CONTRIBUTION SUR LA PRODUCTION DE L’ELECTRICITE AU SENEGAL (ARTICLE 25, PREMIERE PARTIE)

10 - Janvier - 2020

Un prix du Kwh d’électricité élevé :Une fatalité ou la politique perdante de la Senelec ?
Selon les prévisions des autorités actuelles, le Sénégal compterait près de 32 millions d’habitants à l’horizon 2045 et serait un pays « dit émergent » avec un PIB d’une valeur nominale de 67 milliards de dollars et une consommation électrique par personne et par an comprise entre 1600 et1700 kWh.
C’est donc une consommation nationale 52 TWh, soit près de 15 fois notre consommation nationale (3,6 TWh).
Selon ces prévisions, le coût du kWh tournerait autour de 60 à 80 fcfa contre 115 fcfa à ce jour (Décembre 2019).
La question énergétique est considérée comme un des fondements pour atteindre « l’émergence » pour nos gouvernants au travers du PSE qui propose de garantir un accès large et fiable à une énergie bon marché et qui constitue le référentiel de la politique économique et sociale sur le moyen et le long terme du gouvernement actuel.
Malgré cette volonté, comment expliquer plus de 5 années après la mise en œuvre du PSE
- Cette crise tarifaire de l’électricité,
- Son objectif prioritaire d’un mix énergétique de 20% pour 2017 et toujours non atteint en 2019 avec 13% ?
Le PSE aurait-il raté son décollage sur son volet énergétique ?
Nous pouvons affirmer avec certitude qu’après 60 ans d’indépendance, les politiques énergétiques mises en œuvre dans ce pays n’ont jamais été à la hauteur des enjeux.
Et pourtant, le Sénégal est bien doté de ressources importantes, multiples et en abondance pour lui assurer une indépendance énergétique.
Cette volonté d’indépendance énergétique combinée à une prise de conscience écologique doit pousser les pouvoirs publics (actuels et à venir) à opter pour une politique de mix énergétique de grande envergure pour la production de l’électricité et pour la promotion des énergies renouvelables en priorité.
Avant de revenir en détails sur des propositions de solutions de production d’électricité (Parties II et III) répondant aux exigences suivantes : abondance, abordable, renouvelable, mix et d’efficacité, permettez-nous de vous faire un point ou rappel sur la production actuelle de l’électricité au Sénégal (Partie I).

1ère Partie :La Production et la consommation de l’électricité au Sénégal

Les Sénégalais(es) n’arrêtent pas de protester contre la hausse du coût de l’électricité.
Au-delà de ces contestations légitimes, il est impératif d’analyser la politique mise en œuvre par les différents gouvernements pour produire et fournir l’électricité aussi bien aux populations qu’aux entreprises.
1- La production de l’électricité au Sénégal
La Senelec (Société Nationale de l’Electricité), est une SA à participation publique majoritaire. Elle domine le secteur électrique sénégalais et détient le monopole du transport sur l’ensemble du territoire et aussi de la distribution sur son périmètre de concession
A- La Senelec, opérateur historique du secteur de l’électricité au Sénégal, a une production, qui se situe depuis les années 60, aux alentours de 600 Mw. Elle exploite un parc de production et est liée par des contrats d’achat d’électricité signés avec les états de la sous-région pour exploiter des centrales hydroélectriques (Manantali, Felou et Somelec…) et des producteurs indépendants suivant le concept « Build Own and Operate (BOO).
Par appel d’offres, l’état Sénégalais agrée des promoteurs qui produisent l’électricité, puis l’injectent dans le réseau de la Senelec avec un système de comptage.
Ces promoteurs sont communément appelés des IPP (Indépendant Power Production).
La Senelec assure le monopole du transport et la distribution de l’énergie électrique.
Au Sénégal c’est seulement la production électrique qui est libéralisée.
En 2019, la Senelec à une capacité de production estimé à 554 MW provenant de ses propres centrales.
La pointe de consommation est estimée à près 700 MW.

B- Les producteurs indépendants d’énergie électrique qui vendent de l’électricité à la Senelec se divisent en deux groupes :
- Ceux qui utilisent l’énergie fossile pour produire de l’électricité à hauteur de 445 MW en 2019 (Figure 1)
- Ceux qui utilisent l’énergie solaire et éolienne pour produire de l’électricité avec une capacité de 170 MW en 2019 (Figure 2)

C- Toujours pour palier à l’insuffisance de production électrique au Sénégal, le gouvernement rachète la production d’électricité par les centrales hydroélectriques au niveau sous régional (OMVS et OMVG) pour une capacité totale de 95 MW en 2019 (Figure 3).

Figure 1.jpg

-Figure 1- Production d’électricité avec des centrales Thermique
au Sénégal en 2019 (₁)

Figure 2.jpg

-Figure 2- Production d’électricité des IPP avec l’énergie solaire et
éolienne au Sénégal en 2019 (2)

Figure 3.jpg

-Figure 3- Production d’électricité sous-régionale avec des centrales
Hydroélectriques au Sénégal en 2019 (3)

Au final la Senelec dispose d’une capacité production d’électricité totale pour 2019 de 1264 MW (Centrale à charbon de Sendou comprise) se décomposant comme suit :
- 80% sont obtenues au travers de centrales utilisant du fioul lourd et du gaz
- 7% sont obtenues au travers de centrales fonctionnant à partir de l’hydraulique
- 13% sont obtenues au travers de l’énergie solaire (129 MW) et éolienne (41 MW)
Ces pourcentages sont donnés en capacité et non en termes de part de production qui est inférieure.
Rappelons que :
L’état subventionne la Senelec pour garantir un montant minimal du prix du Kwh. Sur les 5 dernières années l’état à subventionné la Senelec à hauteur de 505 milliards de FCFA pour un prix du Kwh aux consommateurs se situant entre 110 FCFA et 130 FCFA.
La Commission de Régulation du Secteur de l’Electricité -CRSE- attribue les licences de production d’électricité aux sociétés privées (IPP) et détermine le montant de la subvention de l’état à la Senelec.
Notons que :
- Le FMI à remis en cause les subventions de l’état à la Senelec qui ne respecte pas les normes de concurrence économique mondiale.
- Chaque année l’état du Sénégal s’approvisionne en hydro carburant dont une partie est destinée au fonctionnement des centrales thermiques de la Senelec.
Pour exemple en 2010 : l’Etat du Sénégal a dépensé 612 milliards de FCFA pour s’approvisionner en hydrocarbure dont près de 85% ont servi à alimenter la Senelec. L’Energie fossile a été un gouffre financier pour notre économie, car trop chère dans les conditions de son exploitation et cela impacte fortement le coût de notre productivité.
- La production d’électricité des IPP vendue à la Senelec est revendue par cette dernière deux fois plus chère aux consommateurs sénégalais. Exemple : le prix de vente à la Senelec du Kwh des IPP produisant de l’électricité au travers des panneaux solaires est de l’ordre de 60 à 65 FCFA
- En 2019 nous avons 13% d’électricité produite à partir des parcs photovoltaïques et énergie éolienne.
L’engagement du Président de la République au niveau du Plan Sénégal Emergent (PSE) de 20% de mixte énergétique en 2017 n’est toujours pas atteint à ce jour.
- La production d’électricité de la Senelec au travers d’un réseau très vétuste et son équilibrage, subit près de 20% de perte (4), contrairement la moyenne mondiale qui est de l’ordre 6% à 8%.

Exemple : production électricité totale en 2017
-3 920 GWh produite
- 3 150 GWh vendue
Soit une perte de 770 GWh représentant 19,6% de la production.
À l’évidence avec le choix de produire de l’électricité essentiellement au travers des hydrocarbures (énergie fossile), le prix du Kwh de l’électricité produite au Sénégal ne peut pas baisser bien au contraire.
Les 600 Mwh de production en moyenne d’électricité de la Senelec ne sont pas suffisants pour les besoins en énergie domestique des populations et de celles des unités de production.
Les grandes unités de production que sont la Sococim, les ICS, les Grands Moulins, la Suneor, la Compagnie Sucrière Sénégalaise fonctionnent grâce à leurs turbines qui produisent d’elles-mêmes leur propre électricité par le procédé de récupération de la chaleur induite de leurs machines de transformation ou de production.
La Senelec ne peut pas fournir continuellement l’électricité pour satisfaire la demande de ces unités de production.
Mieux, certaines d’entre elles, à l’instar de la Sococim revendent à la Sénélec le surplus de leur production en électricité.
La production d’électricité est insuffisante et trop chère !
Pour industrialiser le pays et ne pas l’hypothéquer avec un prix du kWh aussi élevé, Il est impératif de changer de procédé d’obtention de l’électricité en adoptant ceux qui utilisent des sources d’énergie autres que fossiles.
Une énergie suffisante et à moindre coût est la voie pour
- La création de millions d’emplois
- Favoriser un cadre de vie et un essor de l’ingéniosité dans un pays.
L’autonomie énergétique est l’une des conditions nécessaires sinon la première pour développer un pays.
L’électricité ou le « courant » (pour parler comme le commun des sénégalais) en est le socle, la source pour son accomplissement.
C’est grâce au « courant » que tout est possible, la production, l’essor de la petite et moyenne entreprise, la transformation de nos ressources naturelles.
Le défi du développement est fondamentalement lié à l’accès à l’énergie.

Aboubakr Bengelloun

Président Article 25

Kémo Cissé
Président commission
Massification Article 25

E-Mail : Contact@article25-sn.fr

 

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