GAZ ET PETROLE : L'OPPOSANT OUSMANE SONKO «CHARGE MACKY SALL»

07 - Juin - 2019

En 2017, l’opposant Ousmane Sonko a publié un livre dans lequel il dénonce la gestion du gaz et du pétrole au Sénégal. Dans un documentaire diffusé lundi, la BBC a accusé Aliou Sall, le frère du chef de l’État, d’avoir touché un pot-de-vin lors de transactions liées à ces ressources. Des infos démenties par le pouvoir, notamment par Macky Sall, qu'Ousmane Sonko juge responsable de la situation. Il répond aux questions de RFI.

RFI : Macky Sall a réagi au sujet de ce documentaire de la BBC. Il a rappelé que l’organisation, la gestion des ressources en pétrole et en gaz était transparente au Sénégal. Vous vous êtes dit atterré par cette déclaration.

Ousmane Sonko : La réaction du président Macky Sall a été catastrophique, puisqu’on a plus vu un frère qui défendait son petit frère, qu’un président de la République qui défendait les intérêts de 15 millions de Sénégalais. En 2017, moi-même j’avais publié un livre : « Pétrole et gaz du Sénégal : Chronique d’une spoliation ». Tout ce que la BBC a dit se trouve dans ce livre. Les seuls éléments nouveaux sont les précisions contenues dans les contrats par rapport aux montants qui ont été avancés. Mais j’avais bien établi le trafic d’influence, le délit d’initié, de concussion, de fraude fiscale. Et en ce qui concerne le président Macky Sall, je n’hésite pas à qualifier cela de haute trahison.

Aliou Sall est soupçonné de corruption. Dans ce documentaire de la BBC, on évoque une somme de 245 000 dollars. Est-ce qu’il aurait fallu qu’Aliou Sall démissionne de son poste de directeur de la Caisse des Dépôts ?

Si on devait qualifier tous les délits qui ont été commis par Aliou Sall, nous serions face à une liste extrêmement longue. Le président Macky Sall aurait dû relever Aliou Sall de toutes ses fonctions, y compris de sa fonction de maire. Il l’a fait avec Khalifa Sall pour des accusations mille fois moins importantes. Mais il aurait également, immédiatement dû prendre un décret pour le relever de ses fonctions à la tête de la Caisse des Dépôts et consignations.

Dans son documentaire, la BBC indique que, Frank Timis pourrait toucher 10 milliards de dollars de royalties sur les quarante prochaines années. BP a fait un communiqué pour évoquer des chiffres absurdes.

Vous savez, il y a d’abord le principe et il y a les chiffres. BP n’a pas nié l’existence des royalties. Et c’est ça, le problème. Après, on peut épiloguer sur les chiffres. C’est un milliard, c’est 600 milliards, c’est trois milliards, ce n’est pas le plus important. Et donc aujourd’hui, la première chose, c’est que BP n’a fait que confirmer, BBC - peut-être -, conteste les montants, mais n’a pas contesté la réalité de ce qui est reproché à BP. Frank Timis a eu – je ne dirais pas l’intelligence –, mais la roublardise d’introduire le frère du président dans l’affaire. C’est ce qu’il a fait au Liberia avec le fils d’Ellen Johnson Sirleaf. C’est ce qu’il a fait au Burkina Faso sur les mines de Tambao, avec le frère de Blaise Compaoré. Il vient, il choisit des gens qui ont la capacité d’infléchir les décisions, il les chouchoute, il les fait même voyager par son jet privé, et il obtient les signatures, alors qu’il ne remplit ni les conditions techniques ni les conditions financières. Et donc, aujourd’hui, c’est ça qui aggrave la responsabilité de Macky Sall par rapport à tout cela.

Vous êtes député. Est-ce qu’une commission doit être créée au niveau de l’Assemblée nationale pour chercher la transparence dans ce dossier ?

Souvent, comme on dit, si vous voulez enterrer problème, créer une commission d’enquête parlementaire. Ça ne sert absolument à rien. C’est un dossier judiciaire. Et aujourd’hui, la seule chose que le procureur doit faire - s’il est encore procureur -, il a été très, très actif quand il s’est agi de Khalifa Sall, il l’a été quand il s’est agi de Karim Wade. Ici, nous sommes dans des enjeux financiers beaucoup plus importants. Mais, indépendamment de cela, les recours que nous avions déposés au niveau international, nous continuons à les suivre, puisque ces recours sont en instruction. Nous avons reçu les accusés réception, aussi bien du département de la justice américain que de Londres. Moi-même j’ai été convoqué, ici, à l’ambassade des États-Unis, avec un procureur représentant du FBI. Nous avons posé énormément de questions. Vous savez, ces dossiers, tôt ou tard, vont trouver leur épilogue.

Vous estimez aujourd’hui que, seule la rue peut faire pression sur le pouvoir politique, en lançant ces appels à manifester ?

À chaque fois que le débat a été posé, ils ont utilisé des arguments fallacieux pour allumer des contre-feux. Ils disent que ce sont quelques opposants qui essaient de manipuler les gens. Ils disent que ce sont des intérêts internationaux occultes qui essaient de déstabiliser le Sénégal… Mais c’est de la poudre aux yeux ! La réalité les a rattrapés, aujourd’hui. Et moi, je dis que c’est au peuple, et particulièrement cette jeunesse… Souvent, je dis à la jeunesse que la solution n’est pas de prendre des pirogues. La solution, c’est de rester ici et de se battre avec ces affairistes d’État. Donc, faisons nos révolutions. Arrêtons de fuir face à ces réalités.

Vous n’avez pas peur de provoquer une forme d’insurrection ?

Nous appelons à une mobilisation exceptionnelle et pacifique. Je n’ai appelé personne à aller casser quoi que ce soit. Je dis qu’aujourd’hui, si nous avions un million de Sénégalais qui sortent et qui occupent la place de l’Obélisque, je crois que ce serait un message fort pour que, ces gens-là, qui ont l’habitude de ces abus, de 1960 à maintenant, comprennent que ce peuple a décidé de prendre son destin en main.

Rfi

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

22 - Octobre - 2024

MAINTENIR LES LEGISLATIVES ANTICIPEES SERAIT UNE VIOLATION INACCEPTABLE DE LA CONSTITUTION (PAR BIRAHIM CAMARA)

Maintenir les législatives au 17 novembre 2024, serait une violation inacceptable de la Constitution qui garantit le droit, la liberté et l'égalité de tous les...

21 - Octobre - 2024

EN MEMOIRE DE CABRAL (Par Barka BA)

Le 12 septembre 1924, Amilcar Cabral, fondateur du Paigc et héros de la guerre de libération de la Guinée Bissau, naissait à Bafata. S’il n’avait pas...

21 - Octobre - 2024

JUSTICE : : AMINATA TOURE SERT UNE CITATION DIRECT A CHEIKH YERIM SECK

Les déboires judiciaires de Cheikh Yérim Seck se poursuivent. Aminata Touré vient en effet de lui servir une citation directe pour "diffamation". L’ancienne...

21 - Octobre - 2024

LEGISLATIVES ANTICIPEES : LES ENGAGEMENTS D’ABDOULAYE SYLLA, TETE DE LISTE DE LA COALITION ‘’AND BESSAL SENEGAL SENEGAL’’ (ABS)

Abdoulaye Sylla, le patron de l'entreprise ECOTRA, veut jouer pleinement sa partition dans la création d’emplois pour les jeunes, bref dans le développement du...

19 - Octobre - 2024

Revue de presse: La visite du chef de l’Etat à l’est du pays et les critiques de l’opposition au menu

La visite entamée vendredi par le chef de l’Etat dans les zones situées en bordure de la Falémé, dans l’est du Sénégal, est l’un des...