OPINION : L’AVERTISSEMENT MALIEN

22 - Juin - 2020

« Quand un peuple est dos au mur, il est capable de tout »
Les 05 et 19 juin 2020, des centaines de milliers de citoyens maliens se sont mobilisés, réunis à la place de l'Indépendance de Bamako, pour réclamer la démission du président Ibrahima Boubacar Keita. Les élections législatives d’avril 2020 ont mis le feu aux poudres ; l’élément déclencheur de cette forte contestation du régime en place, sur fond d’insécurité, de mal gouvernance et d’énormes scandales de corruption. Alors que les résultats provisoires annonçaient 43 députés pour le parti au pouvoir, les résultats définitifs publiés par la Cour Constitutionnelle ont attribué au parti au pouvoir, d’Ibrahima Boubacar Keita, 10 sièges supplémentaires. Une fraude réalisée avec la complicité de la Cour Constitutionnelle, dont 4 de ses membres ont démissionné, avec fracas.
De nombreux mouvements citoyens, des organisations de la société civile et des partis politiques d’opposition ont répondu massivement à l’appel d’un guide religieux, l’Imam Mahmoud Dicko, fondateur de la Coordination des mouvements, associations et sympathisants (CMAS) et figure emblématique de cette contestation inédite, dont le dénominateur commun est la dénonciation « du mensonge, de la gabegie du régime, du népotisme, des malversations, et des détournements de deniers publics ». Dérouté par cette alliance hétéroclite qui exige sa démission, le Président Ibrahima Boubacar Keita, dans une sorte de sauve-qui-peut, multiplie les reculades et est prêt à toutes les concessions : tenue de nouvelles élections partielles, formation d’un gouvernement d’union nationale, etc… Acculé, au pied du mur, IBK ne compte plus que sur la médiation de la CEDEAO, une médiation, qui, pour l’instant s’est soldée par un cuisant échec, la figure du mouvement, l’Imam Mahmoud DICKO, affirmant sa détermination de continuer la mobilisation jusqu’à l’atteinte de l’objectif (démission d’IBK).
S’il ne faut pas souhaiter que le Mali bascule dans l’anarchie et du côté obscur, une situation qui pourrait déstabiliser la sous-région, (le péril djihadiste est toujours présent), il convient de souligner clairement que l’actuel président Ibrahima Boubacar Keita est le premier et unique responsable du chaos actuel au Mali. De fait, on aurait donc tort de ne voir dans les événements en cours au Mali qu’une dimension purement religieuse. Comme l’a dit si bien Alioune Tine, Directeur d'Africa Joom Center, une telle analyse est simpliste et biaisée. En réalité, l’Imam Mahmoud Dicko est le catalyseur d’un ras de bol du peuple malien qui souhaite refermer plus tôt que prévu (démission du président avant le terme de son mandat), la parenthèse d’un régime qui s’appuie sur une justice instrumentalisée et la cour constitutionnelle pour éliminer des candidats, et fabriquer de faux électoraux dans l’unique but de conserver le pouvoir. Honni par une frange importante du peuple malien, IBK en est réduit à supplier qu’on le laisse terminer son mandat. L’irruption spectaculaire et inattendue de l’Imam Mahmoud Dicko et l’espérance qu’il suscite (son discours trouve ses ressorts dans un populisme religieux), traduit incontestablement la faillite de l’état malien et l’effondrement des partis traditionnels (la nature a horreur du vide).

Disons-le clairement, ce qui se passe actuellement au Mali pourrait demain s’étendre dans d’autres pays de la sous-région, que ce soit en Guinée, ou au Sénégal.
Quand un peuple est dos au mur, il est capable de tout.
Seybani SOUGOU

Nb : Au moment où ces lignes sont écrites, j’ai appris que l’apprenti dictateur Macky Sall a encore frappé avec l’arrestation arbitraire du commissaire divisionnaire, à la retraite, Boubacar Sadio, dont je reprends textuellement les termes : « Le Sénégal est malade de la perversion des principes républicains et de la déliquescence morale de ses dirigeants ». Charles Péguy, disait à juste titre « qui ne dit pas la vérité quand il la sait se fait le complice des menteurs et des faussaires ».

Liens utiles concernant la situation au Mali
https://www.maliweb.net/institutions-politiques/urgent-quatre-membres-de-la-cour-constitutionnelle-ont-demissionne-2880990.html
https://www.financialafrik.com/2020/06/20/mali-4-membres-de-la-cour-constitutionnelle-demissionnent/
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2020/06/20/mali-une-coalition-d-opposants-reclame-la-demission-du-president-ibk-sur-fond-de-crise-sociale_6043529_3212.html

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

15 - Novembre - 2023

Pour avoir refusé de lui remettre ses fiches de parrainages : Sonko réclame 2,5 milliards F CFA à Thiendella Fall

Ousmane Sonko a lancé une poursuite judiciaire contre Thiendella Fall, le directeur de la Dge qui refuse de lui remettre ses fiches de parrainage. L'information a été...

15 - Novembre - 2023

Course vers le Palais : « Je dis aux Sénégalais que j’arrête la collecte pour le parrainage » (Déthié Fall)

En conférence de presse ce mardi 14 novembre, le président du Parti Républicain pour le Progrès (PRP), Dethie Fall et ses collaborateurs se sont prononcés sur...

14 - Novembre - 2023

Prestation de serment des nouveaux membres de la CENA, recours de Sonko : Abdoulaye Sylla décline son «code» de conduite

Nommé par décret n°2023-2152 du 03 novembre 2023, les nouveaux membres de la Commission Électorale nationale Autonome (CENA) ont prêté serment hier, lundi 13...

14 - Novembre - 2023

Ousmane Sonko transféré à la prison du Cap Manuel depuis hier

Ousmane Sonko, le leader du Pastef n'est plus à l'hôpital, il a été transféré à la prison du Cap Manuel de Dakar, depuis hier lundi. L'information a...

13 - Novembre - 2023

CONGRES D’INVESTITURE DU CANDIDAT DU PARTI L’UNION SOCIALE LIBERALE (USL)

Ce samedi 11 novembre 2023, s’est tenue dans la salle de l’Unité africaine du Centre international du commerce extérieur du Sénégal (CICES) de Dakar, le...