« MONSIEUR DEME, ON NE GIFLE PAS SON COMMANDANT MEME S’IL A TORT » : L’HISTOIRE JAMAIS RACONTEE D’UN ANCIEN TIRAILLEUR SENEGALAIS FLOUE PAR LA FRANCE

05 - Décembre - 2024

Le président de la République du Sénégal a rendu honneur et rehaussé les couleurs des sacrifices des tirailleurs et leurs densités personnelles et collectives en rendant à l’histoire ce qui lui appartient.
Ouf, la lumière jaillit d’une mémoire coloniale volontairement amnésique qui, par tous les moyens a cherché à enfouir à jamais dans l’oubli, ces hommes parmi les libérateurs de la France, mais qui ont été massacrés et méprisés.
La France est très ingrate car elle refuse de faire face à son histoire coloniale et de rendre compte. Elle choisit de rester muette et dans l’impunité et le déni non seulement de ce qui s’est passé à Thiaroye, mais aussi pour ces milliers et ces milliers de jeunes garçons qui, fleur de l’âge ont été contraints d’aller défendre la dignité et la liberté de la France, et qui, à pure perte n’ont jamais obtenu leurs cartes d’anciens combattants et les droits qui vont avec.
Et si la France reconnait le massacre de THIAROYE, et les autres.
Le président de la République et ses pairs africains ont eu des postures dignes de l’évènement, mais n’ont-ils pas oublié. Ceux qu’ils ont oublié morts héroïquement sur les terrains du combat face au nazisme et dont les familles n’ont pas eu droit à la compensation du droit du sang versé et perdu pour cause de guerre.
Et aussi, ceux qui ont eu la vie sauve, revenus chez eux sans droit comme ils étaient partis de leurs villages respectifs, et avec ou sans carte de combattant, n’ont eu droit à rien sauf à raconter les histoires de leurs parcours de vie comme combattants ou comme prisonniers de guerre.
Mon père est de ceux-là. Titulaire de deux attestations de reconnaissance de la nation française en sus de son livret militaire, dont l’une est celle remise à beaucoup de tirailleurs comme reconnaissance cynique de leurs contributions aux efforts de guerre, et l’autre comme reconnaissance d’un acte héroïque de mon père lorsque à RIVESALTES il abattu un avion allemand qui voulait bombarder le pipeline qui alimentait tous les réseaux des alliés engagés dans les combats.
Ce pipeline stratégique pour les unités combattantes, était placé sous la responsabilité du huitième régiment des tirailleurs sénégalais dont mon père était partie intégrante.
Curieusement, la France refuse de reconnaitre la participation de mon père aux unités combattantes et malgré ses nombreuses tentatives, il recevait toujours le rejet de sa demande d’obtention de sa carte de combattant de la part des services des armées qui en avaient la charge.
Malgré les attestations dont il disposait, son livret militaire ne rendait pas compte des évènements cruciaux auxquels mon père a participé à travers le 8ème RTS, du dynamitage du pont de la Loire qu’on attribue à des unités combattantes blanches et au sauvetage du pipeline de RIVESALTES.
C’est un conflit qui a éclaté entre mon père et son commandant qui en est la cause. Je l’ai su en 1999.
Alors que je travaillais comme attaché principal dans une commune du département de l’Essonne, et directeur des services jeunesses, mon père vint me trouver dans cette ville pour un séjour en Famille.
Je lui ai présenté au maire de la ville et à l’association locale des anciens combattants. Et là, un vieux monsieur qui n’arrêtait pas de me dire que mon visage lui rappelait quelqu’un, se dirigea vers mon père en souriant et à son niveau, il lança à mon père : « CAPORAL DEME ON NE GIFLE PAS SON COMMANDANT MEME S’IL A TORT. »
Oui, malgré le temps, ce vieil homme était avec mon père dans les unités combattantes mixtes de la 8ème RTS, et c’est lui qui raconta devant le maire et ses camarades anciens combattants interloqués ce qui s’était passé au moment de la libération de Paris.
« Au moment de la libération de Paris, toutes les unités combattantes des tirailleurs qui étaient arrivées les premières dans les périphéries de Paris, ont été cantonnées aux portes pour qu’elles ne rentrent pas les premières dans Paris ; ce qui serait une honte dans l’imagerie collective de la libération de PARIS. Mon père et son unité étaient cantonnés à la porte d’ISSY LES MOULINEAUX avec ce monsieur qui nous raconte l’histoire alors que son cousin SAMBA BOCAR DIA qui lui était dans la 2ème DB du général LECLREC était lui avec son unité cantonné à la porte MAILLOT.
C’est dans le choix des hommes devant pénétrer dans Paris à partir de la porte d’ISSY que survint le différend. Le commandant, en choisissant que des hommes blancs, fut interpellé par le CAPORAL DEME : « Pourquoi les militaires noirs ne pouvaient pas y participer ? » Comme réponse il reçut de son supérieur, des crachats sur son visage, accompagnés de paroles méprisantes. Hors de lui et profondément atteint dans son honneur, caporal DEME empoigna son supérieur, le bouscula et le gifla violemment. « J’étais de ceux qui s’efforçaient difficilement à maitriser le caporal », raconte son viel ami. Le caporal DEME, en compagnie des tirailleurs tchadiens et d’autres qui avaient pris sa défense, était conduit au cachot et il eut beaucoup de chance de n’avoir pas été fusillé. En d’autres circonstances il l’aurait été.
Le lendemain ce viel compagnon d’armes de mon père, et les autres anciens combattants qui ont passé toute la soirée avec lui chez moi, reprirent le dossier de mon père pour l’aider mais en vain. Au mois de juin 1999, mon père qui venait d’avoir ses 92 ans essuya un nouveau refus du ministère des Anciens combattants.
Il décida alors de jeter définitivement l’éponge alors que curieusement sur la base de la présentation de son livret militaire la préfecture avait accepté de lui octroyer un titre de séjour, le temps d’instruire sa demande de reconnaissance de son statut d’ancien combattant. Le 24 JUIN 2009 mon père retourna à DIEU à l’âge de 101 ANS et curieusement sans en vouloir à la France.
Dieu, comme ils sont nombreux comme mon père, à être floués par la France qui nous force à l’oubli et à l’amnésie et fait troublant, ils n’en veulent pas à la France
Connaissant ce qui s’est passé, j’ai décidé de ne jamais oublier et de porter la flamme des mémoires flouées et martyrisées de mon père et de celles de tous les tirailleurs. C’est ce jour-là connaissant la vérité de l’histoire, que je me suis rendu au métro château rouge à Paris et j’y ai acheté ce chapeau rouge que je porte sur ma tête en solidarité et en protestation et que je porterai jusqu’au dernier jour de ma vie, au nom des mémoires violées et souillées par l’ingratitude de certaines générations de ce temps-là et de celles présentes dont nombreuses sont dans le confort de l’oubli et de l’amnésie.
Si la France veut réparer comme elle l’a fait avec THIAROYE, qu’elle remette à titre posthume la carte de combattant à ces milliers de tirailleurs définitivement rentés dans l’oubli et c’est une dette morale adviternaem
MAMADOU DEME
FILS d’un tirailleur sénégalais floué
Président du parti KISAL SEN EGAAL

 

Commentaires
1 commentaires
Auteur : Posté le : 05/12/2024 à 19h54

Tes écrits sont à la hauteur de la de la gifle du caporal Deme .
Voilà pourquoi la France refuse à la posthume reconnaissance.
Bravo pour ces mots terres émouvants qui nous rendent fiers de notre papa ..

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