BUDGET 2020 : CES RÉFORMES PHARES QUI CARACTÉRISENT LA VOLONTÉ DE MACKY SALL POUR SON SECOND MANDAT

11 - Novembre - 2019

Une nouvelle structuration du budget pour l’année 2020. C’est ce vers lequel l’Etat veut aller. Il s’agit d’un budget de rupture, arrêté à 3 258,45 milliards F Cfa en recettes et 3 708,95 milliards F Cfa en dépenses. Soit un déficit budgétaire de 450,5 milliards F Cfa, correspondant à 3%, a annoncé la Direction générale du Budget (Dgb).Dans un document parcouru par Dakaractu, il est annoncé qu’à « partir du 1er janvier 2020, le Sénégal va donc basculer du Budget de moyens au Budget programme ». Un budget qui annonce un ensemble de changements.

Pour ces changements attendus, on peut déjà préciser que « le budget de chaque ministère est désormais présenté sous forme de programmes, dont le nombre varie entre 02 et 09 : un programme dit ‘’support’’ dénommé ‘’Pilotage, gestion et coordination administrative’’, va regrouper les crédits affectés aux services transversaux ou d’appui et des programmes dits ‘’métiers’’ dont le nombre (entre 01 et 05), la dénomination et le montant des crédits dépendent, évidemment, du périmètre de compétence du ministère ».
À cela, poursuit la même source, s’ajoutent les programmes des Comptes spéciaux du Trésor (Cst) dont le nombre global est de 07 et concernent juste quelques départements. Ce sont : la Présidence (1), le ministère des Forces armées (1), celui de l’Intérieur (1), celui de l’Economie maritime (1) et enfin celui des Finances et du Budget (3)). Chaque programme est piloté par un responsable de programme (Rprog), nommé par décret sur proposition du ministre de tutelle.
Le Responsable de Programme aura pour mission, « sur le plan opérationnel, de gérer son programme : élaboration des plans de travail, répartition des moyens entre les services techniques chargés de la mise en œuvre du programme, suivi des indicateurs de performance, animation du dialogue de gestion, pilotage des dispositifs de contrôle interne et de contrôle de gestion ».

La déconcentration de l’ordonnancement constitue la deuxième réforme. C’est une réforme qui va aussi être effective à compter du 1er janvier 2020, a appris Dakaractu. Ainsi, « chaque ministre sera ordonnateur de son budget. Et le ministre des Finances garde l’ordonnancement des recettes. Cette déconcentration ou transfert de l’ordonnancement, en clarifiant l’imputabilité de la dépense publique, est donc la conséquence logique de la budgétisation par programme. Ces réformes sont les 02 branches d’une même paire de ciseaux, le binôme paradigmatique visant à insuffler un nouveau souffle, une nouvelle méthode ainsi qu’une nouvelle philosophie dans la gestion des finances publiques ».

Les deux grandes réformes de l’État en 2020 : la budgétisation en programmes et la déconcentration de l’ordonnancement

Il est bon de préciser que ce Budget 2020 passe aux yeux du gouvernement de Macky Sall pour « un budget de continuité, en ce sens qu’il est conforme aux orientations stratégiques du Plan Sénégal émergent (Pse). Mais il constitue aussi un budget de rupture dans la mesure où il renouvelle profondément la boîte à outils de l’État en matière de gestion des finances publiques ». Pour cause, « les fondamentaux de la politique économique restants inchangés, il s’agira d’accélérer la transformation structurelle de l’économie pour générer davantage de richesses, en renforçant les bases de la production ; de faire de chaque Sénégalais un acteur de développement, bénéficiant des meilleures conditions pour exprimer son potentiel, développant des valeurs de solidarité et soucieux également de préserver son environnement ; d’achever le travail des pères fondateurs de la nation sénégalaise en consolidant leur legs institutionnel, pour que chaque citoyen se sente en sécurité, dans un pays bien gouverné, où il a son mot à dire sur les principaux choix qui déterminent l’avenir du pays ».
Mais, si les fondamentaux restent stables, « les mutations imposent une réinvention de l’action publique à travers un changement total de paradigme dans la gestion des finances publiques, qui se décline principalement au travers de deux grandes réformes : la budgétisation en programmes et la déconcentration de l’ordonnancement », a précisé la Dgb.
Celle-ci, dans ses prévisions a fait état du maintien du dynamisme de son taux de croissance. Globalement, le taux de croissance du Pib réel est projeté à 6,8% en 2020, contre 6,0% en 2019, soit une progression de 0,8 point de pourcentage.
Par ailleurs, en respect à ses engagements communautaires portant notamment sur le taux de pression fiscale, le Sénégal a élaboré une Stratégie des Recettes à Moyen Terme visant à atteindre les 20% du Pib d’ici 2023. Cela constitue une orientation stratégique intégrée. L’objectif visé, à travers cette stratégie est d’adapter le système fiscal et douanier aux évolutions du contexte économique, social, environnemental et numérique ; d’améliorer la productivité des services de recettes ; de réduire les coûts supportés par les contribuables pour se conformer à leurs obligations vis-à-vis des administrations en charge de la mobilisation des recettes.

Des ressources qui augmentent de 293,7 milliards soit 10%

Le Budget 2020 dit de « rupture » va intégrer « plusieurs mesures fiscales et non fiscales qui conduiront à améliorer le niveau de recouvrement des recettes. Dans cette optique, les recettes du budget général, au sens de la nouvelle Lolf (Loi organique relative aux lois de finances), vont augmenter de 293,7 milliards F Cfa par rapport à la Lfr1 (Loi de finance rectificatif 2019), soit une hausse de 10% en valeur relative. Les recettes budgétaires sont ainsi composées : de ressources internes pour un montant de 2 829 milliards F Cfa contre 2 557,44 milliards F Cfa dans la Lfr1 (soit une hausse de 271,56 milliards F Cfa et 10,6% en valeur relative) ; des ressources externes pour 293,5 milliards F Cfa contre 271,40 milliards F Cfa (soit une hausse de 22,1 milliards FCFA en valeur absolue et 8,1% en valeur relative) ».

Une politique d’endettement prudente

Il est aussi décidé l’application de la Stratégie de la dette à moyen terme (Sdmt) 2019-2022 qui consiste à recourir à un endettement à moindre coût et risque, à travers plusieurs objectifs. Il s’agit alors, à travers ces objectifs, de poursuivre la réduction des risques liés à la gestion de la dette notamment les risques de change, de refinancement et de taux ; la baisse des coûts d’emprunt ainsi que de l’allègement de la pression du service de la dette sur la trésorerie de l’Etat.
Selon la Direction générale du Budget, « ces objectifs devraient permettre au Sénégal de minimiser les facteurs de vulnérabilité afin de sauvegarder la viabilité de la dette. Ainsi, une attention particulière sera portée sur les conditions d’emprunt, à savoir les taux d’intérêt et les maturités. Les ressources concessionnelles seront privilégiées autant que possible et les financements à des conditions commerciales ne serviront que pour des projets à haut niveau de rentabilité démontré. Les passifs conditionnels liés aux garanties ou aux contrats de partenariat public-privé intégreront le champ de la dette pour permettre une meilleure appréciation du risque de surendettement. Enfin, une précision importante est à faire, concernant la présentation des chiffres de la dette publique ». En effet, dans la nouvelle Lolf, ne figurent dans les dépenses budgétaires de l’État que les charges financières de la dette qui sont projetées en 2020 à 364,8 milliards F Cfa, contre 273,19 milliards de F Cfa dans la Lfr1 2019, soit une hausse de 91,61 milliards F Cfa en valeur absolue et 33,5% en valeur relative. Ainsi, pour ce qui est de l’amortissement de la dette, il est de 506,02 milliards F Cfa contre 589,98 milliards F Cfa dans la Lfr 1, soit une baisse de 83,96 milliards F Cfa en valeur absolue et 14,2% en valeur relative.

En 2020, la masse salariale de l’État se situera à 817,70 milliards F, soit une augmentation de 74,29 milliards F

Il faut dire que tout cela entraîne « une masse salariale en hausse ». Mais, rassure la Dgb, elle demeure « sous contrôle ». C’est « une hausse relative bien maitrisée. Les dépenses de personnel constituent le seul poste budgétaire où, en tout état de cause, une baisse n’est pas envisageable, ne serait-ce qu’en raison de l’obligation juridique pour l’État-employeur de payer aux agents les droits que la législation leur reconnaît en termes d’avancement dans leur carrière. En 2020, la masse salariale de l’Etat (payée sur le titre 2 du budget) se situera à 817,70 milliards F Cfa, en augmentation par rapport à la Lfr1 2019 de 74,29 milliards F Cfa en valeur absolue et 10% en valeur relative ».
Même si ces dépenses sont en hausse, l’État a stabilisé dans le budget 2020, le ratio masse salariale sur recettes fiscales sous la barre des 35% fixée par le Pacte de convergence, de stabilité et de solidarité de l’Uemoa. Ce ratio sera exactement de 30,6% en 2020 contre 30,5% en 2019 et 34,3% en 2018.

Des mesures pour assainir la masse salariale et rationnaliser les dépenses courantes
Avec ces augmentations de la masse salariale, l’État n’est pas resté les bras croisés. « Depuis quelques années, le gouvernement a pu mettre en place une série de mesures en vue d’assainir la masse salariale avec notamment le renforcement du contrôle interne. Cela a ainsi permis de prévenir et mitiger les risques de dérapages de la rémunération. Par ailleurs, la modernisation des instruments de gestion des effectifs et de la masse salariale sera poursuivie. Cela à travers ‘’la mise en production de l’interconnexion Solde permettant de parachever la dématérialisation du circuit des actes administratifs ; l’accélération de la digitalisation de la Solde avec le logiciel e-solde déployé depuis mi-septembre 2019 et qui révolutionne les rapports entre l’administration des Finances et les usagers avec la consultation voire l’édition de bulletins de salaire en ligne ; la continuité de la déconcentration des compétences de la Solde ; et la rationalisation de la procédure de liquidation des Pensions entamée depuis 2018 atteindra sa vitesse de croisière avec la dématérialisation de la phase production des Certificats des cessations de paiement (Ccp).

Concernant la rationalisation des dépenses courantes, le budget 2020 confirme la poursuite de la stratégie de ces dépenses. Ce sera à travers « la réduction de la facture locative de l’État ; la mise en œuvre du plan de réduction des factures d’eau, d’électricité et de téléphone ; le suivi rapproché du parc automobile de l’État ; la fermeture de consulats et de bureaux économiques à l’extérieur et la restructuration des agences et structures similaires ».

Dakaractu

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