CONVENTIONS D’ENTRAIDE JUDICIAIRE ET D’EXTRADITION ENTRE LA FRANCE ET LE SENEGAL : SAVOIR RAISON GARDER (PAR SEYBANI SOUGOU)

01 - Septembre - 2022

Les conventions d’entraide judiciaire relèvent d’une tradition bien établie, dans les rapports entre Etats. De ce point de vue, la signature le 7 septembre 2021, entre la France et le Sénégal, d’une convention d’entraide judiciaire en matière pénale et d’une convention d’extradition ne dérogent pas à la règle. Le projet de loi enregistré à la Présidence de l’assemblée nationale française le 24 aout 2022 rappelle d’ailleurs la coopération en matière judiciaire entre la République française et la République du Sénégal, signée à Paris, le 29 mars 1974.Dans le cas d’espèce, la question est de savoir si les sénégalais, précisément des opposants politiques au régime de Macky SALL, établis en France encourent des risques, notamment du fait des termes de ces conventions.
Primo, l’article 1er de ladite convention énonce « l’engagement de principe des Parties de s’accorder mutuellement l’entraide judiciaire la plus large possible dans toute procédure visant des infractions pénales dont la répression est, au moment où l’entraide est demandée, de la compétence des autorités judiciaires de la Partie requérante ». La notion d’un engagement de principe atténue considérablement la portée de l’engagement de chaque partie.
Secundo, l’article 2 qui traite des restrictions qui peuvent être apportées à l’entraide, précise « que la demande peut être refusée si elle se rapporte à des infractions considérées par la Partie requise comme politiques ou des infractions connexes à des infractions politiques ». C’est clair, net et précis : les demandes liées à des motivations politiques ou connexes sont exclues d’office du champ de la convention.
Tertio, s’agissant de la convention d’extradition, le régime juridique est différent selon qu’on a affaire à un citoyen français ou un ressortissant sénégalais qui bénéficie du statut de résident en France. La loi du 10 mars 1927 dispose « que l’extradition n’est pas accordée lorsque l’individu objet de la demande est un citoyen ou un protégé français, la qualité de citoyen ou de protégé étant appréciée à l’époque de l’infraction pour laquelle l’extradition est requise ». C’est bien connu que la France n’extrade pas ses nationaux, à fortiori vers des pays du « tiers monde » qui ne font pas partie de l’espace Schengen. S’agissant d’un ressortissant étranger, le Gouvernement français peut livrer, sur leur demande, « aux Gouvernements étrangers tout individu non Français ou non ressortissant français qui, étant l'objet d'une poursuite intentée au nom de l'Etat requérant ou d'une condamnation prononcée par ses Tribunaux, est sur le territoire de la République ».
Il est faux d’affirmer que l’extradition est exclusivement traitée par les 2 ministres de la Justice des pays concernés. En effet, la procédure relative à une extradition est strictement encadrée et comprend 2 phases (une phase administrative et une phase judiciaire). Dans la première phase administrative, l’État requérant adresse au gouvernement français la demande d’extradition. Une fois saisi, le ministre de la Justice dispose de 48 h pour saisir le procureur de la République de la demande d’extradition. La seconde phase, judiciaire est marquée par 2 étapes : 1) Le procureur de la République adresse une convocation à la personne visée par la demande d’extradition qui a le droit d’être assistée par un avocat) ; 2) Le procureur saisit la chambre de l’instruction qui délivre un avis favorable ou défavorable dans le mois suivant l’audience d’extradition.
Les conventions d’extradition entre pays, font souvent l’objet d’une révision périodique pour tenir compte des nouvelles formes de criminalité et lutter plus efficacement contre le terrorisme, au sens véritable du terme (ce terrorisme n’a strictement rien à voir avec celui invoqué par les républiques bananières, dont les motivations sont politiques et portent sur des questions de politique intérieure). Il convient de signaler que dans la pratique, les conventions d’extradition donnent très peu lieu (pour ne pas dire quasiment jamais) à une réelle extradition.
Les citoyens sénégalais établis en France, qui n’ont pas commis d’infractions pénales graves, de crime au Sénégal ou qui n’ont pas fui le Sénégal après avoir commis un crime ou ne sont pas impliqués dans des actes de terrorisme (pas ceux inventés) ne doivent nourrir aucune crainte. Il faut savoir raison garder. Les jours de Macky SALL à la tête du Sénégal sont comptés. Qu’il pleuve ou qu’il neige, il quittera le pouvoir, de gré ou de force en 2024. Les conventions d’entraide judiciaire et d’extradition brandis pour créer une psychose et une peur fausse et artificielle n’y changeront strictement rien.
Seybani SOUGOU – E-mail : sougouparis@yahoo.fr

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

23 - Mars - 2024

BASSIROU DIOMAYE DES LE PREMIER TOUR ET AVANT 12 H! (PAR MOISE RAMPINO)

Le Président Wade vient de donner la directive. Pour nous Wadistes, l’homme le plus diplômé du Caire au Cap est plus qu’un maître à pensée, il...

23 - Mars - 2024

PRESIDENTIELLE : "ON EST LA JUSTE POUR DE L'ARGENT, MAIS ON NE VA PAS VOTER POUR AMADOU » BA

Après un mois de retard et de nombreux rebondissements, les Sénégalais vont pouvoir élire, dimanche 24 mars, leur cinquième président de l’histoire...

23 - Mars - 2024

ELECTION PRESIDENTIELLE : QUI EST OUSMANE SONKO, L'OPPOSANT AU CŒUR DU SCRUTIN SANS ETRE CANDIDAT ?

Ce visage de l'opposition, souverainiste et engagé contre la corruption, a été visé par plusieurs affaires judiciaires au fil des dernières années. Il...

23 - Mars - 2024

APPEL A LA PAIX : ASSURER UN ELECTION PRESIDENTIELLE PACIFIQUE ET JUSTE (PAR AMADOU SYLLA)

Le Sénégal se prépare pour une élection présidentielle historique ce dimanche 24 mars 2024, qui est marquée par des développements significatifs et...

22 - Mars - 2024

PARIS : LES ASSURANCES DU CONSUL GENERAL, AMADOU DIALLO, SUR L’ORGANISATION DE LA PRESIDENTIELLE

A Paris, l’élection présidentielle du 24 mars prochain se tiendra à l’Aréna Teddy Riner, à Asnières-sur-Seine, près de Paris. Selon le...