POUR QUI SE PREND LE PRESIDENT DE NOTRE CONSEIL CONSTITUTIONNEL ? (PAR ABDOUL MBAYE)

23 - Juillet - 2021

Le 19 juillet 2021 le Congrès de la Renaissance Démocratique (CRD) a adressé à Monsieur Papa Oumar Sakho, Président du Conseil constitutionnel du Sénégal, un courrier par lequel ce regroupement de partis politiques de l’opposition constatait l’impossibilité pour un Conseil constitutionnel réduit à quatre (4) membres de délibérer dans le respect de l’article 23 de la Loi organique 2016-23 du 14 juillet 2016.
En conséquence, le CRD lui demandait de saisir le Président de la République pour l’informer de cette grave situation (quorum insuffisant qui dure depuis le 3 janvier 2021) afin qu’il puisse mettre fin par décrets de nomination à un désordre institutionnel susceptible de mettre en danger la sécurité, la stabilité juridique et la paix civile au Sénégal.
La réponse du Conseil constitutionnel est arrivée avec sa décision n°2/C/2021 rendue le 20/07/2021.
Par cette Décision, le CC commence par reconnaître son incapacité à délibérer légalement en raison de l’absence définitive de trois (3) de ses membres. Le CC décide ensuite de sa capacité à délibérer sur la base de la seule présence de quatre (4) membres au nom de devoir « toujours être en mesure d’exercer son pouvoir régulateur et de remplir ses missions au nom de l’intérêt général, de l’ordre public, de la paix, de la stabilité des institutions et du principe de la nécessaire continuité du fonctionnement des institutions » (sic)
Il est d’une gravité extrême que, ce faisant, le CC a créé une nouvelle règle de quorum en s’arrogeant des pouvoirs dévolus au législateur d’une part et au Président de la République d’autre part.
Faisant fi du principe fondamental selon lequel en matière juridique il ne peut y avoir de compétence sans textes, le CC a lui-même produit ses nouvelles normes. Il s’est ainsi substitué à l’Assemblée nationale, ce que ne manqueront pas d’apprécier nos honorables députés. Mais Papa Oumar Sakho se donne ce droit car il sait ce que vaut notre Assemblée nationale, exception faite des députés de l’opposition qui s’acharnent à défendre notre démocratie.
Par ailleurs, en s’octroyant des pouvoirs éminemment politiques relevant d’une responsabilité qu’il s’octroie « au nom de l’intérêt général, de l’ordre public, de la paix, de la stabilité des institutions et du principe de la nécessaire continuité du fonctionnement des institutions », le Conseil constitutionnel, sous la houlette de son Président Papa Oumar Sakho, usurpe des pouvoirs régaliens dévolus au Président de la République. Le CRD lui demandait par contre simplement d’alerter le Président de la République sur une situation grave afin de le conduire à signer des décrets de nomination de juges constitutionnels. Percevant un immobilisme et peut-être le début d’un vide du côté du pouvoir exécutif, le Président du CC a saisi une opportunité d’occuper ce rôle. L’avenir nous dira à quelle fin...
Force est par contre de constater à quel point la sécurité juridique s’est affaiblie dans notre cher Sénégal. Les principes et règles les plus élémentaires du droit sont piétinés. Le processus inexorable d’une fin de séparation des pouvoirs est mis en branle par l’Exécutif depuis plusieurs années ; il prend désormais également naissance au niveau du pouvoir judiciaire. Le recul démocratique surgit de toutes parts, mettant en sérieux danger cette paix sociale qui fit longtemps de notre pays une belle exception africaine.
Mais peut-être le projet est-il devenu la recherche d’un chaos qui semble malheureusement s’affirmer chaque jour davantage.
Dakar le 23 juillet 2021
Abdoul Mbaye
Président de l’Alliance pour la Citoyenneté et le Travail (ACT)

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

26 - Juin - 2024

LE REGLEMENT INTERIEUR DE L’ASSEMBLEE NATIONALE NE FAIT PAS MENTION DE LA DPG (DEPUTES PROCHES DU POUVOIR)

Le groupe “Yewwi Askan Wi”, regroupant des députés proches du parti au pouvoir, par la voix de son président, Ayib Daffé, a lancé mercredi un appel...

25 - Juin - 2024

L’AVENIR DE LA FRANCE DEPENDRA DE LA JEUNESSE FRANCO-AFRICAINE (PAR BIRAHIM CAMARA)

Les origines maghrébines de Jordan Bardela et Eric Zemmour importent peu dans les débats . Tout comme celles de Mélenchon ou Eric Ciotti. L'enjeu porte sur les idées...

24 - Juin - 2024

Morts, blessés et emprisonnements illégaux au Sénégal : « La loi d’amnésie doit être abrogée…Macky doit répondre de ses actes si…» défend Aminata Touré

Pour l’ancien ministre garde des sceaux, Aminata Touré, le peuple sénégalais mérite ce devoir de justice qui doit lui être rendu au regard de tous ce qui...

22 - Juin - 2024

APPEL A CANDIDATURES, ABSENCE DU PDS DU GOUVERNEMENT…LES CONFIDENCES DE BASSIROU DIOMAYE FAYE DEPUIS PARIS

Le président de la République a reçu des partis politiques, vendredi 21 juin, à la résidence parisienne de l’ambassadeur du Sénégal. Au...

22 - Juin - 2024

AMADOU BA ASSURE TRAVAILLER A LA CONSTRUCTION D’UN NOUVEAU CADRE POLITIQUE

L’ancien Premier ministre, Amadou Ba, candidat malheureux à l’élection présidentielle du 24 mars, s’est engagé vendredi à mettre en place dans...