PROJET DE LOI SUR L'IMMIGRATION : "ON N'A PAS BESOIN D'UNE NOUVELLE LOI POUR MIEUX ACCUEILLIR EN FRANCE", REAGIT FRANCE TERRE D'ASILE

16 - Septembre - 2022

"On n'a pas besoin d'une nouvelle loi pour mieux accueillir en France", a réagi vendredi 16 septembre sur franceinfo Hélène Soupios-David, responsable plaidoyer à France Terre d'Asile, après l'annonce d'Emmanuel Macron jeudi d'un projet de loi sur le droit d'asile qui serait déposé "dès début 2023". Une loi face à une "politique absurde" qui est à la fois "inefficace et inhumaine". Selon France Terre d'Asile, l'urgence est de "garantir un vrai accueil, digne" et de "faire cesser les absurdités et l'hypocrisie".

franceinfo : Que pensez-vous de cette annonce d'Emmanuel Macron ?

Hélène Soupios-David, responsable plaidoyer à France Terre d'Asile : La dernière loi date de 2018, elle n'a pas été évaluée. Entre temps, il y a eu le Covid-19, et la majorité des mesures nécessaires pour mieux accueillir ne nécessitent pas une loi. Cela relève soit du niveau réglementaire donc d'un cadre à mettre en place au niveau local, soit de moyens pour pouvoir répondre aux vrais enjeux - c'est-à-dire un accueil digne étant donné que la majorité des personnes qui arrivent aujourd'hui à Paris pour demander l'asile ont vécu à un moment donné à la rue. Pour cela, ce n'est pas loi qui va changer les choses. C'est aussi changer les conditions d'intégration, permettre d'apprendre le français le plus tôt possible, d'avoir accès au marché du travail sans entrave. Mais cela relève davantage d'obstacles administratifs ou de manque de moyens que d'un niveau législatif.

Emmanuel Macron souhaite des procédures plus rapides, y compris pour expulser ? Qu'en pensez-vous ?

Vouloir expulser plus en faisant une politique du chiffre n'a jamais marché. Ce qu'il faut éviter c'est une surenchère sécuritaire stigmatisante qui ne permettra pas de régler les enjeux. Des procédures plus rapides, oui, mais ça ne peut pas être des procédures bâclées. Lorsque quelqu'un demande l'asile, cela peut être une question de vie ou de mort. Il faut arriver à trouver un équilibre entre être efficace d'un côté mais sans créer des conséquences qui peuvent être gravissimes pour les personnes concernées de l'autre.

Emmanuel Macron plaide pour une meilleure répartition des étrangers accueillis sur le territoire, notamment avec un mécanisme de répartition en faveur des "espaces ruraux". Est-ce une bonne solution selon vous ?

Il faut savoir qu'en ce qui concerne les demandeurs d'asile, c'est déjà le cas. Ils sont répartis dans des hébergements un peu partout en France. Après, cela pose plusieurs questions. On peut vouloir répartir, mais cela implique un impérieux besoin de concertation avec les collectivités en amont, puisqu'au final, ce sont elles qui seront les garantes de la bonne installation, de la bonne intégration des personnes sur place. On ne peut pas envoyer des gens dans des territoires très ruraux s'ils ne peuvent pas avoir accès à des cours de français, s'ils ne peuvent pas se déplacer parce qu'ils n'ont pas de voiture ou s'il n'y a aucun emploi dans la région. Donc, il y a quand même des choses qui doivent être prises en compte pour que cela fonctionne. Et puis se pose la question de ce que ça veut dire répartir. Comment ? Si la personne est indépendante et est autonome financièrement, est-ce qu'on peut décider d'imposer un endroit où s'installer ? Cela me paraît un peu compliqué.

Que faut-il faire le plus rapidement possible ?

Commençons par évaluer [la loi de 2018]. Avant de se lancer dans un débat législatif et dans des changements qui ne sont pas nécessaires, commençons par lever des obstacles qui, parfois, sont des obstacles très pratiques, très administratifs. Des documents qui ne sont pas acceptés alors qu'ils devraient l'être, des cours de français qui ne sont pas disponibles dès le début de la procédure par exemple. En fait, en France, on a un cadre juridique qui est assez solide. Mais c'est souvent ensuite dans l'application de la loi que cela pèche réellement.
Et la première urgence, c'est vraiment de garantir un vrai accueil, digne, de faire cesser ces situations de rue et c'est aussi de sortir de situations complètement absurdes. On a par exemple des jeunes qui arrivent mineurs, qui sont intégrés socialement, qui sont en formation, qui sont en apprentissage. Les employeurs ont besoin d'eux et à leur majorité à nouveau, à la suite d'obstacles administratifs ou à des pratiques, on leur demande de rentrer dans leur pays alors que l'État a déjà investi en eux et qu'ils sont soutenus par toute leur communauté sociale, éducative et leurs employeurs. Et donc, c'est faire cesser les absurdités et l'hypocrisie qui est le plus important.

 

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