la Conférence des Chefs d'État et de Gouvernement de la Communauté Économique des États de l'Afrique de l'Ouest...