Rapport Doing business 2019: Le Sénégal perd une place, malgré les progrès
Ouverture de la session ordinaire du Conseil des ministres de l'UEMOA
Dakar, le 23 mars 2018 - Une session ordinaire du Conseil des ministres de l'Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) s'est ouverte, ce matin, à Dakar, au siège de la Banque Centrale des États de l'Afrique de l'Ouest. Photo: Amadou Bâ, ministre de l'Économie, des Finances et du Plan.
Le Sénégal perd une place dans le classement mondial du rapport Doing Business 2019 de la Banque mondiale. De la 140e place, l’année dernière, le pays régresse à la 141e, avec deux réformes phares contre cinq en 2018.
Le Sénégal a accompli des progrès remarquables, ces 4 dernières années, dans le classement mondial du rapport Doing Business de la Banque mondiale. Il a réalisé 6 réformes dans le rapport 2015, 4 en 2016, 4 autres en 2017 et 5 réformes en 2018. Ce qui fait un total de 19 réformes en 4 ans. En progression, ceux-ci lui ont permis de gagner 14 places, durant cette période. Sauf cette année. Puisque le pays a perdu une place par rapport à l’année dernière. Il occupe la 141e place, alors qu’en 2018, il était 140e. Cependant, au sein de l’Uemoa, le Sénégal est le 3e réformateur, après la Côte d’Ivoire qui est à la 122e place, avec 5 réformes accomplies en 2019, et le Togo qui est à la 137e place, avec 6 réformes.
Parmi les pays membres de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), il est le 5e réformateur. Le Ghana arrive en tête, avec 2 réformes réalisées en 2019. Il est à la 114e place mondiale. Il est suivi de la Côte d’Ivoire, du Cap-Vert qui est 131e avec zéro réforme en 2019 et 3 l’année dernière. Le Togo occupe la 4e place et sera suivi du Sénégal. Le Nigeria, considéré comme la plus grande économie de la sous-région, est à la 146e place mondiale, avec 4 réformes cette année et 5 en 2018. Mais le pays est cité en exemple dans le rapport. Car il a fait une réforme qui facilite la création d’entreprise, avec une plateforme en ligne pour le paiement des droits de timbre. Ce qui a ramené de 19 à 11 le nombre de jours nécessaires pour créer une entreprise. Pour le Sénégal, ce délai est de 6 jours. Toutefois, pour les procédures d’obtention de permis de construire, le délai reste encore important en terre sénégalaise. Il est de 177 jours et, pour le coût, c’est 9,8 % de la valeur d'entreprise.
Il faut noter que les classements sont établis, selon la Bm, en fonction des notes moyennes pour la ‘’facilité de faire des affaires’’ de chacun des pays pour les dix thématiques prises en compte dans le classement 2019. Cette mesure indique l’écart de chaque économie par rapport aux meilleures pratiques mondiales observées en termes de réglementation commerciale. Une note plus élevée indique un environnement des affaires plus efficient et un cadre juridique plus solide. ‘’Au cours de la dernière décennie, les gouvernements se sont tournés de plus en plus vers Doing Business, en tant que référentiel de données objectives et exploitables, offrant un aperçu unique des bonnes pratiques à l'échelle mondiale, lorsqu'ils ont compris l'importance de la réglementation des entreprises en tant que moteur de la compétitivité’’, lit-on dans le document de la Bm.
Les bons points du Sénégal
Ainsi, pour assurer la coordination des efforts des agences, des économies telles que la Colombie, la Malaisie et la Fédération de Russie ont mis en place des comités de réforme de la réglementation. Ces comités utilisent les indicateurs Doing Business comme un intrant pour informer sur leurs programmes d’amélioration de l’environnement des affaires. Plus de 70 autres économies ont également formé de tels comités. Et en Afrique subsaharienne, le Sénégal en fait partie. Le pays a également rationalisé les interactions entre les différents départements en charge de l’enregistrement de propriété dans le cadre de la conservation foncière.
‘’Le Sénégal a facilité l'enregistrement des biens, en réduisant le temps nécessaire pour les transférer et les enregistrer. (…) Il a facilité l'exécution des contrats en adoptant une loi réglementant tous les aspects de la médiation en tant que mécanisme alternatif de résolution des conflits’’, renseigne le rapport. Le Sénégal fait aussi partie des pays qui ont fait des efforts dans les procédures administratives et étendu le cadre alternatif de résolution des litiges commerciaux, avec notamment l’installation d’un tribunal de commerce. Concernant l’obtention de l’électricité, le Sénégal bat le record mondial. Il faut, ici, 75 jours pour un raccordement électrique permanent au réseau et 86 jours en moyenne dans le reste du monde.
L’Afrique subsaharienne championne des réformes
La présente édition du rapport Doing Business marque la sixième année consécutive où l’Afrique subsaharienne affiche le plus grand nombre de réformes réglementaires facilitant les affaires. Un tiers des réformes recensées dans ce document à travers le monde ont eu lieu dans cette zone. ‘’Avec un total de 107 réformes, cette région détient le record mondial pour la troisième année consécutive.
En outre, cette année marque également un record en termes de nombre de pays ayant engagé des réformes : 40 des 48 économies de la région ont mis en œuvre au moins une réforme, contre 37 pour le record précédent, il y a deux ans’’, indique la même source. En fait, les améliorations phares concernent le domaine de l’exécution des contrats où il est enregistré 27 réformes, suivi par la création d’entreprise (17 réformes) et le transfert de propriété (13).
Il faut rappeler qu’en 2017, les 17 États parties de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (Ohada) ont adopté un acte uniforme relatif à la médiation. Ce qui vient pallier le vide législatif qui existait dans la plupart de ses États membres sur la médiation comme mode amiable de règlement des différends. Quatre pays d’Afrique subsaharienne - le Togo, le Kenya, la Côte d'Ivoire et le Rwanda - figurent dans la liste des 10 pays les plus réformateurs, cette année. Sur les 12 derniers mois, ces pays ont mis en œuvre 23 réformes au total. Le Rwanda est le pays de la région à avoir introduit le plus grand nombre de réformes, 7 au cours de l’année passée. Avec 5 réformes à leur actif chacun, le Gabon, la Guinée et le Soudan font également partie des grands pays réformateurs. Avec 8 réformes à son actif dans le domaine du raccordement à l’électricité, l’Afrique subsaharienne détient le record mondial.
Il convient de souligner que des changements ont été introduits, cette année, dans le rapport Doing Business. Il s’agit, notamment, de l’indicateur ‘’Distance de la frontière’’ qui a été renommé ‘’Facilité de faire des affaires’’. Ceci, selon les acteurs, afin de ‘’mieux refléter’’ son objectif principal qui est de mesurer les progrès enregistrés en valeur absolue en direction des meilleures pratiques (sans que le calcul ne soit modifié). ‘’Aucun changement n’a été introduit cette année, ni dans la méthodologie ni dans le calcul de la note de la facilité de faire des affaires qui sous-tend le classement Doing Business’’, précise la Bm.
Dès lors, le document présente quatre études de cas qui soulignent particulièrement les avantages de la formation annuelle obligatoire des agents de la Fonction publique et des utilisateurs des registres du commerce et des registres fonciers. Mais aussi celle des agents de dédouanement et des commissionnaires en douane. Pour la Bm, un cadre réglementaire robuste du secteur de l’électricité et de la certification de la profession d’électricien est nécessaire, de même que la spécialisation des juges.
RECUL DU SENEGAL DANS LE CLASSEMENT DOING BUSINESS 2019
L’Apix relativise et s’explique
Si le Sénégal a reculé dans le classement Doing Business 2019, c’est en partie parce que de nombreuses réformes en cours ne sont pas encore arrivées à maturation. Le directeur de l’Environnement des affaires au sein de l’Apix s’en explique.
Mariama Diémé
Le recul du Sénégal dans le classement Doing Business 2019 n’est pas une chose négative, si on se réfère aux propos du directeur de l’Environnement des affaires au sein de l’Agence pour la promotion des investissements et des grands travaux (Apix). ‘’Il faudrait avoir une lecture beaucoup plus holistique du rapport. Il faut regarder la partie moyenne ; elle s’est améliorée. Avec la 141e place, elle s’est établie à 54,15, alors que l’année dernière, elle était de 53,78. Ce qui compte le plus, c’est la dynamique de progrès globale. Quand on est dans des séries continues de progrès, il y a des moments où on peut faire des fléchissements’’, explique Amadou Lamine Ba, joint par téléphone par ‘’EnQuête’’.
Selon lui, cette situation s’explique par le fait qu’il y a des nouvelles réformes qui ont été lancées et qui ne sont pas encore arrivées à maturation. ‘’Aujourd’hui, il y a des mesures qui ont été enclenchées, mais pas dans le cycle qui a été évalué. Donc, elles impacteront les années à venir. C’est quelque chose qui arrive souvent dans les classements internationaux. On peut faire des progrès, mais, à un moment où c’est des réformes, il y a le temps de la maturation’’.
Donc, le chargé de l’Environnement des affaires de l’Apix souligne que le temps que les réformes deviennent plus matures et qu’elles soient effectives, dans la phase des réformes les plus difficiles, il peut arriver qu’il y ait des replis sur le rang.
C’est pourquoi Amadou Lamine Ba estime qu’il faut ‘’saluer’’ le fait que, de façon globale, ce sont les pays africains qui réforment. ‘’Ce que ça pose comme défi pour un pays comme le Sénégal, c’est d’être beaucoup plus rapide’’, concède-t-il.
Le Sénégal dans le top 100, en 2020 ?
Dans la feuille de route du gouvernement établie après la publication du rapport Doing Business de 2017, il était prévu de généraliser le télépaiement pour les frais liés à la délivrance des actes administratifs déjà dématérialisés (création d’entreprise, permis de construire, suretés et actes de greffe) avant le 15 mars 2017. Egalement, la finalisation du processus de mise en place d’un guichet unique intégral au port, sous forme de centre de service et traitement centralisé de toutes les formalités d’import-export, devait se faire à la date du 30 avril 2017. Interpellé sur cette question, Amadou Lamine Ba déclare que cette feuille de route se réalise et continuera à booster le Sénégal pour les années à venir.
‘’Pour le télépaiement, c’est une procédure qui est en cours. Maintenant, au niveau de l’application, il y a des problèmes d’opérationnalité qui sont en phase de correction. Peut-être d’ici la fin de l’année, la généralisation sera effective’’, avance-t-il. Avant de faire remarquer que ce sont des mesures qui ne sont pas complétement finalisées et qui n’impacteront pas les classements venir. Concernant le guichet unique intégral du Port autonome de Dakar, M. Ba renseigne que cela nécessite aussi du temps pour la mise en œuvre. Il l’espère pour mi-2019. ‘’Pour le système de paiement unique des taxes sociales, le processus est aussi en cours. Il devait être finalisé, mais il y a eu des contraintes. Les responsables ont demandé qu’on repousse les délais. Pour l’amélioration du taux d’enrôlement au niveau du Bureau information crédit (Bic), le projet est finalisé. La loi a été prise au mois de mars dernier. Elle marche, mais n’est pas considérée dans le classement 2019’’, dit-il.
Dès lors, selon le chargé de l’Environnement des affaires au sein de l’Apix, le Sénégal peut être dans le top 100, en 2020, comme le souhaite le gouvernement. Toutes ces mesures seront finalisées, d’ici là. Ainsi, il estime qu’on peut s’attendre à une amélioration de la position du Sénégal dans le classement des Doing Business les années à venir.
News adakar