« Introspection sur Mars 2021 au nom de la Justice » Par Mafama GUEYE

08 - Mars - 2022

Un an après le drame de l’affaire « Sweet beauty » qui n’est rien d’autre que l’huile sur le feu du « désordre établi » qui s’était installé dans le pays, l’opinion publique reste encore non-éclairée. Le mis en cause est élu maire de Ziguinchor, la prétendue victime Adji Sarr, qui dit n’avoir plus la possibilité de se déplacer, de vaquer à ses occupations, qui vit constamment dans la panique se fait interviewer par des organes de la presse étrangère et réclame qu’il ait un procès au plus bref délai. Qui a alors intérêt à ce qu’il n’y ait pas de procès ? Pourquoi la justice tarde à vider ce dossier ? Est-il vrai qu’il s’agit d’un véritable complot qui a foiré et qu’on chercherait à protéger des proches du régime ? S’agissait-il d’un vil plan de liquidation [P1] [GM2] [GM3] d’un redoutable adversaire politique ? Ou s’agit-il véritablement d’un viol, auquel cas la justice devrait effectuer son travail sans faiblesse ? Quoi qu’il en soit les deux parties veulent coûte que coûte qu’il ait un procès. Cette affaire ne doit pas trainer dans les tiroirs de la justice comme tous les autres dossiers d’ailleurs de longue détention préventive. Le temps de la justice peut être long, mais l’impatience du tribunal de la conscience est intenable.

C’est pour cela que les deux parties, ainsi que tout le peuple sénégalais qui garde dans un coin sombre de sa mémoire le souvenir amer des évènements de Mars 2021, tiennent à ce que la vérité éclate, qu’elle soit dite par et pour la justice.

Nos consciences sont impliquées directement, notre responsabilité aussi, car chacun de nous d’une manière ou d’une autre avait pris position soit dans la neutralité, soit dans l’une des parties. Si d’aucuns estimaient que cette affaire de viol n’était qu’une énième forfaiture contre la démocratie sénégalaise et qu’il fallait à tout prix s’y opposer, d’autres soutenaient qu’on devrait laisser l’arbitrage entre les mains de la justice et ne pas s’en mêler. Dans la confrontation de ces convictions qui au moment[P4] ne reposaient sur la base d’aucune preuve tangible, les autorités qui ont fait recours à la force et à la répression, ont en même temps commis l’erreur de donner à la jeunesse qui ne se sent pas prise en compte dans la politique du régime l’occasion de cracher sa colère à travers des manifestations qui ont vite dégénéré, il faut le dire à cause des discours guerriers entre les différentes parties qui se renvoyaient la balle sans être sur le terrain.
Le ministre de l’intérieur, perdu entre le maintien de l’ordre pour incarner l’autorité de l’Etat et le soldat venu faire passer le message du « vis-à-vis » du mis en cause a communiqué malheureusement pour donner le coup de sifflet de l’affrontement. Entre la force et la ruse, le dosage était raté. De l’autre côté aussi, on brandit le droit à la résistance. C’était de bonne guerre. D’un coté on dispose les appareils régaliens de maintien de l’ordre, de l’autre côté on détient une partie de la jeunesse dévouée qui voit en Sonko l’agneau du sacrifice à défendre, l’espoir de la nation à entretenir.
Pendant cette guerre de communication, on apprit à travers les bruits de couloir, que les guides religieux raisonnaient le chef de l’Etat pour lui recommander d’intervenir afin d’arrêter les germes du chaos. Cela n’aura pas empêché l’effritement de la situation. Au moment de déférer à la convocation du juge, le jeu de la provocation n’a pas manqué à attiser la tension. Sonko est capturé, et la rébellion a commencé à Dakar et dans plusieurs autres villes du Sénégal.
Aujourd’hui un an après, le bon sens voudrait qu’on se pose tous certaines questions avec objectivité et sans parti pris. Se demander le pourquoi d’une telle irresponsabilité, d’une telle dégénérescence morale de nos dirigeants et de ceux qui aspirent à gouverner ce pays. Il aurait suffi qu’il ait un peu de grandeur d’esprit de la part des différentes parties pour qu’on évite toutes ces pertes humaines à cause d’une affaire qui jusque-là nous parait banale avec tout ce qu’elle comporte comme contre-sens. Il est difficile de faire preuve de clairvoyance dans le jugement dans une période de chamboulement et de tension. Les manipulations et les prises de positions teintées de passion et de subjectivité ont embarqué une bonne partie de la société dans une révolution qui n’en était pas une et des jeunes qui n’ont rien demandé en sont morts laissant leurs familles endeuillées et démunies.

Des jeunes de la banlieue, et de l’intérieur du pays qui sont toujours prêts à s’engager dans tous les combats auxquels ils espèrent une issue favorable pour leur condition ont été pris au piège et aujourd’hui il est un devoir de leur dire qu’ils n’ont pas à se dresser en bouclier pour protéger personne et que leur destin ne repose que sur eux-mêmes. Les batailles politiques entre leadeurs politiques ou partis politiques[P5] doivent cesser de se régler leurs comptes en se servant des jeunes désorientés et désespérés qui s’agrippent à des désillusions idéologiques pour nouer leur chagrin existentiel dû à une conjoncture socio-économique délabrée.
Les véritables et principales victimes aujourd’hui, ce n’est ni la plaignante, ni le mis en cause, mais les nombreux jeunes tués et leurs familles qui ont perdu certainement des graines d’espoir, des soutiens de famille. Tous ces crimes ne doivent pas rester impunis.
Notre sens du juste doit impérativement nous pousser à revendiquer la justice pour ces jeunes morts sur un champ de bataille immonde. Le juste n’est pas une opérabilité cognitive, c’est un sens à cultiver, un sens qui nous interpelle tous intimement car il est ce qui ne se laisse discerner que dans l’effectivité des actes et des êtres, selon ce qui apparait. Toutefois, on peut décider à travers ce juste qui s’est imposé. Et ce qui s’impose justement dans notre conscience, c’est l’édification de ce problème afin que les vrais coupables du début à la fin soient soumis à la justice. Nos autorités judiciaires doivent à travers ce dossier redresser nos institutions, en accomplissant l’entièreté du processus éthique. Ce sens du juste est inséparable d’un certain genre de vie, d’une cohérence éthique. Cette cohérence éthique il faut la voir en vue d’autres vertus qui lui sont associées de façon connexe : la sagesse et le courage. La mise en œuvre de la mission de la justice demande du courage. Le juste qui est le sens de la mesure ne peut pas aller sans la sagesse, sans la tempérance.
La dignité des personnes tuées et le respect qu’on a à leur égard, la compassion qu’on éprouve envers leurs familles ne pourront advenir justes que si nos institutions judiciaires auront fait l’effort de rendre justice à la justice. C’est un devoir moral de faire preuve d’humanité; et faire preuve d’humanité dans ce cas, c’est se rendre juste en rétablissant la justice à propos de cette affaire. La justice se doit d’être dans la sollicitude sans être compatissant, ni complaisant pour l’éclatement de la vérité. L’humanisme comme intelligence de la vulnérabilité est une intelligence de la résilience. Notre Nation tout entière a besoin judiciairement, de se réhabiliter, de dépasser cette histoire et cela passe par la dignité qu’on doit rendre aux victimes de Mars 2021.

Notre responsabilité est de reconnaitre qu’une erreur à réparer a été commise et cela revient à admettre la faillibilité de notre condition humaine et avoir conscience que nous avons des ressources pour sortir de la situation chaotique dans laquelle nous avons été. Se rendre juste et agir pour la justice c’est une anticipation de la possibilité de changer. S’occuper de ce dossier afin de passer l’éponge consciencieusement sur un épisode douloureux de notre histoire socio-politique, c’est jouer une autre carte. C’est savoir qu’il y’a des moments de faillite et de relèvement. Si la justice ne doit jamais prendre parti, elle doit tout de même toujours prendre parti du plus humain. Condamner l’acte ignoble qui a conduit à la mort de plusieurs jeunes, c’est faire preuve de clémence et symboliquement montrer que ce qui est condamné, c’est l’acte et pas les personnes. Prendre parti du coté de l’humain, c’est veiller au respect de la dignité de la personne humaine.
Cette épine dans la conscience de chaque sénégalais qui a vécu les évènements de Mars 2021 doit être enlevée par et pour la justice.

Forte mémoire aux victimes de Mars 2021 !
Mafama GUEYE

Commentaires
4 commentaires
Auteur : Posté le : 09/03/2022 à 11h25

A mon avis ils ont juste pas envie que ce voyou de Sonko organise une autre manifestation ou des innocent vont y perdre leurs vies. Avec cet homme il y a un danger constant, on en a marre qu'il destabilise la societe des qu'il est pas content de ces actions.

Auteur : Posté le : 09/03/2022 à 11h21

Comment est-il encore en liberte apres une affaire pareille? Honte a lui

Auteur : Posté le : 09/03/2022 à 11h18

J'espere vraiment que Sonko va pas s'en sortir encore une fois. Il est temps qu'il affronte la justice.

Auteur : Posté le : 09/03/2022 à 11h16

La justice devrait effectuer son travail sans faiblesse a mon avis. Sonko est coupable.

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