Covid-19, Tabaski, banalisation et le jour d’après (par Mary Teuw Niane)

25 - Juillet - 2020

Vendredi prochain la communauté musulmane célèbrera l’Aïd-el-Kebir communément appelée Tabaski. C’est un moment de retrouvailles pour les familles, de grands déplacements de populations entre les grandes villes, des grandes villes aux villages, de l’étranger dans le pays.

La promiscuité dans les transports en commun interurbains et dans les maisons familiales se conjuguera avec un brassage chaleureux de vieilles personnes, d’adultes et de jeunes venant d’endroits différents, souvent éloignés. C’est un événement propice à la dispersion à grande échelle sur l’ensemble du territoire national du virus.

Les régions comme Dakar, Thiès et Diourbel risquent de voir leurs porteurs asymptomatiques et même symptomatiques faire le déplacement et semer partout où ils passeront cette covid19. Au-delà de la sensibilisation, des supplications et des exhortations le seul moyen de prévenir une aggravation de la contamination est d’interdire à temps, au moins durant la période de la Tabaski, le déplacement inter-régional à moins de choisir, durant cette période, le confinement des régions de Dakar, Thiès et Diourbel avec le reste du pays. C’est un choix difficile, en raison de l’enthousiasme, de la passion, de l’affectivité et du bonheur qui enveloppent et s’épanchent de ces retrouvailles tant souhaitées et préparées.

C’est une décision, crève-cœur, que de priver une partie de la population d’une fête de Tabaski avec la grande famille, avec les parents souvent âgés, mais exposés aux risques liés à la covid19. Cependant, chaque sénégalaise et chaque sénégalais comprend que cette Tabaski est inédite, que la situation, créée par l’expansion continue de la covid19, demande une participation citoyenne et un engagement patriotique à faire reculer la maladie, à protéger les couches vulnérables et à respecter scrupuleusement les gestes barrières. Le choix de la raison est de passer la Tabaski à l’endroit où on vit, à rester surplace, à ne pas se déplacer.

La maladie progresse. Les chiffres égrenés chaque matin ont perdu de leur sens. Ils ne reflètent plus l’ampleur de l’évolution de la pandémie dans notre pays. La réduction surprenante, ces dernières semaines, du nombre de tests contrairement aux recommandations pressantes et répétées de l’OMS, à l’opposé de la pratique des différents pays qui ont bien géré cette pandémie, laisse pantois tout observateur un tant soit peu averti sur les questions épidémiologiques.

La politique consistant à ne tester que les cas symptomatiques « avérés », à traquer les contacts en extrahospitalier sans test, contribue involontairement à la banalisation de la maladie particulièrement au niveau de la jeunesse, à qui, on semble dire, ce n’est pas grave, rien ne vous arrivera de grave ! On oublie que ces jeunes qui ignorent leur statut, de plus en plus faussement décomplexés par rapport à la maladie, risquent d’en être des démultiplicateurs inconscients et surtout les facteurs de la contamination chez les vieilles personnes à protéger vaille que vaille.

Le choix justifié de laisser s’écouler la vie économique et sociale passe, pour être réussie, par un large dépistage de la population. À défaut, un dépistage systématique des cas contacts et au niveau des foyers d’expansion de la maladie. Tous les pays qui ont fini par perdre la main sur la maladie ont pêché sur l’application rigoureuse des mesures barrières, l’isolement des foyers actifs de la maladie et l’insuffisance de tests.

La situation commence, petit à petit, à déraper en Afrique. L’Afrique du Sud affiche 421 996 cas positifs pour 6 343 décès liés à la covid19. En un seul jour, ce pays a enregistré 13 944 nouveaux cas positifs et 250 nouveaux décès liés à la covid19. Des situations alarmantes apparaissent dans beaucoup de pays africains. Il est encore temps de se ressaisir.

La Tabaski, la banalisation de la maladie, l’insuffisante application des mesures barrières et l’insuffisance du nombre de tests constituent des risques importants à circonscrire. Il nous faut garder à l’esprit la nécessaire maîtrise de l’évolution de la covid19 le jour d’après…

Unis et engagés, nous vaincrons

Mary Teuw Niane
25 juillet 2020

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

26 - Avril - 2024

Saisine de la justice dans la malgouvernace des fonds covid-19 : L’Ofnac envoie le rapport chez le procureur

L ’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac) a procédé hier, jeudi 25 avril, à la publication de son rapport d’activité pour...

26 - Avril - 2024

Rapport OFNAC 2022 : Des maires de plusieurs communes épinglés, les dossiers transmis aux parquets

L’office national de lutte contre la fraude et la corruption (OFNAC) dans son rapport de 2022 a réservé une large part à la gestion de beaucoup de maires de communes. Ce...

26 - Avril - 2024

Ces gendarmes arrêtés et envoyés injustement en prison par le général Moussa Fall

Le départ du général Moussa Fall de la tête de la gendarmerie nationale suscite des réactions mitigées parmi les Sénégalais, certains...

26 - Avril - 2024

Koungheul : Un bus se renverse et fait 13 morts et plus de 40 blessés

Au total 13 personnes ont perdu la vie dans un accident de circulation à Koungheul (Kaffrine, centre) où un bus de transport en commun s’est renversé, a appris...

25 - Avril - 2024

Morts et blessés lors des manifs : Diomaye demande la mise en place d’une commission d’indemnisation

En Conseil des ministres ce mercredi 24 avril, le Président de la République s’est dit particulièrement soucieux du renforcement de la réconciliation nationale,...