PROPOS DE MERCREDI :QUAND LA MASSE SILENCIEUSE PREND LA PAROLE

07 - Novembre - 2018

La mort de Cheikh Diop, qui s’est immolé devant le palais présidentiel pour protester contre le retard de paiement d’indemnités dues par l’Etat, jette une lumière crue sur la gouvernance maquillée.
Le mort est accusé, traîné dans la boue, son honnêteté suspectée, sa santé mentale dénigrée, dans une vaine tentative de gommer la responsabilité de l’Etat dans ce drame affreux. Aucune empathie, aucune manifestation de solidarité avec la famille du défunt. Le seul souci est d’imputer au défunt la responsabilité exclusive de son décès. C’est à la limite s’il n’est pas suspecté de s’être suicidé uniquement pour gêner la communication du parti au pouvoir.
Pourtant, cette responsabilité est partagée. Cheikh est en effet, après l’étudiant Fallou Sène, une nouvelle victime de l’assèchement des caisses d’un gouvernement qui n’a plus la liquidité nécessaire pour faire face à ses engagements. Il a protesté à sa manière et son acte s’inscrit dans la protestation générale des Sénégalais contre l’incurie du pouvoir marron.
A propos de liquidité, la Banque mondiale vient d’annoncer l’existence d’un trou de 145 milliards dans la caisse publique. Elle ne fait que confirmer, avec du retard, une réalité que les Sénégalais vivent dans leur chair et leur sang. Devant cette grave révélation, le gouvernement fait le mort. A ce jour, aucun commentaire n’est venu du président Macky Sall, de son premier ministre ou de son ministre des Finances. Ils sont pourtant si prompts à tirer sur tout ce qui bouge, comme ceux qui dénoncent la gestion calamiteuse et irresponsable de nos ressources naturelles.
A propos de protestation populaire, Matam a remporté la palme avec la marche du 5 novembre. C’était, après celle du 12 mars dernier, la deuxième marche de protestation organisée dans ce “fief” marron contre le non-respect des promesses électorales du président de l’Apr. Les marcheurs ont réclamé l’amélioration de leurs conditions d’existence et notamment l’accès des jeunes à l’enseignement supérieur sur place. Ce faisant, ils ont démontré une conscience républicaine bien supérieure à celle de Mackyavel et ses affidés, qui ont érigé l’ethnicisme en stratégie électorale devant leur garantir “100%” des voix à la prochaine présidentielle dans cette région.
L’un des porte-parole des marcheurs a clairement expliqué leur rejet de l’ethnicisme : “ce n’est pas parce que nous sommes des parents qu’il va considérer que nous lui appartenons et qu’il n’a pas besoin de nous satisfaire. Nous voterons contre lui s’il ne respecte pas ses engagements”.
Les protestations populaires qui se manifestent sur toute l’étendue du territoire national, y compris dans les régions périphériques, annoncent un tournant de la conjoncture politique. La masse silencieuse sort de sa léthargie et fait irruption sur la scène pour faire entendre ses revendications. A côté des combats de l’opposition politique, cette opposition sociale massive annonce plus qu’une fin de règne. Les temps changent. Le Sénégal n’est peut-être pas en état de grossesse mais il est fort probable qu’il accouche d’une révolution.

07/11/2018
Mamadou Bamba NDIAYE
Ancien député
Secrétaire général du Mps.Selal

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

06 - Février - 2024

Menace sur la République (Par Vieux SAVANE)

Comme un révélateur des relations heurtées en cours au sommet de l’Etat, il est permis de penser que le Premier ministre, ancien candidat de Benno Bokk Yaakaar à...

06 - Février - 2024

Macky, le coup de tonnerre (Par Abdoulaye THIAM)

Coup de tonnerre au Sénégal ! Le Président de la République, Macky Sall dont le second mandat prend fin le 2 avril prochain, a pris un décret ce samedi 3...

06 - Février - 2024

« Le Pds et l’Apr/Bby ont mis le feu à ce qui nous restait de la démocratie », Birame Souleye Diop

La Constitution du Sénégal a été révisée lundi 5 février par l’Assemblée nationale, fixant, au 15 décembre 2024, la date de la...

06 - Février - 2024

TEXTE COLLECTIF : RESTAURER LA RÉPUBLIQUE

Ce 3 février 2024, le président Macky Sall, en interrompant in extremis et illégalement le processus électoral, a plongé le pays dans une torpeur inédite...

05 - Février - 2024

ANNULATION DE L’ELECTION PRESIDENTIELLE DU 25 FEVRIER 2024, UNE PREMIERE AUX CONSEQUENCES TRES GRAVES ( DR DIA IBRAHIMA)

La déclaration du Président de la République d’hier en début d’après-midi, annonçant l’annulation du décret convoquant le corps...