Etre « Rebelle sénégalais » en Casamance sans être « Rebelle casamançais » : ça ne coûte pas cher et ça peut rapporter gros

30 - Septembre - 2020

Depuis le 26 décembre 1982, date de naissance officielle de la Rébellion casamançaise, les hommes politiques casamançais qui cherchent une place au soleil en Casamance comme au niveau national ont tous embouché, au gré des circonstances, le saxo de la Rébellion, tout en s’époumonant, déclaration après déclaration, la main sur le cœur, à faire croire qu’ils ne sont pas « Rebelles ».

Et parmi eux, les hommes politiques à sang froid tiennent la dragée haute : on les entend, toujours ; mais on ne les voit pas venir, ni arriver, jamais. Et quand ils frappent, ça fait mouche, toujours ; ou presque. En général, globalement, cela leur réussit plutôt bien.

Où l’on découvre, à l’extrême opposé, un certain Ousmane Sonko, homme politique à sang chaud : d’où qu’on se trouve, on entend le crépitement de son « automitrailleuse », toujours ; et il tire à vue, toujours, sans distinction aucune ni aucun discernement. A-t-il jamais atteint ses cibles ? Allez savoir.

« En Casamance si vous revendiquez, on vous traite de rebelle ou on vous envoie en prison… Pour une simple revendication, des honnêtes citoyens sont envoyés en prison ou pire traités de rebelle avant de subir des traitements inhumains… », dixit Ousmane Sonko lors de sa dernière tournée politique en date en Casamance.

Figurez-vous que le « Rebelle casamançais » que je suis, authentique qui plus est, a dû se faire violence pour l’écouter, d’abord ; et pour ensuite en retenir la substance quintessentielle, à savoir : le « pire (étant en l’occurrence d’être) traités de rebelle », malheur ! aux « Rebelles casamançais » authentiques, à qui il est ainsi réservé, soit de manière spécieuse, toute sorte de traitements inhumains ; pourvu simplement que ceux-ci leur soient servis dans la « mesure » même de leur rébellion.

Ainsi, la torture, le viol, les exécutions extrajudiciaires, entre autres, sont-ils en l’espèce la panacée. Entendu, au demeurant, que des proches de « Rebelles casamançais » authentiques peuvent payer de leur vie leurs attaches respectives d’avec ces derniers. Dieu sait que nombre de Casamançais ont péri du seul fait de leurs liens de parenté d’avec des « Rebelles casamançais » authentiques : qui un père ou un grand-père, qui une mère ou une grand-mère, qui un frère ou une sœur, qui un fils ou une fille, et j’en passe.

Ici, manifestement, pour Ousmane Sonko les « traitements inhumains » que peuvent subir les « Rebelles Casamançais » authentiques ne sont pas un problème en soi. Seul le fait d’être traité de rebelle indûment est à ses yeux un problème.

Or, la Cause que défend le Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance (MFDC) transcende toute la Casamance et tous les Casamançais, qu’ils soient nationalistes ou non, indépendantistes ou non, régionalistes ou non. Et elle est avant tout politique, cette Cause ; qui nécessite donc en tant que telle que nous fassions tous et chacun LA politique en Casamance, militants et combattants du MFDC bien compris.

Certes, la politique, en Casamance, se fait encore sans le MFDC, souvent contre lui. Mais le vide politique subséquent suffit-il pour que des individus prétendument plus Républicains et plus Patriotes que les autres n’aient de mépris que pour la Rébellion et les « Rebelles casamançais » authentiques et, par cela même, pour que les premiers conçoivent que les seconds doivent être traités de manière inhumaine, pour autant que ceux-ci se distinguent de la sorte comme moins humains que les autres Casamançais ?

Un candidat à l’élection présidentielle, dans une République, est par définition voire par essence un Républicain, cependant qu’il peut cesser de l’être par destination, donc après coup. Autrement dit, il peut être tout autre chose qu’un Républicain après coup. C’est toute « l’équation Ousmane Sonko ».

En effet, dans un Système, ici la République, lorsqu’on se déclare « hors Système » (peu importe que celui-ci soit bon ou mauvais ou simplement réputé tel) – et Ousmane Sonko en est l’illustration par excellence au Sénégal – on n’est déjà plus un Républicain. C’est-à-dire, exactement comme les militants et les combattants du MFDC, moi-même y compris.

C’est du reste la seule raison pour laquelle les Autorités nous dénient le droit d’exister et de nous accomplir en tant que parti politique légalement constitué, soit le Mouvement pour le Fédéralisme et la Démocratie Constitutionnelle (MFDC-fédéraliste), devenu le Parti Social-Fédéraliste (PSF).

N’est-il pas vrai qu’en France, les Nationalistes corses, Indépendantistes et Autonomistes réunis, administrent la Corse ?

C’est bien là, en tout cas, une formidable démonstration de ce que la démocratie, quand elle est achevée ou pleinement accomplie, peut offrir à la République une bonne raison de s’accommoder, en son sein, d’avec ses « Républicains » et ses « non-Républicains », tout à la fois.

Qu’à cela ne tienne, nos frères et sœurs du MFDC ainsi que votre serviteur et ses ami(e)s peuvent (re)devenir des Républicains, pour peu toutefois que la République le veuille et l’autorise.

D’ailleurs, tous s’y évertuent, avec notamment leur volonté bien affichée et déterminée d’œuvrer à l’avènement d’une « paix des braves, sans vainqueurs ni vaincus » en Casamance, tel que le Président Macky Sall l’a appelé de ses vœux le 17 mars 2014.

C’est que personne n’a gagné la guerre en Casamance et que jamais personne ne la gagnera. En vérité, nous pouvons tous gagner la paix en Casamance. Mieux ! nous le devons.

En l’occurrence, c’est le véritable enjeu du moment, le seul qui vaille en Casamance.

Alors, certainement, d’aucuns pourront bien imaginer notre perplexité et notre agacement face au comportement ou attitude d’hommes politiques tendant à annihiler le travail de tant d’années que mes ami(e)s et moi avons abattu et continuons d’abattre, souvent de manière souterraine, dans l’ombre et le silence, au péril de nos vies, en vue de la paix définitive sinon durable en Casamance.

Dakar, le 30 septembre 2020.

Jean-Marie François BIAGUI
Président du Parti Social-Fédéraliste (PSF)
Ancien Secrétaire Général du MFDC

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