"C'EST UN MONDE EN SURCHAUFFE QUE NOUS PROMET LE RN" : PRES DE 3 000 SCIENTIFIQUES APPELLENT A SE MOBILISER CONTRE L'EXTREME DROITE
Ils sont près de 3 000. Des scientifiques ont signé mardi 25 juin une tribune publiée dans Le Nouvel Obs appelant à "une large mobilisation contre l'extrême droite" aux élections législatives des 30 juin et 7 juillet. "La société et les valeurs dans lesquelles nous nous inscrivons seraient gravement compromises dans un pays aux mains du Rassemblement national", écrivent-ils, dénonçant au passage "le discours dominant qui présente contre toute évidence le Nouveau Front populaire comme une menace pour la République".
Parmi les signataires, on trouve des chercheurs exerçant dans "toute la France" et issus de "toutes les disciplines", comme les climatologues Valérie Masson-Delmotte et Christophe Cassou, le géographe Gonéri Le Cozannet, le sociologue Didier Fassin, ou encore l'océanologue Catherine Jeandel, chevalier de la Légion d'honneur.
"Il y a chez le RN une remise en question de la parole scientifique. Mais nier les constats scientifiques n'est qu'un symptôme, une petite partie d'une remise en cause plus large qui nous inquiète beaucoup : celle de la démocratie et de l'Etat de droit", explique à franceinfo Milan Bouchet-Valat, l'un des initiateurs de la tribune, sociologue à l'Institut national d'études démographiques. "Rester silencieux revenait à cautionner la remise en cause de tous les principes sur lesquels est fondée la science : la pluralité, l'indépendance, etc", expose-t-il, affirmant que les signatures ont été réunies "très vite". "En moins de vingt-quatre heures, on avait déjà atteint les 1 000. Enormément de gens ressentent le besoin d'agir."
"Risques graves sur la recherche et l'enseignement"
Initié par Scientifiques en rébellion, ce mouvement de scientifiques du climat connu pour ses actions de désobéissance civile, le texte s'inquiète des "risques graves sur la recherche et l'enseignement [et] sur la place accordée aux faits scientifiques dans le débat public" en cas d'arrivée au pouvoir de l'extrême droite, citant les exemples d'autres pays. "Au Brésil et aux Etats-Unis, on a assisté à des baisses drastiques de budgets dans l'éducation et la recherche" et "en Hongrie, le gouvernement de Viktor Orban a remis en question l'indépendance d'institutions académiques pour s'assurer qu'elles ne remettent pas en cause son idéologie".
"Les extrêmes droites développent la défiance envers les résultats de la recherche scientifique et adoptent une posture de post-vérité, où les dirigeants délivrent leurs propres 'faits alternatifs', sous couvert de liberté d’opinion. La vérité n’est pas une opinion ou une position exprimée par une autorité."
Les scientifiques critiquent également l'impact du programme du RN sur le climat et l'environnement. "Le RN se défend de tout climato-scepticisme, mais relativise les rapports du Giec. Il s'oppose au déploiement des énergies renouvelables, alors que tout miser sur le nucléaire ne permettrait pas de respecter l'accord de Paris à l'échelle française", alertent-ils. "C'est un monde bétonné, goudronné, pollué, en surchauffe et sans vie que nous promet le RN", alertent les scientifiques. Ils citent notamment l'opposition du parti d'extrême droite à l'électrification des transports, à l'objectif de zéro artificialisation nette des sols, ou encore la promesse de baisser les taxes sur les énergies fossiles, principale cause du réchauffement climatique. "Selon ce parti, toute mesure écologique est 'punitive'. De quel côté sera la punition dans un monde à +3 ou +4 °C ?", interrogent les auteurs de la tribune.