Vente de la licence de Tigo : Wari va assigner Millicom en justice pour la contraindre à respecter ses engagements
Encore un rebondissement de taille dans l’affaire de la cession de Tigo au groupe Wari de Kabirou Mbodj. Un accord de vente que Millicom avait rendu public le 7 février 2017 pour un montant 129 millions de dollars, soit près de 80 milliards de francs Cfa.
Mais depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et des retournements de situations inédits survenus à la faveur de l’initiative de Millicom, le 1er août 2017, de vouloir annuler la vente de Tigo à Wari pour la refiler au consortium Teylium Telecom de Yérim Sow, NJJ ( de Xavier Niel patron FREE) et Sofima (véhicule d’investissement en télécommunications géré par le Groupe Axian). Et ce, malgré la signature du décret présidentiel n° 2017-1475 en date du 1er aout 2017, portant approbation de « la cession de la licence d’établissement et d’exploitation des réseaux de télécommunications ouverts au public de Sentel Gsm Sa à Wari Sa ».
Millicom qui n’a pas voulu respecter sa signature a, tout bonnement, rejeté le décret présidentiel. La maison-mère a poursuivi sa logique de rupture unilatérale de l’accord avec Tigo. Rien ne fera infléchir la position de Millicom, même pas la notification qui lui a été faite le 18 octobre par Wari de la disponibilité de l’argent pour finaliser la vente, d’autant plus que, selon des interlocuteurs, le contrat stipulait que le paiement se ferait le 2 novembre 2017. Ils soulignent d’ailleurs que leurs capacités financières ne souffrent d’aucun doute, la preuve par cette possibilité de déposer le chèque avant la date butoir. « N’eut été cette irruption dans le dossier, Wari aurait déjà donné son chèque depuis le 30 août ».
L’assignation servie aujourd’hui à Millicom
Donc devant le refus de Millicom de prendre l’argent, Wari va l’assigner en justice pour le 13 novembre prochain. Millicom devra prendre connaissance de l’assignation qui lui sera servie aujourd’hui même, vendredi 27 octobre 2017. Donc Wari va convoquer Millicom devant le juge des référés du tribunal de Dakar pour, selon une source, « interdire toute nouvelle vente et reprendre la transaction ». Wari veut faire respecter les termes même de l’accord, qui a abouti à la suite d’un long processus d’approbation par les différentes autorités concernées, dont l’ARTP puis le ministère des Télécoms à la date du 9 juin 2017 et à la signature d’un décret présidentiel.
C’est d’ailleurs, le ministre de tutelle qui, après validation, a préparé le décret d’approbation soumis à la signature du président de la République. D’ailleurs, c’est sur ce point qu’à Wari, on trouve des ressources supplémentaires pour battre en brèche les arguments développés par Millicom selon lesquels, le processus de la vente est une affaire entre privés.
« Ils font croire que c’est entre privés seulement que la vente se fait. C’est un manque de sérieux et une manipulation pure et simple. On est dans un secteur régulé par l’Etat et comme dans tous les secteurs du genre, il n’est pas possible d’acheter ou de ventre sans autorisation de l’Etat », clament des sources qui ne manquent pas de « poser une question bête : pourquoi l’Etat doit-il prendre un décret s’il n’est pas le garant ultime de la transaction ? ».
L’Etat incontournable dans le processus de cession de la licence
En tout cas, il n’est pas inutile de rappeler que le 10 février 2017, en marge du séminaire de partage avec les journalistes sur les 15 ans de l’ARTP, le DG Abdou Karim Sall avait, déclaré, selon le site ‘’agenceecofin’’ que « la condition sine qua non d’une cession de concession, c’est l’approbation de l’Etat du Sénégal ». Et que si rachat il y a, le code des télécommunications dispose de moyens permettant à l’ARTP de valider cette opération, si elle a l’accord des autorités.
D’ailleurs le code des télécommunications dispose en son article 23, que dans une telle opération, l’Etat du Sénégal doit non seulement être informé, mais il doit être associé aux négociations. L’article 27 du même code dispose, par ailleurs, que les licences délivrées sont personnelles. Il est aussi noté que la convention qui lie Millicom à l’Etat du Sénégal stipule que la concession de la licence est strictement personnelle et ne peut être cédée sauf accord du concédant (l’Etat du Sénégal) .Millicom ne peut donc pas vendre sa licence sans au préalable, avoir l’accord des autorités sénégalaises, qui peuvent s’opposer à la vente.
A Wari, on ne manque pas aussi de faire état d’ « une grande gêne ». « Les entrepreneurs nationaux qui veulent développer leur pays, ne sont pas assez soutenus par l’Etat. Quand des Niel viennent aidés par leur gouvernement, ce dernier est dans son rôle d’aider son secteur privé à créer des richesses. Mais ici, on met des hommes-lige qui font croire qu’ils font l’opération alors qu’ils sont à la marge. Il faut que le secteur privé national ait une plus grande place dans les stratégies pour l’émergence du Sénégal », s’arrache-t-on les cheveux.
Vox populi