MAGAL DE TOUBA : LE PROPOS DU PORTE-PAROLE DES MOURIDES EST INAPROPRIE

30 - Août - 2021

"Rien ne pourra nous empêcher de tenir le Magal parce que c'est une recommandation de Serigne Touba. Nous préférons la mort que de ne pas suivre le ndigueul de Khadim Rassoul», a martelé Serigne Bass Abdou Khadr, porte-parole du Khalif général des Mourides. Du moins selon plusieurs médias.
Même si une bonne partie de la presse estime que le porte-parole répondait ainsi à Moustapha Diakhaté et au juge Dème, qui avaient émis l’idée d’un report de l’événement à cause de l’explosion de la pandémie au Sénégal, on peut dire aussi que son propos est un défi lancé au pouvoir central. En clair, Macky Sall, quelle que soit sa volonté affirmée de lutter contre le Covid-19, ne peut pas empêcher la tenue du rendez-vous religieux même si la courbe des contaminations continue d’accuser une hausse inquiétante. En vérité, le propos du porte-parole des Mourides est inapproprié. Il n’avait surtout pas vocation à être tenu en public pour ne pas gêner les tenants du pouvoir.
L’idée défendue par Moustapha Diakhaté et le juge Dème n’est pas synonyme d’une opposition à la tenue du Magal, une rendez-vous qui fait la fierté de tout Sénégalais, quelle que soit son appartenance religieuse ou confrérique. Elle laisse entendre que dans ce contexte d’explosion des cas de contaminations et surtout d’évolution inquiétante des décès, le report de l’évènement religieux s’impose.
Cela dit, on peut formuler l’hypothèse que si la ville sainte de Touba s’autorise une position aussi radicale, c’est parce qu’elle jouit d’une autonomie de gestion que beaucoup de Sénégalais ignorent. Si tel est le cas, les tenants du pouvoir doivent prendre leur courage à deux mains pour éclairer la lanterne de nos compatriotes. Faute de quoi, le rapport de l’Etat central avec la ville sainte pourrait susciter un sentiment d’injustice dans le reste du pays. Quels arguments les tenants du pouvoir peuvent-ils brandir pour empêcher l’organisation d’autres événements religieux, sportifs et culturels dans d’autres coins du pays ? A force de laisser les frustrations et le sentiment d’injustice se sédimenter, on finira par créer les conditions d’une explosion sociale aux conséquences incalculables. Et comme gouverner, c’est prévoir, les tenants du pouvoir n’auront aucune excuse si, un jour, la situation venait à tourner au vinaigre.
Cheikh Sidou SYLLA

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