Comment des commerçants «organisent» une pénurie de sucre pour pousser l’Etat à augmenter les prix !

31 - Août - 2021

​Quand certains distributeurs grossistes de la Compagnie sucrière sénégalaise (CSS) font de la rétention ou détournent le sucre du marché local pour le vendre à des industriels locaux et dans les pays voisins, cela crée une situation de tension, voire de pénurie de sucre. Depuis plusieurs jours ces acteurs de l’informel crient sur tous les toits qu’il y a une pénurie de sucre sur le marché et en profitent pour augmenter le prix de cette denrée. ,En réalité, rien n’est plus faux puisque, au moment même où l’on parle de « pénurie », la CSS a entreposé dans ses magasins près de 29.000 tonnes de sucre représentant environ 45 jours de consommation nationale. Seule nouveauté cette fois : les commerçants, au-delà du chantage exercé souvent sur l’Etat à travers les DIPA, ont décidé de transférer ce même chantage sur les consommateurs. Une seule raison : la quête des DIPA.

Le sucre est resté trouvable, mais sous tensions savamment entretenu ces dernières semaines chez les demi-grossistes, les détaillants et surtout les consommateurs. Et pourtant, selon des sources proches de la CSS et de la direction du Commerce intérieur, il y a une bonne disponibilité du sucre local. Actuellement la CSS a stocké dans ses magasins près de 29.000 tonnes de sucre, l’équivalent de 45 jours de consommation. D’ailleurs nos mêmes sources indiquent que le directeur du Commerce intérieur s’est déplacé personnellement pour s’enquérir de la situation des stocks de la CSS.

Au moment où il était dans les locaux de la CSS, il avait constaté que la compagnie avait plus de 32.000 tonnes de sucre stockées, selon les mêmes sources. Qui trouvent donc que la pénurie est injustifiée. « C’est du « ma taay » organisé par les commerçants ». Comment comprendre cette posture de certains commerçants qui peut être assimilée à « un chantage » exercé sur l’Etat et surtout sur les consommateurs ?

Le Magal 2021, un grand moment de consommation de denrées comme le sucre annoncé en fin septembre, est toujours une occasion pour ces commerçants animés par le seul appât du gain de mettre la pression sur l’Etat en entonnant la même rengaine usée jusqu’à la corde d’une incapacité de l’industriel local à satisfaire le marché.

« Mais cette fois-ci, la pression est faite de façon plus pernicieuse parce qu’il y a une dose de chantage. Tant qu’ils tentaient de faire chanter le ministère du Commerce, nous avons pu faire face et trouver des solutions mais aujourd’hui ils font chanter les consommateurs. Nous avons relevé effectivement que des grossistes, parmi les plus importants en matière de distribution de sucre, privilégient certains industriels et l’extérieur au détriment du consommateur. Ceci relève tout simplement du banditisme économique qui mérite d’être sévèrement sanctionné » s’étrangle-t-on du côté de l’industriel.

Le prétexte du Magal et la flambée du marché international
Ces commerçants veulent gagner sur les deux tableaux en faisant de plus grands profits auprès des industriels utilisant du sucre, mais aussi en entretenant ce sentiment de pénurie en disant que si cela perdure l’Etat sera obligé de prendre des mesures comme la hausse du prix du sucre.

« Rien ne justifie ce qui se passe. Sinon, il y a un changement de conjoncture par rapport à l’année dernière. Cette année, les cours mondiaux sont très élevés, la chaîne logistique est totalement perturbée, les coûts du transport se sont fortement renchéris de sorte que les profits mirobolants que ces commerçants réalisaient dans d’autres spéculations ont chuté drastiquement. Ils ont organisé un battage médiatique jusqu’à obtenir des DIPA, et ils continuent la pression pour avoirla hausse du prix du sucre ou la suppression de droits et de taxes pour pouvoir s’en sortir. Ils ont mis en avant une stratégie de chantage orientée cette fois-ci en direction des consommateurs. Ils n’ont qu’à dire aux Sénégalais qu’ils veulent l’augmentation du prix du sucre pour pouvoir faire des bénéfices ! Ils ont râlé pour obtenir des DIPA, maintenant ils continuent à râler », selon une autre source de la Direction du Commerce intérieur.

La CSS dénonce une volonté de nuire aux consommateur
«Toute cette stratégie est cousue de fil blanc ! Elle procède de cette habitude ridicule déployée à chaque fois que le calendrier indique une fête religieuse importante dont ils veulent profiter, foulant aux pieds toutes les règles de régulation dans le secteur. Le Sénégal a pris l’option résolue de réaliser son indépendance alimentaire en produisant ce dont il a besoin. Les importations devront s’estomper à plus ou moins brève échéance, il faudra que les commerçants le sachent et s’y fassent. Qu’est-ce qui les empêche dès lors d’investir dans la production des biens de consommation courante comme le sucre, l’huile et le riz et d’aider le pays à créer des emplois notamment pour les jeunes ? » confie Louis Lamotte, Directeur des Ressources humaines de la CSS interpelé par nos soins.

Il conclut son intervention en ces termes : « Nous sommes aux côtés des consommateurs et déterminés à déjouer les manœuvres des spéculateurs. Le produit existe, et en toute transparence, avec les Autorités du Commerce, nous sommes en train de déployer une batterie de mesures qui feront que, très bientôt, ces tensions ne seront plus que de vieux souvenirs ». Les consommateurs que nous sommes ne demandent que cela !

Le Témoin

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

06 - Décembre - 2023

Litige sur le bloc pétrolier attribué à Total : L'Etat du Sénégal évite une condamnation au CIRDI !

L’Etat du Sénégal vient d’éviter une condamnation au Centre l'International pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Cirdi). Il...

05 - Décembre - 2023

Manar Fall (Pétrosen): « Avec le Gaz, on a la possibilité de réduire de 30 à 40% le prix de l’électricité »

L’année prochaine, le Sénégal commencera à produire du Gaz. Ce qui pourrait faire baisser substantiellement la facture d’électricité des...

01 - Décembre - 2023

Suppression de la 3e tranche de woyofal : Le régulateur donne le feu vert à Senelec

Le ministre du Pétrole et des énergies avait annoncé une suppression de la troisième tranche de Woyofal. Pour matérialiser la mesure, la Senelec a soumis une...

27 - Novembre - 2023

PASSAGE DU PONT DE MARSASSOUM : LE MAIRE SENI MANDIANG FAVORABLE AU PEAGE

Le passage du pont de Marsassoum doit être payant si la commune doit y trouver son compte. C’est la conviction de Séni Mandiang. Le maire de Marsassoum rencontrait hier,...

27 - Novembre - 2023

Campagne de commercialisation de l’arachide : La FNOPS/T réclame à l’État 71 milliards F CFA

Dans l’optique de mieux démarrer la présente campagne de commercialisation de l’arachide 2023-2024, la Fédération nationale des opérateurs...