GREENPEACE AFRIQUE : "L’EUROPE VEUT LE POISSON DU SENEGAL MAIS REJETTE SES MIGRANTS"

18 - Novembre - 2020

"On dénombre près de 500 morts et des milliers de rescapés en haute mer parmi les jeunes sénégalais qui, au péril de leur vie, tentent de rejoindre l’Europe ces derniers mois. Une tragédie humaine qui a mobilisé l’attention des médias du monde. Alors que le secteur de la pêche traverse une crise sans précédent, les autorités du Sénégal viennent de renouveler leur accord de pêche avec l’Union Européenne (UE).
Quel paradoxe ! Au même moment où l’UE entame le rapatriement des migrants sénégalais, elle continue d’exploiter les ressources halieutiques du pays dont la rareté est en partie la cause du désespoir des milliers de jeunes sénégalais.
Greenpeace Afrique demande aux autorités de l’UE et du Sénégal de se pencher sur les vraies causes de ce phénomène afin d’y apporter une solution définitive plutôt que de laisser empirer la situation en signant cet accord.
Selon le communiqué de la délégation de l’Union Européenne à Dakar, ce nouvel accord de pêche permettra à 45 navires européens de pêcher au moins 10 000 tonnes de thon et 1 750 tonnes de merlu noir par an pour une contrepartie financière de 15 millions d’euros (10 milliards FCFA) sur cinq ans.
Il est aujourd’hui évident que la mauvaise gestion des ressources halieutiques au Sénégal, les accords signés et les licences de pêche octroyées à des navires étrangers sont en grande partie à l'origine de la rareté de ces ressources. Le Sénégal et l’UE avaient noué depuis 2014 un accord de pêche sur les pêcheries de thon et de merlus incluant des captures accessoires, lequel accord a été décrié par les organisations professionnelles de la pêche du Sénégal, car ne tenant pas en compte ni du potentiel exploitable, ni de l’état d’exploitation des ressources.
L’évaluation de cet accord, tant au plan technique (quantité de poissons prélevée par les bateaux de l’UE) qu’au plan financier, n’a jamais été partagée avec les organisations professionnelles. Ce qui est contraire aux dispositions réglementaires et autres engagements des Etats qui font de l’implication des acteurs dans les processus décisionnels un élément important de bonne gouvernance des ressources. Les Objectifs de Développement Durable, le Code de la Pêche et la Constitution du Sénégal sont, entre autres, clairs sur la nécessité d’intégrer les acteurs de la pêche dans la prise de décision. Mais la réalité est tout autre.
Greenpeace Afrique demande à l’Etat du Sénégal et à l’Union Européenne de faire une évaluation exhaustive et transparente de l’accord précédent, de procéder à une mise à jour des données scientifiques sur les stocks de poissons et de partager ces informations avec les acteurs de la pêche pour une prise de décision conformément aux engagements pris.
Le principe directeur de la signature d’un accord de pêche devrait être basé au moins sur deux points que sont l’état des ressources halieutiques concernées par l’accord et la capacité de la flotte nationale à exploiter ces ressources. Un accord de pêche doit être signé sur la base du surplus de production qui correspond au potentiel halieutique d’un stock que la flottille nationale n’est pas en mesure de pêcher.
Un accord de pêche ne peut pas être qualifié de durable en l’absence de surplus de production. L’UE devrait s’assurer que le gouvernement du Sénégal a bien effectué l’évaluation des stocks concernés par cet accord de pêche et qu’il y a effectivement un surplus de production dont la flotte sénégalaise n’est pas en mesure d’exploiter. Et au-delà de ces aspects techniques, la dimension économique et sociale devrait être prise en compte d’autant plus que le secteur de la pêche traverse une crise sans précédent. C’est seulement dans ces conditions que la transparence et la protection des ressources clamées par les autorités de l’UE et du Sénégal seraient une réalité.
Greenpeace Afrique invite l’Etat du Sénégal à geler cet accord de pêche, à faire une évaluation transparente de l’accord précédent, à partager les informations avec les acteurs et à tenir compte de la situation des stocks, de la surcapacité de la flotte nationale et du désespoir des pêcheurs avant de prendre une décision. La logique de marché qui motive l’Union Européenne et les mauvaises décisions des autorités sénégalaises seront lourdes de conséquences non seulement pour les Sénégalais mais aussi pour les Européens, car leurs destins sont étroitement liés"
Greenpeace Afrique

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

16 - Août - 2024

Violences politiques : Des collectifs de victimes demandent l’abrogation de la loi d’amnistie

Des représentants de collectifs de victimes des violences politiques survenues au Sénégal entre février 2021 et février 2024, ont plaidé mercredi à...

14 - Août - 2024

Contrôle du domaine public maritime : Bassirou Diomaye Faye a reçu la commission ad hoc, le rapport révèle des « irrégularités préoccupantes »

Ce mardi, le président Bassirou Diomaye Faye et le Premier ministre Ousmane Sonko (de retour de son voyage du Mali) ont reçu le rapport de la commission ad hoc chargée de...

14 - Août - 2024

Accaparement du domaine public maritime: Le rapport remie à Diomaye signale de nombreuses irrégularités

Un mois après celui sur le site de Mbour 4, livré le samedi 13 juillet dernier, le président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye a reçu hier, mardi...

14 - Août - 2024

Amadou Ba demande aux entreprises de presse de s'acquitter des impôts

L’ancien Premier ministre Amadou Ba s’est prononcé sur la « Journée sans presse » organisée ce mardi 13 août par le Conseil des Diffuseurs et...

14 - Août - 2024

Des médicaments d’une contrevaleur de 170 millions CFA saisis par la Douane

Après une longue traque sans répit contre les trafiquants de cocaïne et narcotrafiquants, la Douane sénégalaise s’est encore distinguée dans la lutte...