LA LOI HABILITANT MACKY SALL A LEGIFERER PAR ORDONNANCES ET « PROROGEANT L’ETAT D’URGENCE » EST INCONSTITUTIONNELLE(SEYBANI SOUGOU)

02 - Avril - 2020

Une loi d’habilitation et une loi de prorogation de l’état d’urgence sont de 2 lois de nature juridique différente, qui doivent faire l’objet de 2 passages distincts, à l’assemblée nationale.
Pour faire face à l’épidémie de Covid-19, 2 textes ont été pris par Macky Sall :
1. Le décret n°2020-830 du 23 mars 2020 proclamant l’état d’urgence sur tout le territoire national, pour une durée de 12 jours,

2. Le projet de loi du 26 mars 2020 assorti du décret de présentation n°2020-878, habilitant le Président à légiférer par ordonnances.
L’état d’urgence est régi par l’article 69 de la Constitution et par la loi n° 69-29 du 29 avril 1969 relative à l’état d’urgence et à l’état de siège (le décret n°2020-830 du 23 mars 2020 a visé les articles pertinents pour l’instauration de l’état d’urgence). En revanche, la loi d’habilitation relève des dispositions prévues à l’article 77 de la Constitution. La prorogation de l’état d’urgence institué par un décret ne peut en aucun cas, faire l’objet d’articles insérés dans un projet de loi d’habilitation, dont la seule finalité est d’habiliter à légiférer par ordonnances.
Il s’agit de 2 textes, de nature juridique différente, qui nécessitent 2 passages à l’assemblée nationale (2 autorisations distinctes doivent être données, la première pour habiliter à légiférer par ordonnances et la seconde pour autoriser la prorogation de l’état d’urgence). La preuve de la forfaiture (et de nombreux sénégalais n’y ont pas prêté attention), c’est que l’intitulé du projet de loi d’habilitation a été modifié par amendement, en catimini à l’assemblée. Alors que l’intitulé initial était « Projet de loi habilitant le Président de la République à prendre par ordonnances, des mesures relevant du domaine de la loi pour faire face à la pandémie de Covid-19… », ils ont glissé (dans l’intitulé) la disposition suivante « et prorogeant l’état d’urgence », soit-disant, pour assurer une cohérence avec le corps du texte. En réalité, l’objet de cet « amendement » de dernière minute est surtout de donner une apparence de légalité à ce projet de loi hybride. Les sénégalais avertis auront d’ailleurs remarqué que l’article 4 du projet de loi d’habilitation n°2020-878 ne vise aucun texte relatif à l’état d’urgence, notamment le décret n°2020-830 du 23 mars 2020 qui institue l’état d’urgence (une hérésie, car lorsque vous prorogez par une loi, l’état d’urgence, vous devez viser la Constitution et le texte qui l’a institué). Le seul texte auquel le projet de loi fait référence est l’article 77 qui traite de l’habilitation.
Depuis son indépendance de 1960 à nos jours, aucun régime, au Sénégal n’a initié une loi d’habilitation comportant des dispositions prorogeant l’état d’urgence (même lorsque l’état d’urgence a été décrété 2 fois, en 1968 et en 1988). Jamais. Je mets au défi le régime en place de prouver le contraire, en publiant une seule loi d’habilitation y afférant (ce texte qui n’existe pas). En regroupant dans un projet de loi, l’habilitation à légiférer par ordonnances et la prorogation de l’état d’urgence, Macky Sall a incité les députés, à violer de manière flagrante la Constitution. Plus grave, en votant le projet de loi qui leur a été soumis, les députés réunis en séance plénière, qui ont participé à cette forfaiture juridique ont trahi la Nation sénégalaise.
Il faut le marteler : la loi habilitant Macky Sall à légiférer par ordonnances et « prorogeant l’état d’urgence » votée par des députés godillots le 01 avril est inconstitutionnelle, car elle regroupe dans une même loi des dispositions qui doivent faire l’objet de 2 autorisations distinctes.
Il ne faut point en douter : nous avons affaire à un régime d’amateurs et à une bande d’incompétents.
Seybani SOUGOU – E-mail : sougouparis@yahoo.fr

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

04 - Janvier - 2024

Affaire du marché de 71 milliards de FCFA entre le ministère de la santé et ACD : la Cour suprême déboute l’association de sociétés spécialisées dans l’équipement médical

Des sociétés spécialisées dans l’équipement médical réunies autour d’une association qui s’opposaient à...

04 - Janvier - 2024

Pénurie de riz à Kaolack : Le kg se vend à 500 F CFA, la section locale de l’Ascosen tire la sonnette d’alarme

Dans la région de Kaolack, l’Association des Consommateurs du Sénégal (ASCOSEN) a affirmé son inquiétude face à la persistance de la pénurie...

04 - Janvier - 2024

Ziguinchor: Une décision inexplicable du préfet prive les jeunes de fêter le 31 décembre

Les jeunes de Ziguinchor, contrairement à leurs camarades des autres régions, n'ont pas fêté le 31 décembre comme ils le voulaient. Le concert qui leur est...

03 - Janvier - 2024

Keur Yeurmandé : Le vigile de Ndella Madior Diouf avait vendu le bébé à 65 000 F CFA

Poursuivis pour enlèvement, complicité dudit chef et recel de bébé, le vigile de Ndella Madior Diouf, Jean Noël Ndour, et la dame Woury Dia risquent gros. Ce trio...

03 - Janvier - 2024

Recours portant annulation du décret de nomination des membres de la CENA : l’opposition rétropédale

Fixée pour ce mercredi 3 janvier, l’audience devant la chambre administrative de la Cours Suprême portant sur le recours en annulation du décret de nomination des membres...