PROPOS DE MERCREDI :LE SILENCE EST LE ROI DES AVEUX

03 - Avril - 2019

Le maire Barthélémy Diaz a fourni des informations pointues sur les procédés utilisés pour bourrer le fichier électoral de faux électeurs dont le « vote » a permis de donner à Macky Sall un deuxième mandat. Plus d’une semaine après sa conférence de presse, la seule réponse des accusés qu’il a nommément cités est le silence. Silence total sur les fichiers d’état-civil falsifiés, les faux numéros d’enregistrement créés, les mineurs irrégulièrement inscrits comme électeurs. Par milliers et par milliers.
On comprend pourquoi le ministre de l’Intérieur et le président de la Cena avaient refusé en son temps l’application de l’article L48 du Code électoral reconnaissant aux partis politiques un droit de regard et de contrôle sur la tenue du fichier. L’opposition n’ayant pas pu prendre à temps des contre-mesures efficaces, le forfait a pu être accompli. Mais un crime n’est jamais parfait. Les premières analyses du fichier ont fait sortir les gros cafards que le maire a montrés. Il y en aura d’autres, plus gros encore, qui confirmeront ce que l’atmosphère de deuil national ayant suivi la proclamation des « résultats » a déjà révélé : un candidat minoritaire, rejeté par la population, s’est auto-élu « techniquement ».
C’est d’abord sur cette question de la légitimité douteuse de son élection que Macky Sall était attendu hier par les (trop ?) nombreux invités de sa cérémonie de prestation de serment. A cette occasion, le président du Conseil constitutionnel a dénigré l’opposition et encensé la Première dame, reprenant ainsi la structure binaire du discours marron-beige orthodoxe. A sa suite, Macky Sall a choisi de nier l’évidence de la contestation de son « élection » par tous les quatre autres candidats. Les réactions qui ont suivi son discours montrent qu’il était également attendu sur la question du « troisième mandat en 2024 », possibilité que des juristes émérites l’ont accusé d’avoir introduit dans la révision constitutionnelle de 2016. Son silence sur la question donne le feu vert à ses partisans qui brandissent déjà l’argument-massue de tous les apprentis dictateurs : « si le peuple l’accepte, pourquoi pas ? ».

Président par défaut, président par des faux
Ces silences traduisent l’incapacité d’articuler un contre-argumentaire consistant. Il ne reste alors que le recours à la rhétorique de Diouf après son accession à la présidence suite à un putsch constitutionnel et une succession de coups d’État électoraux. Comme le Diouf de 1983 et 1988 en effet, Sall n’a qu’une formule fétiche à la bouche : « je suis le président de tous les Sénégalais ». La répétition frénétique de cette expression révèle le malaise de celui qui passe désormais du statut de « président par défaut » à celui de « président par des faux ». Un traumatisme dont les appels cosmétiques et propagandistes à un « dialogue national » sans ordre du jour concerté ni mécanisme consensuel de prise de décision pourront difficilement provoquer la guérison.

Mamadou Bamba Ndiaye
Ancien député
Secrétaire général du Mps/Selal

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

18 - Juin - 2024

Jordan Bardella tacle à son tour Kylian Mbappé

Jordan Bardella, président du Rassemblement national et pressenti pour être désigné Premier ministre en cas de victoire à l’Assemblée nationale, a...

18 - Juin - 2024

Pourquoi l'Association des Français du Sénégal pourrait organiser des rassemblements citoyens devant le Consulat Général de France à Dakar

Le consul général de France à Dakar, affiche clairement son intention d'écarter du processus des législatives des 30 juin et 7 juillet 2024 des milliers de...

15 - Juin - 2024

Des manifestations contre l'extrême droite partout en France

Près de 250 000 personnes ont manifesté contre l'extrême droite en France, à l'appel notamment de cinq syndicats, d'associations et des partis de gauche membres du...

15 - Juin - 2024

Elections législatives : Nicolas Sarkozy critique la décision d'Eric Ciotti de s'allier au Rassemblement national

"Un déni de démocratie" pur et simple. L'ex-président de la République Nicolas Sarkozy critique durement la décision d'Eric Ciotti, président...

15 - Juin - 2024

Législatives : François Hollande justifie sa candidature en Corrèze au nom du PS par une "situation exceptionnelle" et la montée de l'extrême droite

"Si j'ai pris cette décision, c'est parce que j'ai estimé que la situation était grave." "A situation exceptionnelle, décision exceptionnelle", a déclaré...