DR BABACAR DIOP FAIT L'ÉTAT DES LIEUX À LA VILLE DE THIÈS : «LES DÉGÂTS ONT DÉPASSÉ MES SOUPÇONS »

20 - Mai - 2022

Le maire de la ville de Thiès a fait face hier à la presse pour livrer un état des lieux. Dr Babacar Diop a mis à jour plusieurs scandales.
"A l’issue des élections locales du 23 janvier 2022, j'ai été élu maire de la ville de Thiès. Mon arrivée à la mairie constitue un grand espoir pour les Thièssois, et marque une rupture avec une gestion décriée par les Thièssois durant ces deux dernières décennies. C’est dans ce cadre, et dans le souci de bien faire, que j'ai ordonné un diagnostic général de la situation de la mairie. Il s’agit d’effectuer un état des lieux général de la situation dans laquelle j'ai trouvé la mairie. Cet état des lieux concerne le patrimoine physique de la mairie, notamment la situation du personnel, en termes d’effectifs et de conditions salariales, les actifs dont dispose la mairie, notamment le mobilier et l’actif circulant, les dettes et les créances liant la mairie aux tiers. Il s’agit d’un document général et analytique qui présente la situation actuelle de la mairie sous forme d’un rapport détaillé. La synthèse générale est un récapitulatif qui reprend de façon synthétique, sans être exhaustive, les grandes lignes du rapport. Elle met en lumière les informations principales contenues dans les différentes rubriques des documents de l’administration municipale. Pour une meilleure compréhension de chacune d’elles, il sera nécessaire de consulter le rapport général dans lequel la méthodologie et le contexte général sont précisés, ce qui a aussi permis de collecter ces informations.
«Masse salariale de 230 939 777 Fcfa ».
Concernant le personnel, l’effectif et le salaire ont connu des évolutions significatives. Entre 2019 et 2020, le personnel permanent de la mairie a enregistré une hausse de 34,44%, passant d’une moyenne de 58 employés à celle de 78 employés. Pour la même période, la masse salariale est passée de 115 897 036 Fcfa à 187 943 610 Fcfa, correspondant à une hausse salariale de 62%.
Pour la période 2020-2021, l’effectif moyen annuel a augmenté de 30,7%, passant d’une moyenne de 78 à 102 employés permanents. Notons par-là que ces valeurs correspondant aux effectifs constituent des moyennes annuelles et non pas des effectifs absolus au 31 décembre de l’année en cours. Par exemple, pour l’année 2021, l’effectif total au 31 décembre était de 116 employés permanents. Mais en faisant la moyenne sur la période des 12 mois de l’année, on obtient une moyenne annuelle de 102 employés. Cette pratique est plus cohérente parce que les effectifs peuvent considérablement varier d’un mois à l’autre. Quant à masse salariale, elle a augmenté de 23% pour la même période, passant de 187 943 610 Fcfa à 230 939 777 Fcfa.
«Manque à encaisser de 2,042 milliards ».
Un autre constat est que la mairie éprouve des difficultés à entrer dans ses fonds de recettes. Sur un total des recettes prévues de 3 033 499 561 Fcfa en 2021, la commune n’a pu encaisser que 990 739 643 Fcfa, soit un taux de recouvrement de 32,66%. Ceci correspond à un manque à encaisser d’un montant de 2 042 759 918 Fcfa. On voit dès lors toute la difficulté des services de recouvrements à atteindre les objectifs financiers définis dans le plan budget 2021. Il s’avère donc nécessaire, et à l’immédiat, de redéfinir l’organisation et le fonctionnement du service de recouvrement afin de le rendre plus efficace et lui fixer un objectif précis. Dans ce cas, une stratégie qui pourrait être adoptée est la mise en place de primes liées à l’atteinte des objectifs fixés. Celle-ci pourrait considérablement encourager les agents du service de recouvrement à se rapprocher ou à atteindre les objectifs définis par la direction. Une politique efficace de recouvrement constitue une des priorités de la nouvelle équipe.
«Fournisseurs introuvables ».
Le montant global des dettes attribuées à la mairie Thiès-ville est de 783 642 914 Fcfa. Ce montant est scindé en trois parties. D’une part il y a les dettes qui sont déjà visées par le receveur percepteur municipal, au titre des dépenses engagées non mandatées. Ces dépenses qui s’élèvent à la somme de 91.418.040 Fcfa, sont traitées en priorité, conformément à la règlementation, dans le cadre du budget en cours.
D’autre part, il y a les dettes engagées non encore visées par le receveur et qui devraient l’être prochainement sans que les délais soient précis qui sont d’un montant de 352 861 232 Fcfa, et les dettes en contentieux, donc non encore régularisées et qui sont d’un montant de 339 362 642 Fcfa. En outre, 63% des dettes globales contestées sont constituées de salaires et d’indemnités pour le personnel. A ce sujet, il convient de signaler deux problèmes. Dans certains cas, il existe des écarts très importants entre les montants déclarés et ceux confirmés par les fournisseurs concernés. Dans d’autres cas, après vérification, nous constatons que les fournisseurs à qui la mairie doit de l’argent sont introuvables. Cette situation amène à déduire que les activités en question n’existent pas ou n’ont jamais existé. Par conséquent, la mairie prendra le temps de vérifier chacune de ces dettes avant de procéder à un quelconque paiement.
«Des irrégularités à clarifier ».
Ligne du carburant : un montant de plus de 70 000 000 Fcfa a été utilisé comme carburant de fonctionnement en dix mois alors que seulement trois voitures de l’administration ont été fonctionnelles durant cette période, soit près de 230 000 Fcfa, l’équivalent de dépenses de carburant par jour pour seulement trois voitures fonctionnelles.
Mobilier et matériel administratif : cette ligne budgétaire est de loin la plus problématique identifiée dans l’exécution « déclarée » du budget 2021. Pour rappel, il est déclaré dans l’exécution du budget 2021 qu’un montant de 19 974 450 Fcfa a été utilisé pour une acquisition de mobilier de bureau. Or, lors de l’inventaire général que nous avons effectué sur l’ensemble du mobilier dont dispose la mairie, nous n’avons constaté aucun renouvellement de mobilier durant l’année 2021. La dernière acquisition de mobilier date de 2014. Ce qui contraste totalement avec l’acquisition déclarée en 2021. D’où la question suivante : à quoi a servi le montant de 19 974 450 Fcfa déclaré comme nouvelle acquisition de mobilier en 2021 ?
Mur de clôture de cimetière : dans l’exécution du budget 2021, un montant de 19 937 280 Fcfa a été utilisé pour la construction d’un mur de clôture de cimetière à Balabey II. Or, après vérification, il s’avère que non seulement les coûts des travaux ont été excessivement surévalués, mais que l’enveloppe totale a été versée au fournisseur alors que ce dernier n’a même pas exécuté le tiers des travaux qui devaient être faits.
Cbao : La mairie Thiès-ville a loué à la Cbao un terrain urbain de 800 m2 à distraire du Tf 6000 / Th sis à Randouléne Nord. Le bail est consenti pour une durée de 30 ans, signé le 01/Juillet/2003, moyennant un loyer de 6 000 Fcfa le m2 par an (soit 500 Fcfa le m2 par mois) ; ce qui représente un montant annuel global de 4 800 000 Fcfa. Or, le décret n°2010-400 du 23 mars 2010 a fixé le prix du mètre carré sur cette voie à 40 000 Fcfa par an (soit 3 300 Fcfa le m2 par mois). Autrement dit, en application du décret n°2010-400 du 23 mars 2010, la Cbao devrait payer un montant annuel de 32 000 000 Fcfa, soit un manque à gagner annuel de 27 200 000 Fcfa.
Sonatel : la Sonatel est dans la même situation que la Cbao. Elle occupe un espace de 1 000 m2 donné en location par la mairie à la date du 01/juillet 2003. Elle paie le mètre carré par an à 6 000 Fcfa (soit 500 Fcfa le m2 par mois) en dépit du décret n°2010-400 du 23 mars 2010 qui fixe le prix du mètre carré à 40 000 Fcfa (soit 3 300 Fcfa le m2 par mois) pour tout l’espace appartenant à la propriété communale. Autrement dit, en application du décret n°2010-400 du 23 mars 2010, la Sonatel devrait payer un montant annuel de 40 000 000 Fcfa à la place des 6 000 000 Fcfa annuels, soit un manque à gagner annuel de 34 000 000 Fcfa par an.
Emg : l’entreprise Emg exploite illégalement une superficie de 1435 m2 située sur la promenade des Thièssois. Or, à notre grande surprise, aucun contrat d’exploitation concernant le site en question ne lie la mairie à ladite entreprise. Cette exploitation illégale constitue pour la mairie un manque à gagner minimal de 8 610 000 Fcfa par an, soit 68 880 000 Fcfa pour les huit années durant lesquelles Emg a exploité le site. Par conséquent, la mairie, dès le 24 mars 2022, a pris les dispositions nécessaires pour faire valoir ses droits, en sommant Emg de payer le montant global dû tout en l’invitant à se régulariser dans les meilleurs délais.
Mickey Land : Pour l’exploitation de l’espace en question, le premier contrat a été conclu le 1er janvier 2015 entre Mickey Land et la mairie Thiès-ville pour une durée de 2 ans. Il était prévu que le contrat établi pouvait être renouvelé à la demande du preneur. Le dernier renouvellement a été établi le 1er janvier 2019 pour une durée de 5 ans. Ainsi en application de l’article 10 du chapitre V du dernier contrat liant les deux parties (Mickey Land et la Mairie Thiès-Ville), l’équipe municipale a motivé sa décision de rompre le contrat par trois constats : non-paiement de la redevance de location aux échéances fixées ; défaut de mise en valeur et d’entretien des espaces verts ; utilisation du site à des fins autres que celles prévues et acceptées par les deux parties.
«Une nouvelle gouvernance, sobre et transparente ».
Les nouvelles perspectives immédiates s’orientent vers trois points principaux : une nouvelle gouvernance, sobre et transparente ; instaurer une bonne gouvernance dans toutes les opérations impliquant la mairie et ses agents (état-civil et administration) ; mettre en place un comité externe d’audit et de suivi général.
Une gestion efficace et transparente des deniers de la commune : instaurer de nouvelles stratégies de recouvrement des créances appartenant à la commune ; garantir une gestion transparente et efficace des deniers de la commune ;
Une implication directe des acteurs locaux de la ville. Il s’agira de : travailler en collaboration avec les acteurs locaux (citoyens, entrepreneurs, universitaires et bonnes volontés) ; inciter davantage les entreprises locales à la Responsabilité sociétale des entreprises (Rse) ; promouvoir, en collaboration avec les différents acteurs locaux, une économie verte locale circulaire (gestion des ordures, aménagement de parcs solaires, consommer local)".

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