ELECTION PRESIDENTIELLE SENEGALAISE DU 24 FEVRIER – RADIOSCOPIE D’UN CHOIX CRUCIAL

23 - Février - 2019

"Le choix en politique n'est pas entre le bien et le mal, mais entre le préférable et le détestable." Raymond Aron

Loin de nous l’idée de parler de notre petite personne mais il est bon d’inscrire toute déclaration ou prise de position dans son contexte.
Militant socialiste de la 1ère heure au sein du Mouvement des Etudiants socialistes de France, nous avions décidé de créer notre propre mouvement, avec d’autres camarades et des sympathisants du PS, lorsque nous nous sommes rendus compte de la difficulté de faire avancer les idées qui étaient les nôtres au sein d’un parti gangrené par des dirigeants locaux dépassés par le temps et par l’évolution des mentalités et qui étaient réfractaires au changement.
Ce Mouvement dénommé « Socialisme et République Sénégal » qui se voulait un mouvement ni affilié, ni intégré au parti socialiste sénégalais, malgré les confusions et les assimilations notées tout au long de son existence, avec le PS a perduré de 2005 à 2012. Nous avons été de toutes les batailles contre le régime de Wade et avions défendu et accompagné le PS sénégalais avec en bandoulière notre liberté de pensée.
Cette liberté de pensée nous a poussé par exemple, au lendemain de l’élection de 2012, à demander le retrait de Ousmane Tanor Dieng qui visiblement, selon notre analyse, ne parvenait pas à recueillir l’assentiment des sénégalais, au profit de la mise en place d’une gouvernance bicéphale entre Khalifa Sall et Aïssata Tall Sall, en attendant de voir qui mettre en avant lors des prochaines échéances présidentielles.
Nous avons donc farouchement combattu le clan Wade jusqu’à la défaite de ce dernier avant de nous mettre en retrait de la politique malgré quelques réactions sporadiques au vu des enjeux politiques ou économiques.
En effet, quand vient le moment des grands choix, nul n’a le droit de se dérober face à ses responsabilités. Et notre responsabilité à ce moment solennel et important de notre nation, c’est de donner notre opinion sur les enjeux et les postulants à la magistrature suprême. Nous connaissons, pour les avoir pratiqué, certains des candidats et une observation minutieuse des autres nous a permis de nous faire notre opinion.

QUI SONT LES CANDIDATS ?
Madické NIANG
Un pion essentiel du système Wade honni par les sénégalais. Rappelons que Wade dormait chez Madické quand il venait à Dakar jusqu’à ce que ce dernier se déclare candidat. Preuve de la proximité qui existe entre eux est le fait que Madické ait déclaré sa candidature ne change pas la complicité passée qui existait entre ces deux piliers du système Wade. Malgré ses déclarations mesurées de campagne, Madické Niang est un allié de la première heure de Wade, son avocat, son complice et son homme-lige. Un homme qui aurait dû figurer sur la liste des personnes poursuivies pour enrichissement illicite surtout après la gestion nébuleuse et catastrophique des ressources minières notamment aurifères du temps où il était Ministre des Mines et complice de Wade dans la spoliation et le bradage de l’Or de Sabadola. S’il n’avait pas cherché et trouvé protection à Touba, il aurait dû être inquiété par la justice. Voter pour Madické revient à choisir le retour du système Wade.
Idrissa SECK
Idrissa Ibliss Seck. Celui-là mérite bien son surnom. Ce diseur de boniments habillés de versets coraniques pour endormir son auditoire a plus de penchant pour le matériel que le spirituel. Seul l’argent intéresse en réalité cet ancien consultant dont on ne sait toujours pas s’il a été simple auditeur ou diplômé de l’Université de Princeton. Les anciens étudiants de cette prestigieuse université déclarent qu’il n’y a aucun diplôme. L’auteur de « lui et moi », et des fameux CD d’où il ressortait la primauté que Wade et lui donnaient à l’argent, est un modèle dans la traitrise, le retournement de veste et la roublardise. Tout est tromperie chez cet homme qui a été emprisonné par Wade non pour les chantiers de Thiès mais pour une sombre histoire de milliards détournés et déposés dans une banque étrangère. Wade avait d’ailleurs raconté à Bathily qu’il lui avait dérobé 74 milliards qui n’avaient rien à voir avec les fonds politiques qu’Idrissa Seck donnait comme justificatifs de sa fortune subite.
On se rappelle de la SCI du 17 rue du Colisée à Paris créée par Idrissa Seck dès les 1ères années de l’alternance avec comme 1ère acquisition un immeuble de plusieurs étages. D’autres suivront un peu partout. Des investissements qui permettent à l’homme de fréquenter les stations de ski et les palaces huppés européens sans travailler. Ce candidat ne peut pas être un parangon de vertus dans la gestion des deniers publics. L’entreprise de détournement des deniers publics mise en place par Wade et Idrissa dont les 1ers mots une fois élu ont été « nos ennuis d’argent sont terminés » a volé en éclats lorsque Idy s’est approprié des dizaines de milliards sous le couvert de la gestion des fonds politiques.
Les sénégalais n’ont pas la mémoire courte. Les politiciens ralliés de la dernière heure à sa coalition non plus, eux qui feignent d’ignorer le chapelet des malversations et des trahisons politiques de Idrissa, car guidés par le seul esprit de vengeance, l’aigreur ou l’absence de solution alternative pour leur carrière politique. Idrissa Seck c’est Abdoulaye Wade en plus jeune.
Issa SALL
Nous ne le connaissons pas ou très peu, mais il a reconnu ne pas être Président de PUR, son parti, mais le simple candidat de ce mouvement dirigé par un Responsable moral chef d’une confrérie religieuse bien connue. Ses explications relativement à l’influence que pourrait avoir son chef de parti sur le fonctionnement de l’Etat n’ont pas convaincu les adeptes de la laïcité que nous sommes.
Certes Issa Sall a le mérite d’être un employeur et un formateur avec l’Université qu’il a créée mais le Sénégal est un Etat laïc, démocratique et social. Il en est ainsi depuis les pères fondateurs de la Nation, Mamadou Dia et Senghor. Ce n’est pas le moment d’avoir un Président issu d’une obédience religieuse et qui donnerait à sa gouvernance une tournure un peu trop religieuse et/ou spirituelle au risque d’entamer le fragile équilibre entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel. Le Sénégal est l’un des rares pays dans le monde à assurer cet équilibre. Nous n’avons pas besoin d’une dominante spirituelle ou religieuse au sommet d’un Etat qui doit se trouver à équidistance des chapelles religieuses. Les dérives de Wade à ce sujet sont là pour nous rafraîchir la mémoire.
Ousmane SONKO
Monsieur Sonko est un homme courageux mais il pressé, prétentieux, arrogant bien que sans aucune expérience de la gestion de la chose publique. Cet ancien syndicaliste des Impôts et Domaines qui n’a jamais été chef de service, directeur, Ministre et n’a jamais géré rien d’autre que son salaire et qui est devenu député par le jeu du plus fort reste se croit prédestiné à la fonction présidentielle. Non il n’est pas Macron encore moins Obama. Il peut représenter l’illusion de la jeunesse ou du renouvellement générationnel à un moment de faillite de la traditionnelle classe politique, il peut avoir du bagout, distiller de belles paroles démagogiques mais cela ne suffit pas pour faire un Homme d’Etat.
Donc sur le plan professionnel, nous ne confierons pas la gestion du pays, au moment où nous avons besoin de plus de stabilité ou de changement dans la continuité que de retour en arrière, à un garçon sans aucune expérience de la gestion de la chose publique. Ses déclarations à propos du F CFA et de l’euro ont démontré à nos yeux sa méconnaissance des mécanismes monétaires.
Sur les valeurs intrinsèques de l’homme, nous n’avons pas beaucoup d’informations mais son refus de répondre à la commission d’enquête parlementaire sur l’affaire des 94 milliards qu’il a lui-même soulevé démontre le peu de respect qu’il a des institutions. Par ailleurs, un article d’un journaliste l’accusant de boulimie foncière n’a entraîné aucune plainte pour diffamation de sa part. Cet article enrichi de références et de numéros de titres fonciers non démenti formellement par Sonko nous fait croire qu’il n’y a pas de fumée sans feu comme il n’y a pas d’inspecteur des Impôts et domaines pauvre au Sénégal. Oui, la plupart sont propriétaires terriens.
Si les sénégalais font confiance à un individu qui ne fait que critiquer, se montrer arrogant ou prétendre avoir une baguette magique pour tout mettre sur de bons rails alors qu’il n’a fait preuve d’aucune compétence ou expérience avérée le qualifiant pour gérer un Etat, le Sénégal fera un grand bond… en arrière. La seule question que nous lui posons est celle-ci : où était Sonko lorsque tout le monde se battait pour faire partir Wade ? Ce même Wade qu’il s’est empressé d’aller visiter en ravalant toutes ses critiques de la classe politique ? Ses voltes faces, son absence de précision, ses contradictions ou ses incohérences dès qu’il s’agit de sujets techniques prennent le pas sur ses déclarations ou ses slogans de vendeurs d’illusions. Les critiques et les promesses ne sont pas le gage d’une bonne gestion à venir. On n’élit pas un candidat sur la base de promesses car aucun candidat une fois élu ne réalise véritablement ses promesses surtout s’il n’a jamais été confronté à la réalité de la gestion gouvernementale. Georges Clémenceau disait bien qu’"on ne ment jamais tant qu'avant les élections, pendant la guerre et après la chasse."
Macky SALL
On nous dira que Macky était comme Idrissa et Madické un élève de Wade, un pur produit du système Wade. Peut-être. Mais c’est le seul élève qui a osé tenir tête au Maitre en convoquant son fils devant l’assemblée nationale pour voir ce dernier justifier de sa gestion de l’ANOCI. Ce fait qui lui a valu d’être honni par le Vieux et mis au banc des accusés et la manière dont il a tenu tête au Vieux jusqu’à devenir Président nous donne une idée des valeurs qui sont innées chez l’homme. Certes la déclaration de son patrimoine de plusieurs milliards fait en 2012 a pu susciter des interrogations sur son origine, mais ils sont tous milliardaires les anciens proches de Wade. Ce dernier disait d’ailleurs qu’il a créé des milliardaires. Même ses lointains neveux le sont. Nul doute que si Wade avait trouvé chez l’homme moyen de l’abattre pour détournement de deniers publics, il l’aurait fait comme il l’a fait avec Idrissa Seck. Il aura tout tenté et il continue encore contre son ex poulain, en vain.
En ce qui nous concerne, bien qu’étant pour le candidat du PS au 1er tour en 2012, nous avions battu campagne pour Macky Sall lors du 2ème tour de la Présidentielle avant de nous retirer de la vie politique. Il nous fallait le laisser travailler et malgré des décisions inopportunes telles que la mise en place du visa biométrique (heureusement retiré depuis), certaines nominations de personnes incompétentes à certaines postes pour récompenser ou rendre l’ascenseur au nom de la reconnaissance (Koléré en wolof), nous n’avons pas retrouvé dans la gouvernance de Macky les signes et manifestations d’une prévarication organisée des ressources publiques telle que connue sous Wade.
Nous ne sommes ni membres de l’APR ni d’aucun parti politique d’ailleurs depuis que nous avons décidé de nous mettre en retrait de la vie politique. Mais il faut remettre les choses dans leur contexte et ne pas oublier dans quel état Macky Sall a trouvé le Sénégal de Wade lui qui disait que les salaires n’allaient pas être payés. Beaucoup de choses se disent à propos de la prétendue mal gouvernance de Macky Sall mais peu de preuves matérielles, ou même par présomptions irréfragables, sont mises sur la place publique.
Bien sûr tout n’est pas rose, pour ne pas dire marron (couleur de son parti), dans la gestion de Macky et nous ne sommes pas là pour défendre le bilan de l’actuel gouvernement. Mais rien que le Pont de Farafégné sur le fleuve Gambie (l’importance d’un Pont n’est pas à démontrer) construit en un rien de temps en chassant un Dictateur nuisible pour la paix en Casamance là ou tous ses prédécesseurs ont échoué, l’aide systématique accordée aux plus nécessiteux (couverture maladie universelle, bourses de sécurité familiales), la finalisation de l’aéroport de Ndiass là où Abdoulaye Wade a englouti des centaines de milliards en léguant une situation bloquée, la nouvelle Cité de Diamniadio, le 1er TER de l’Afrique de l’Ouest, sans parler des autoroutes et des autres infrastructures industrielles ,agricoles ou culturelles, les inondations et les coupures d’électricité qui ne sont plus qu’un mauvais souvenir, méritent d’être soulignés avec insistance car le chemin a été difficile au vu de l’état désastreux de l’économie laissé par Wade.
QUI CHOISIR ?
Vous aurez deviné notre choix. Le bilan de Macky Sall, que ses partisans auraient pu mieux défendre, malgré ses imperfections, mérite qu’on le laisse faire l’évaluation de son 1er mandat, en tirer les enseignements, corriger les erreurs et continuer de poser les jalons d’un futur meilleur pour les sénégalais. Même à considérer que « Macky est comme les autres » (une rengaine qui revient souvent) et qu’il faille choisir entre 5 maux, nous choisissons logiquement le moindre mal. Entre les 5 candidats, nous choisissons donc par élimination. Comme Me El Hadj Diouf, comme Aissata Sall, deux personnalités à qui on ne peut denier leur engagement pour l’intérêt général de ce pays malgré les critiques injustes proférées en l’endroit de cette dernière lorsqu’elle a décidé de soutenir Macky (car elle n’est pas une transhumante et nous avons dit pourquoi), nous décidons de voter pour Macky Sall.
Le pays, à ce moment crucial, n’a besoin ni d’un stagiaire au Palais de l’Avenue Roume, ni d’un retour au canal historique du PDS de Wade représenté par Idrissa Seck ou Madické Niang non plus d’une gouvernance des « Mollahs » au nom du sacrosaint principe de la laïcité qui a permis à notre cher pays d’échapper aux querelles religieuses ou claniques. Le spirituel ne doit pas se substituer au temporel même si les deux doivent cohabiter harmonieusement.
Il ne reste donc qu’à souhaiter une amélioration/changement dans la continuité et laisser Macky Sall dérouler son Plan Sénégal Emergent avec plus d’organisation, de méthode et de personnes compétentes. Car nous sommes persuadés que l’homme saura mettre à profit ses valeurs humaines et professionnelles pour tirer expérience du passé, apprendre de ses erreurs, corriger les rampes de lancement et mettre le pays sur les rails de l’émergence.

Ibrahima NDIAYE
Socialisme et République Sénégal

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