La Déclaration de Politique Générale : entre ambitions et mirages

28 - Décembre - 2024

La Déclaration de Politique Générale (DPG) d’Ousmane Sonko s’annonçait comme un moment clé pour clarifier les orientations de son gouvernement. Pourtant, au fil des annonces, une question demeure : ces promesses relèvent-elles d’un véritable projet ou d’un exercice d’équilibrisme entre rêves et réalité ?

Prenons par exemple la révocation de la loi d’amnistie. Voilà une mesure qui se veut un symbole fort de la restauration de l’État de droit. Cependant, elle soulève une contradiction majeure : cette même loi a permis au Président et au Premier ministre Ousmane Sonko de retrouver leur liberté. Si elle est révoquée, les poursuites qui auraient dû les maintenir en détention seront-elles relancées ? Cette question, cruciale pour la cohérence de son engagement, reste sans réponse.

Les bases militaires étrangères, quant à elles, sont dans la ligne de mire. Leur fermeture fait vibrer la corde patriotique, mais que devient le patrimoine foncier sur lequel elles reposent ? Ces terrains, souvent situés à des emplacements stratégiques, devront bien être réaffectés. Pourtant, aucune précision n’est donnée. On aurait pu espérer qu’une décision d’une telle portée soit accompagnée d’un plan clair.

En matière de lutte contre la vie chère, les intentions sont louables. Mais le gouvernement a déjà tenté de contenir l’inflation en mai dernier, en dépensant plusieurs milliards avec des résultats peu concluants. Si le problème persiste, quelles nouvelles approches seront mises en œuvre ? Là encore, le flou prédomine, et l’on a du mal à croire que cette bataille puisse être gagnée sans un arsenal de mesures inédites.

Dans le domaine de l’éducation, l’ambition est grande : réduire le déficit d’enseignants tout en introduisant de nouvelles matières comme l’anglais et le numérique. Mais cette annonce ne tient pas compte d’une réalité évidente : le manque d’enseignants est déjà un frein pour les matières classiques. Ajouter de nouvelles disciplines, sans ressources supplémentaires, revient à alourdir un bateau déjà en train de couler.

Sur le plan des infrastructures, la “justice hydraulique” fait son apparition dans la DPG. Une belle formule, mais qui reste énigmatique. Faut-il comprendre qu’il s’agit d’améliorer l’accès à l’eau pour tous ou de corriger les disparités dans la répartition des ressources hydriques ? Sans définition précise, ce concept reste suspendu dans les airs, comme une promesse sans ancrage.

La question de la dette, elle, illustre le décalage entre ambition et faisabilité. Ousmane Sonko souhaite rembourser simultanément la dette intérieure et extérieure, un objectif louable mais économiquement irréaliste dans le contexte actuel. Privilégier l’une ou l’autre est déjà un casse-tête budgétaire ; imaginer régler les deux relève de l’utopie.

Enfin, la restructuration des entreprises publiques, annoncée comme une priorité, se heurte à un obstacle majeur : ces entités continuent d’être utilisées pour récompenser des proches et des alliés politiques. Le clientélisme, loin de reculer, semble avoir trouvé un nouveau souffle. Comment restructurer efficacement quand on ne s’attaque pas aux racines mêmes du problème ?

La DPG laisse donc une impression mitigée. Les intentions sont là, mais les moyens et les précisions font cruellement défaut. Entre une transparence annoncée mais peu visible, des projets ambitieux mais mal préparés, et des contradictions flagrantes, le gouvernement semble pris dans un étau : celui de la pression populaire et celui des limites de ses propres capacités.

Au final, la Déclaration de Politique Générale d’Ousmane Sonko est un texte qui inspire autant qu’il interroge. Elle reflète une volonté de changement, mais montre aussi que l’idéalisme doit se confronter aux réalités du terrain. Le Sénégal, lui, attend des actions concrètes, au-delà des discours séduisants.

Ibrahima Thiam, Président du mouvement Un Autre Avenir

 

Commentaires
1 commentaires
Auteur : Posté le : 29/12/2024 à 08h44

THIAM mérite du respect. Il est resté ferme dans ses convictions contrairement aux girouettes d’opposants. Même si je ne partage pas toutes ses prises de position, je reconnais qu’il est toujours égal à lui, un opposant qui ne court derrière les gens. C’est un intellectuel et un politicien audacieux.
Un pastefien pur jus qui accepte les questionnements et les critiques.

Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

26 - Avril - 2021

Tenue des élections locales : le M2D appuie "fortement" la position du Front de Résistance National

Le Mouvement pour la Défense de la Démocratie (M2D) qui a tenu une réunion ce samedi 24 avril 2021, a appuyé la position du Front de Résistance National (FRN),...

26 - Avril - 2021

En audience avec Macky, les responsables APR de Sedhiou se battent au palais

La salle des banquets du palais présidentiel du Sénégal a été transformée en borne fontaine ce dimanche par les responsables de l'Alliance pour la...

26 - Avril - 2021

LE PROGRAMME « XËYU NDAW ÑI », UN DISPOSITIF STRUCTURANT ET RÉVOLUTIONNAIRE (DSE APR FRANCE)

Une lecture expliquée du discours du président Macky Sall tenu lors du conseil présidentiel pour l’Emploi et l’Insertion des Jeunes. C’est ce qu’a...

26 - Avril - 2021

CONSEIL PRESIDENTIEL : L’APR SE FELICITE DE LA VALIDATION PAR LE CHEF DE L’ETAT DU PROGRAMME D’URGENCE POUR L’INSERTION ET L’EMPLOI DES JEUNES « XËYU NDAW ÑI »

Le parti présidentiel applaudit des deux mains la décision prise par Macky, lors du conseil président sur l’emploi des jeunes, de valider le programme « Xëyu...

26 - Avril - 2021

FRANCE : AU NOM DE LA LUTTE ANTITERRORISTE, LA DROITE DURCIT LE TON SUR L'IMMIGRATION

En France, à moins d'un an de la présidentielle, la droite, qui cherche à casser le duel Macron/Le Pen annoncé pour 2022, durcit le ton sur l'immigration, les...