LE NAUFRAGE DE « BENNO » DANS LES EAUX DE DAKAR : Chronique d’un naufrage prévisible

Dans la nuit du 31 juillet au 1er août 2022, le capitaine Ndoye faisait son trajet habituel de Diamniadio à L’Assemblée nationale. Une brume couvrait la mer. Le capitaine Ndoye était debout sur la passerelle du steamer et manœuvrait sans précaution, malgré la nuit et le brouillard. Les passagers, eux, dormaient…
…Rien de terrible comme ces navires aveugles qui vont dans la nuit.
Le navire "Benno", vitesse lente, poids frêle, court droit vers les écueils de Mermoz; le réveil risque d’être brutal et bien des rêves brisés au matin du lundi 1er août…
L’obscurité était absolue, une sorte de plafond bas enveloppait le steamer, on distinguait à peine la pointe des mâts.
…Rien de terrible comme ces navires aveugles qui vont dans la nuit.
Tout à coup dans la brume une noirceur surgit ; fantôme et montagne, un promontoire d’ombre courant dans l’écume et trouant les ténèbres.
C’était Le "Dias", grand steamer à hélice, venant de Mermoz, allant à l’Hémicycle, avec un chargement de sept cents tonnes; vitesse énorme, poids immense. Le "Dias" courait droit sur le "Benno".
Nul moyen d’éviter l’abordage, tant ces spectres de navires dans le brouillard se dressent vite. Ce sont des rencontres sans approche.
Avant qu’on ait achevé de les voir, les carottes sont cuites.
Le «Dias », lancée à toute vapeur, prit le « Benno » par le travers, et l’éventra.
La secousse fut effroyable. En un instant, à bord du « Benno » tous furent sur le pont, hommes, femmes, courant, criant, pleurant. L’eau entrait furieuse. La fournaise de la machine, atteinte par le flot, râlait.
Le "Benno" n’avait pas de cloisons étanches ; les ceintures de sauvetage manquaient.
Eh oui, rien de terrible comme ces navires aveugles qui vont dans la nuit et la brume !
Mais, aussi rien de terrible comme le naufrage de ses ambitions personnelles, surtout quand elles sont démesurées…
En voulant se mesurer à Barthélémy Dias, Alioune Ndoye a tout simplement mordu la poussière. Il apprendra à ses dépends, que quand la grenouille veut se faire plus grosse que le bœuf, elle risque d'exploser ne peuvent s'en suivre que des regrets...
Comme le bateau prend de l’eau, est ce que les souris auront le courage de se jeter à la mer et de rejoindre le "Dias" dans sa marche vers l’Essentiel pour un Dakar prospère ?
En attendant le peuple lui, dans une sérénité légendaire, croise les bras et observe le jeu de ceux qui, à bord du "Benno" prétendaient demain, légiférer pour lui.
Le Général Charles De Gaulle ne disait-il pas :
« Dans le tumulte des hommes et des événements, la solitude était ma tentation. Maintenant, elle est mon amie. De quelle autre se contenter quand on a rencontré l'Histoire ? »
Zao MBENGUE