«LE CIMENT EST CHER CAR LES CIMENTERIES NE PAIENT PAS LES 10% DE PARTS GRATUITS REVENANT A L’ETAT»
Les collectivités locales qui abritent des exploitations minières au Sénégal continuent de vivre le paradoxe de l’abondance, avec des entreprises qui font des centaines de milliards de chiffres d’affaire à côté de populations qui sont dans la pauvreté.
Les collectivités locales qui abritent des exploitations minières au Sénégal continuent de vivre le paradoxe de l’abondance, avec des entreprises qui font des centaines de milliards de chiffres d’affaire à côté de populations qui sont dans l’absolue pauvreté. La coalition «Publiez ce que vous payez» a engagé la réflexion sur l’apport de ces industries au développement local. un forum s’est tenu à Diack, commune de Ngoundiane, dans ce sens. A cette occasion, Abdou Aziz Diop Coordonnateur régional de l’antenne «Publiez ce que vous payez» a révélé que si le prix du ciment est si cher, c’est parce que les cimenteries ne paient pas les 10% de parts gratuits qui reviennent à l’Etat.
« Il est paradoxal qu’il y ait une taxe sur le ciment que les consommateurs et les citoyens paient. Et au même moment, l’Etat a 10% de parts gratuits dans les cimenteries Dagote, Sococim, les ciments du Sahel, mais elles ne les paient pas et ce, depuis le régime de Me Abdoulaye Wade.» C’est la révélation faite par Abdou Aziz Diop, Coordonnateur de l’antenne régionale de « Publiez ce que vous payez» à Thiès, membre du comité national de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE) Sénégal. Selon lui, il appartient maintenant à l’Etat de reprendre ses droits dans ce sens et que les 10% puissent être payés. Ce qui à ses yeux permettrait d’alléger le fardeau que portent les citoyens.
Il a fait l’annonce à Diack, dans la commune de Ngoundiane, à l’occasion du forum communautaire initié par la coalition «Publiez ce que vous payez», sur les impacts environnementaux et sociaux de l’exploitation des Carrières et Mines dans la zone de Ngoundiane. Selon lui, les collectivités locales qui abritent les entreprises minières vivent toujours les externalités négatives, alors que les retombées positives sont encore minimes. Ce qui se traduit par le paradoxe de l’abondance, c’est-à-dire des compagnies qui gagnent des milliards de Fcfa et des populations qui vivent dans la pauvreté.
Dans le rapport ITIE de 2018, les entreprises extractives comme la GECAMINES et CONGECA sont plus de 100 milliards de chiffres d’affaire alors que la contribution globale pour le budget de l’Etat et les collectivités impactées est très faible.
Pour lui, il appartient à l’Etat de revisiter ces contrats, de rééquilibrer pour que les investisseurs puissent gagner et que l’Etat, mais aussi les collectivités riveraines comme celles de Ngoundiane, de Diack puissent également en tirer profit. Et pourtant, se désole-t-il, l’exploitation des carrières de Diack engendre beaucoup d’externalités comme la pollution qui dégrade l’écosystème. Il y a également la pollution sonore, induite par le grondement des machines 24h/24 et pendant toute l’année et la circulation à longueur de journée des gros-porteurs. Il s’y ajoute la perte de moyens de subsistance, les maladies chroniques, la violation du droit du travail, l’insécurité dans les lieux de travail etc.
Et paradoxalement, l’impact direct de l’exploitation sur le développement socio-économique des localités riveraines reste encore peu perceptible. C’est pour engager la réflexion sur l’apport des industries extractives au développement local dans la région de Thiès, dit-il, que l’antenne régionale de Thiès de la coalition «Publiez ce que vous payez» a organisé le forum communautaire à Diack. Il s’agit d’identifier les différentes formes d’externalités négatives que les communautés impactées subissent au quotidien et de les accompagner à trouver des solutions.
D’après lui, l’objectif est d’échanger avec ces communautés, mais surtout de recueillir leurs ressentis, leur vécu quotidien, leurs attentes, pour les traduire en recommandations, pour que l’impact soit plutôt positif. En terme d’impacts positifs, il note qu’il y a actuellement des entreprises qui excellent dans la responsabilité sociétale d’entreprise (RSE), notamment à travers les biens de service en matière d’hydraulique, de santé, d’éducation. Mais, il faut que les entreprises mettent en œuvre les bonnes dispositions pour que les populations vivent désormais moins les externalités négatives, et que les externalités positives soient beaucoup plus ressenties. C’est selon lui tout le sens du forum de Ngoundiane, qui sera également fait dans toutes les régions minières. Il s’agit également de traduire le rapport ITIE parce que ce sont des ressources qui appartiennent au peuple et il faut qu’il puisse exercer son droit constitutionnel, en ayant d’abord accès à la bonne information sur les revenus générés par les secteurs extractifs dans toute sa chaîne de valeur.
Selon Isma Tine, Secrétaire municipal de Ngoundiane, l’exploitation des carrières était considérée comme une malédiction, mais cette image a commencé à disparaître en 2009, avec l’avènement de l’équipe municipale actuelle. C’est à cette période que les impôts et taxes ont commencé à tomber dans les caisses de la collectivité territoriale, ce qui n’était pas le cas avant car les sociétés extractives payaient la patente dans le lieu d’implantation de leur siège social, notamment Tivaouane, Thiès, Dakar.
L'AS