L’immigration clandestine au Sénégal et cette juxtaposition de responsabilités

28 - Octobre - 2020

Le drame est là. Des pans entiers de la société sont touchés au plus profond de leur chair. Nous sommes nombreux de pouvoir en parler parce qu’un ami, un voisin, un parent, un proche d’un collègue, un promotionnaire est victime de cette tragique réalité qui met à nu la carence de nos dirigeants et l’échec de leur politique d’emplois pour ne pas dire de développement depuis des décennies. Il s’agit de leurs responsabilités d’abord sur tous les aspects de ce phénomène qui reprend encore de l’ampleur depuis quelques semaines. Cette question de responsabilité des autorités est tellement évidente qu’elle devait tout simplement laisser la place à des débats sur l’efficacité des mesures prises jusque-là pour donner le maximum d’emplois aux jeunes et l’accompagnement des initiatives personnelles. Malheureusement comme tout dans ce pays se regarde sous l’aune de la politique, sur la tristesse et la désolation de nombreuses familles on se justifie et veut nous faire croire que ces jeunes ont toutes les raisons de rester et de réussir au pays. Pas besoin de perdre son temps sur ce débat, c’est connu de tous. L’argument des autorités politiques est un gros mensonge.
Seulement la société de façon générale est fautive dans cette affaire. Nous avons eu écho voire même connu des parents surtout des mamans qui ont vendu leur terrain, leurs bijoux de valeur, prendre l’argent de la tontine pour permettre à leurs enfants de voyager de façon irrégulière par la mer ou par les airs. Ce n’est pas pour rien que des histoires de trafic de visas alimentent les pages des faits divers de nos journaux tous les jours. Nous sommes formatés ainsi : nous devons réussir à tout prix. « Dama beug tekki téral sama yaye » (je veux réussir pour honorer ma mère), « khalis bou baré wala bamel bou sori » (beaucoup d’argent ou une tombe lointaine). La première phrase qui revient souvent dans le discours des jeunes lutteurs en dit long sur ce que représente la réussite dans la société sénégalaise. C’est très noble et normal mais l’encadrement et l’éducation au sein de la société devraient nous faire comprendre que toute chose a des limites et que souvent nous ne devons pas engager notre vie pour des choses bassement matériels. Mais hélas nous vivons l’ère de l’accaparement, de l’absence totale de solidarité. Si l’échec patent des politiques ne permet pas de nourrir aucun espoir, il n’est pas étonnant que des jeunes mettent leur vie en péril pour s’en sortir.
L’immigration a été une source de réussite pour plusieurs générations de sénégalais. Des gens devenus célèbres, de grands commerçants, des hommes d’affaires qui ont fait juste l’Afrique avec des pays comme le Gabon ou la RDC. A un autre niveau des jeunes partaient en Europe pour des années après rentrer pour construire de belles maisons, prendre des femmes, conduire de belles bagnoles.
Aujourd’hui les réalités sont différentes. La crise économique n’épargne aucun pays. Mais l’espoir est toujours permis ailleurs. Ailleurs, c’est là-bas où nos dirigeants partent pour se soigner ou discuter de notre avenir. Ailleurs, c’est là-bas où nous partons pour étudier espérant être dans l’élite de demain. Ailleurs, c’est là-bas où partent nos professeurs d’Université pour gagner aisément leur vie à la dimension de leur niveau de compétence. Ailleurs, c’est là-bas où rêvent d’aller tout jeune footballeur d’un centre national de formation pour devenir demain un Sadio MANE. Ailleurs, c’est tout simplement là-bas où l’on peut s’en sortir à la sueur de son front. Alors là-bas on n’a pas le droit, on ne peut pas d’ailleurs empêcher ces jeunes qui veulent réussir d’y faire un tour.
Hier on avait pris de force leurs grands parents pour les amener à se battre là-bas. Les « tirs-AILLEURS ». Aujourd’hui, les petits-fils vont de force aller là pour vivre leur espoir. Comme quoi les dirigeants de là-bas et ceux d’ici ont quelque chose à faire ensemble pour endiguer ce phénomène. Toutefois, il s’agit une fois encore de la responsabilité de nos dirigeants. Ce n’est pas pour rien que certains reposent sur la table l’audit des milliards donnés par des pays européens et autres bailleurs pour maintenir les jeunes au Sénégal.
En attendant de vraies mesures des autorités pour faire face à ce phénomène et donner de l’espoir aux jeunes. Il appartient à la presse d’exposer à la face de l’opinion et du monde ce drame qui se joue sur nos côtes. Point de distraction et de manipulation, il y a trop de morts !

Ndiaga DIOUF
Journaliste

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

21 - Février - 2023

Après sa sortie par rapport aux échauffourées de Touba Mbacké : Des marabouts et des habitants de Touba désavouent Serigne Bass Abdou Khadre

La sortie de Serigne Bassirou Abdoul Khadre, porte porte-parole du khalife général des mourides, à l'occasion de la cérémonie officielle du Magal de « Kazu...

21 - Février - 2023

MALI : TROIS MILITAIRES SENEGALAIS TUES AU MALI, CINQ AUTRES BLESSES (DIRPA)

Trois Casques bleus sénégalais de la mission de l'Onu au Mali ont été tués et cinq autres blessés mardi 21 février par l'explosion d'une bombe...

20 - Février - 2023

Burkina Faso. L'ancien président Thomas Sankara sera inhumé le 23 février sur le lieu de son assassinat

Les corps de l’ancien président burkinabé Thomas Sankara et de ses douze compagnons assassinés le 15 octobre 1987 lors d’un putsch, seront inhumés «en...

17 - Février - 2023

Gabrielle Kane alerte sur la santé mentale de Adji Sarr : « elle pourrait craquer le jour du procès »

La féministe Gabrielle Kane alerte sur la santé mentale de la masseuse qui accuse de viol le leader du Pastef de viol, Adji Sarr. Selon elle, Adji qui n’a pas une prise en...

16 - Février - 2023

Un policier traîne Ousmane Sonko en justice

Après Adji Sarr, pour viol et menaces de mort, Mame Mbaye Niang, pour diffamation, injures publiques et faux et usage de faux. Et de trois ! Un policier nommé Frédéric...