COVID-19 : LE PROJET DE LOI HABILITANT LE PRESIDENT A PRENDRE PAR ORDONNANCE DES MESURES, PENDANT UNE DUREE DE 3 MOIS, NE DOIT PAS ETRE VOTE EN L'ETAT

29 - Mars - 2020

La pandémie de COVID-19 touche la quasi-totalité de la planète et constitue une menace extrêmement grave pour l’humanité. A l’instar de tous les pays du monde, le Sénégal a pris des mesures drastiques pour lutter contre la propagation du Coronavirus.
Certaines de ces mesures sont nécessaires et salutaires (arrêté d’interdiction des rassemblements publics sur les lieux clos et ouverts) et font l’objet d’un consensus, tandis que d’autres (état d’urgence assorti d’un couvre-feu de 20 heures à 6 heures du matin) sont contestables, car leur efficacité n’est pas démontrée pour freiner la propagation de l’épidémie Covid-19 (un couvre-feu à 20 h est inutile, inefficace, et n’a jamais empêché la circulation d’un virus).
Par décret n°2020-878 du 26 mars 2020, un projet de loi a été initié, habilitant le Président à prendre par ordonnance, pendant une durée de 3 mois, des mesures, d’ordre économique, budgétaire, social, économique, et sécuritaire. Sur le principe, une loi d’urgence pour enrayer l’épidémie de Covid-19 est opportune pour éviter une catastrophe sanitaire, accompagner les entreprises menacées de faillite et soutenir les populations fortement impactées (par des mesures sociales appropriées). Néanmoins, le projet de loi d’habilitation contient une disposition floue, extrêmement dangereuse qui nécessite l’attention de tous les sénégalais.
En effet, dans le paragraphe 4 de l’exposé des motifs, il est précisé « que le gouvernement tiendra informée des mesures prises ou mises en œuvre ». Cette disposition est imprécise, floue, générale et peut être la porte ouverte à tous les abus. En France, la loi d’urgence du 23 mars 2020 pour faire face à l’épidémie du Coronavirus a détaillé les mesures d'urgence économique et d'adaptation à la lutte contre l'épidémie de Covid-19 :
• Aider et soutenir la trésorerie des entreprises et des associations afin de limiter les faillites et les licenciements
• Adapter le droit du travail (accord de branche ou d'entreprise autorisant l'employeur à imposer des dates de prise de jours de congé dans la limite de six jours, conditions facilitées pour le versement de l'intéressement et de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat aux salariés...) ;
• Prolonger l'indemnisation des chômeurs en fin de droits
• Adapter les procédures administratives et juridictionnelles
• Faciliter la garde des jeunes enfants dans le contexte de fermeture des structures d'accueil
• Protéger les publics fragiles (personnes handicapées, âgées, pauvres...)
• Permettre le maintien des droits des assurés sociaux et leur accès aux soins (complémentaire santé, allocations familiales...) ;
• Assouplir les règles de fonctionnement des collectivités locales (délégation de pouvoir étendue confiée aux maires...).
Avant son adoption par l’assemblée, le projet de loi détaillé comprenant également le report du second tour des élections municipales du 21 mars 2020 avait été soumis préalablement au Sénat qui l’a adopté le 19 mars 2020. Les sénateurs ont encadré les pouvoirs du Premier ministre dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire (pas de clause générale de compétences).
Le projet de loi habilitant Macky Sall à prendre par ordonnance des mesures est un fourre-tout et ne fournit aucune indication ou précision quant aux mesures d’urgence prévues au niveau budgétaire, économique, social, sanitaire et sécuritaire (en France, la loi ne fait pas référence au volet sécuritaire, puisque le dispositif insiste sur la notion d’état d’urgence sanitaire, le sujet est circonscris).
Le projet de loi doit détailler les mesures que compte prendre Macky Sall, dans le domaine de la loi. En l’absence de précisions concernant les mesures prévues, ce projet de loi ne doit absolument pas être voté en l’état.

La situation exceptionnelle qui prévaut dans le contexte actuel lié au risque sanitaire concernant la propagation de l’épidémie Covid-19 ne doit pas nous faire perdre notre lucidité. L’unité nationale qui est nécessaire dans ces circonstances exceptionnelles (conjoncturelles) pour faire face à une menace extrêmement grave ne justifie pas tous les écarts. Tous les projets de loi ne peuvent être acceptés au motif de la lutte contre le COVID-19.
Toutes les mesures doivent être motivées par la crise sanitaire et proportionnées aux risques encourus.
Oui, pour une loi d’urgence économique, sanitaire et sociale dans le cadre de COVID-19. Non à l’adoption du projet de loi en l’état (non à l’adoption d’un projet de loi flou et non détaillé habilitant le Président à prendre par ordonnance des mesures, pendant une durée de 3 mois). Dans son discours du 23 mars 2020, Macky Sall a affirmé « que la vitesse de progression de la maladie imposait de relever le niveau de la riposte, invoquant un sérieux risque de calamité publique ». Par conséquent, les mesures sanitaires, sociales et économiques envisagées doivent être déclinées.

La vigilance de tous les citoyens et des parlementaires de l’opposition est requise (pas de chèque en blanc).
Seybani SOUGOU – E-mail : sougouparis@yahoo.fr

 

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

20 - Mai - 2024

GUERRE ISRAËL-HAMAS : MANDATS D’ARRET CONTRE NETANYAHOU ET LE HAMAS POUR CRIMES DE GUERRE ET CRIMES CONTRE L’HUMANITE

La Cour pénale internationale (CPI) a déclaré lundi avoir émis un mandat d’arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou pour des...

20 - Mai - 2024

CE QUE L'ON SAIT DE LA MORT DU PRESIDENT IRANIEN EBRAHIM RAÏSSI, TUE DANS UN CRASH D'HELICOPTERE

La dépouille du président iranien, Ebrahim Raïssi, a été récupérée sur le site du crash de son hélicoptère dans le nord-ouest de...

17 - Mai - 2024

Ousmane Sonko, au conseil interministériel sur les inondations à Diamniadio : «Nous allons auditer les 717 milliards que l’État dit avoir investis dans la gestion»

Le Conseil interministériel sur la prévention et la gestion des inondations, en perspective de l’hivernage 2024, tenu hier, jeudi 16 mai, à la Sphère...

17 - Mai - 2024

Trafics criminels : Plus de 7 milliards en billets noirs saisis par la douane

Les opérations de ciblage et d’investigations sur les courants de trafics criminels ont été fructueuses. La Division de la communication et des relations publiques de la...

17 - Mai - 2024

SONKO SUR L’HOMOSEXUALITÉ : « LE SÉNÉGAL NE SE LAISSERA PAS IMPOSER CETTE PROPAGANDE PAR L’OCCIDENT…»

Les deux acteurs politiques notamment Ousmane Sonko président de Pastef et Jean Luc Mélenchon, tête de file des Insoumis, se sont livré à un exercice...