SENEGAL : OUSMANE SONKO,LE DERNIER OPPOSANT AMACKY SALL ?

05 - Janvier - 2021

Alors que dans le camp de MackySall, certains ne font pas mystère de leur désir d’engloutir l’opposition toute entière, Ousmane Sonko assume de porter seul ou presque la contestation. Quitte à être la première cible du pouvoir.
Il n’y a pas si longtemps, il n’était encore que cet inspecteur des impôts turbulent, qui s’était fait connaître en accusant le chef de l’État de « corruption » et de « viol de la Constitution et du code pétrolier ». C’était en 2016 et la sanction n'avait  pas tardé à tomber : Ousmane Sonko était radié de la fonction publique par décret présidentiel pour «manquement au devoir de réserve ».
Depuis, il a fait du chemin. Après avoir été élu député en 2017 et remporté 16 % des suffrages lors de la présidentielle de 2019, il est de fait devenu, à tout juste 46 ans, l’un des principaux opposants au président. Voire l’un des derniers.
Son propre parti, le Pastef, pourrait-il s’en trouver menacé  ? Le 2 janvier, le ministre de l’Intérieur,Antoine Félix Diome, faisait savoir par voie de communiqué que la formation s’exposait « à la dissolution », comme « tout parti politique qui reçoit des subsides de l’étranger ou d’étrangers établis au Sénégal ».
En cause : une campagne de levée de fonds internationale lancée le même jour par Pastef. Elle aurait déjà permis de récolter plus de 125 millions de F CFA et 80 millions de promesses de dons, et les Sénégalais de la diaspora y ont largement contribué. « Les partis politiques ne peuvent bénéficier d’autres ressources que celles provenant des cotisations, dons et legs de leurs adhérents et sympathisants nationaux, et des bénéfices réalisés à l’occasion des manifestations », rappelle pourtant le ministre.
Les équipes d’Ousmane Sonko dénoncent une «manœuvre d’intimidation » : « La cotisation de nos militants est notre seul mode de financement depuis la création du parti, précise le chargé de communication de Pastef, El Malick Ndiaye. Mais le succès de cette campagne a fait peur aux autorités. »
Pastef enfreint-il la loi ou est-il la cible d’un pouvoir qui ne pouvait laisser passer pareille occasion d’entraver la progression de son adversaire ? Une chose est sûre : l’opposition sénégalaise est déjà très affaiblie par la mise hors-jeu de Karim Wade, du Parti démocratique sénégalais (PDS), et de l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall tous deux sont inéligibles.
Quant à Idrissa Seck, arrivé deuxième à l’issue du dernier scrutin présidentiel, et Oumar Sarr, transfuge du PDS, ils ont rallié la majorité à l’occasion du remaniement du 1er novembre dernier. Dans le camp de Macky Sall, certains ne font pas mystère de leur désir de voir l’opposition entièrement engloutie dans la machine BBY (Benno Bokk Yakaar).
« De la politique à l’ancienne »
Pour gouverner plus « confortablement » et sans contestation, et préparer au mieux la présidentielle de 2024, à laquelle il ne peut participer selon la Constitution, le président n’a pas hésité à se séparer de plusieurs de ses plus proches ministres.« Il a toujours voulu éviter un combat des chefs,explique l’un de ses conseillers. Il a eu le courage de couper des têtes pour éviter que le travail du gouvernement ne soit parasité. » « On allait droit vers une cacophonie et une guerre fratricide,renchérit un observateur de la vie politique sénégalaise proche du président. Il fallait clarifier la situation.
En écartant ces « ambitieux », Macky Sall s’est aussi rapproché de personnalités à l’ancrage territorial marqué : Idrissa Seck à Touba, Oumar Sarr à Dagana et Aïssata Tall Sall dans le Fouta pourraient renforcer sa coalition lors des prochainesélections locales. « Il n’est jamais bon pour un président en fin de mandat d’être minoritaire dans les collectivités », assure son conseiller. une stratégie qui « relève de la politique à l’ancienne »,tacle un cadre déçu de l’Alliance pour la République(APR, parti présidentiel) pour qui « coopter un chef de parti n’équivaut pas à coopter ses bases ».
Une ligne radicale et constante
Ousmane Sonko, lui, se veut confiant. Mieux, il se satisfait de découvrir le « vrai visage » d’opposants qui – selon lui – n’en étaient pas ou plus. Le député « patriote », arc-bouté sur sa position antisystème, assume de porter seul, ou presque, la contestation contre le régime de Macky Sall. Agitateur pour les uns, tribun pour les autres,il a su trouver son public et son électorat en untemps record.
« IL EST DANGEREUX DE PENSER QUE DÉSTRUCTURER L’OPPOSITION EST UN MOYEN DE GAGNER DES ÉLECTIONS. »
« Les Sénégalais en ont assez des acteurs politiques versatiles, qui changent de camp au gré de leurs intérêts », confiait-il à Jeune Afrique en novembre. Un constat partagé par un ancien compagnon de route de Macky Sall. « Ce serait un danger de penser que déstructurer l’opposition est un moyen de gagner des élections, car l’opposition
est un canal qui permet de rassembler la frustration des populations. Sans interlocuteurs, le débat se joue entre le pouvoir et la rue, analyse notre source. L’opposition, c’est comme l’eau qui coule. Si vous l’empêchez de passer d’un côté, elle finira toujours par couler ailleurs. »
Sonko revendique en tout cas une ligne radicale et constante. Il compte sur la levée de fonds lancée début janvier pour consolider sa position de challenger face à Macky Sall et préparer les prochaines élections – des locales déjà reportées et dont la nouvelle date n’a pas été fixée.
Jeune Afrique

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

31 - Janvier - 2024

RETRAIT DU NIGER, DU MALI ET DU BURKINA DE LA CEDEAO : CE QUE CONSEILLE LA RUSSIE

Le 28 janvier, le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont décidé de se retirer de la CEDEAO, déclarant que la communauté ne les avait pas aidés dans la lutte...

31 - Janvier - 2024

LES OBSERVATEURS AUX DÉLIBÉRATIONS DE LA COMMISSION DE CONTRÔLE DES PARRAINAGES

Dans un communiqué, les sept personnalités chargées d’observer les travaux de la Commission de contrôle des parrainages au Conseil constitutionnel, ont fait part...

31 - Janvier - 2024

Pacte d’application des conclusions et recommandations de la CNRI : neuf présidentiables apposent leur signature

Au total, une douzaine de candidats dont neuf ont officiellement signé hier, mardi, à Dakar, le Pacte portant engagement solennel des candidats à la Présidentielle de...

31 - Janvier - 2024

SIGNATURE DE LA CHARTE D'ADHÉSION: LA COALITION DIOMAYE PRÉSIDENT AVERTIT LES TAUPES

Suite à la sortie d’Ousmane Sonko, désignant Bassirou Diomaye Faye comme son choix parmi les candidats pour la Présidentielle de février prochain, des candidats...

31 - Janvier - 2024

COMITE ELECTORAL BBY DU DEPARTEMENT DE KANEL : BIRAHIM CAMARA CONTESTE LA DESIGNATION DE MAMADOU TALLA

Nous militants du parti socialiste du département de Kanel, déplorons avec solennité : 1 la désignation de Mamadou Talla comme plénipotentiaire du comité...