GAZ : POSSIBLES ACTIONS DE DESTABILISATION DE LA RUSSIE AU SENEGAL ?

16 - Septembre - 2022

Face à la nouvelle donne géostratégique, le Sénégal est incité à redéfinir sa politique énergétique. A l’origine, les premières livraisons étaient destinées aux seuls marchés asiatiques, le marché européen étant « capté et préempté par le gaz russe », rappelle Mamadou Fall Kane, le conseiller énergie du président sénégalais. Mais la guerre en Ukraine, déclenchée le 24 février, a rebattu les cartes. « De nouvelles opportunités s’ouvrent à nous », se félicite celui qui est également secrétaire général adjoint du Comité d’orientation stratégique du pétrole et du gaz, affirmant que l’Allemagne pourra compter sur de premières livraisons à compter de juillet 2024.
De bonne source, Berlin serait même prêt à payer son gaz trois fois plus cher que les prix proposés par BP en 2018. Des discussions sont en cours pour réévaluer le contrat d’achat. « L’Italie, le Portugal et la République tchèque ont aussi manifesté leur intérêt pour les phases 2 et 3 », ajoute Adama Diallo, directeur général de Petrosen, à la recherche de clients, mais également de financements, pour la suite du projet.
Mais sans doute faudra-t-il parier sur de potentielles pressions russes, prévient Christine Dugoin-Clément, chercheuse associée en géopolitique à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, autrice d’Influence et manipulations. Des conflits armés modernes aux guerres économiques (VA Editions, 2021).
« L’énergie est devenue une arme de négociation pour la Russie. Et tout nouvel entrant risque de changer les équilibres, explique-t-elle. Le Sénégal arrive dans un jeu compliqué, ce serait étonnant qu’il n’y ait pas de tractations. » De fait, en fournissant une solution rapide aux Européens, Dakar pourrait affaiblir le marchandage énergétique russe. « Le Sénégal va être autant courtisé que pressuré », affirme Mme Dugoin-Clément : par les Européens pour produire le plus vite possible, et par les Russes pour ne pas perturber leur agenda géopolitique.
La spécialiste évoque, par exemple, de possibles actions de déstabilisation politique, alors que l’élection présidentielle de 2024 va faire entrer le pays dans une nouvelle séquence électorale.
Avec Le Monde

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