La prochaine citation à comparaitre du Juge TELIKO, devant le Conseil Supérieur de la Magistrature est un affront intolérable à la justice

01 - Octobre - 2020

Lors du procès en Appel de Khalifa Sall en 2018, le 1er réquisitoire du procureur général près la Cour d'appel de Dakar, Lansana Diaby, était accablant pour l’état du Sénégal « Dans un monde où nous avons accepté de vivre dans des communautés et avons signé des traités, si nous ne respectons pas ces traités signés, nous allons inéluctablement vers un chaos communautaire. Nos juridictions n'ont pas respecté le règlement 5 de l'UEMOA qui exige la présence d'un avocat auprès de son client dès l'interpellation. Il faut respecter la décision de la Cour de justice de la CEDEAO. Cette décision s'impose à l'État. C'est l'État qui a violé le traité. Et c'est le citoyen qui a été lésé par une situation… ». Voilà qui a le mérite d’être clair. Le procureur Près la Cour d’appel de Dakar a enfoncé le clou, citant expressément la jurisprudence Mamadou Tandia, (ex-Président du Niger qui avait été libéré par la Cour d'appel de Niamey après que la Cour de justice de la CEDEAO ait jugé arbitraire sa détention). Il n’y a aucune équivalence possible, entre la charge extrêmement lourde du Procureur général Lansana Diaby lors du procès en appel de Khalifa Sall, sur les dysfonctionnements graves de la justice sénégalaise et les propos pondérés du Juge Souleymane TELIKO, tenus après que l’affaire ait été définitivement tranchée par la justice (autorité de la chose jugée).
Le Président de l’UMS s’est contenté simplement de souligner que dans l’affaire Khalifa Sall, la présomption d’innocence et les droits de la défense ont été violés par la justice sénégalaise, se référant à la décision de la cour de justice de la CEDEAO du 29 juin 2018. Tous les professionnels du droit, savent que de tels propos ne peuvent en aucun cas relever d’une procédure disciplinaire, une procédure idiote, scandaleuse, abusive et totalement disproportionnée qui, de toute façon ne saurait prospérer. Aucun manquement aux devoirs de son état, à l'honneur, à la délicatesse ou à la dignité ne peut être reproché au Juge TELIKO. Dans l’affaire Khalifa Sall, l’impartialité du Président de l’UMS, Souleymane TELIKO est attestée par une pièce à conviction irréfutable qui le disculpera devant la formation disciplinaire du CSM (Conseil Supérieur de la magistrature) : le communiqué de l’UMS du 29 octobre 2017. En effet, moins de 2 mois après son élection en aout 2017, à la tête de l’Union des magistrats du Sénégal, et après avoir été interpellé publiquement par Barthélémy DIAS sur la détention illégale et arbitraire de Khalifa SALL, l’UMS a publié un communiqué, sans équivoque, le 29 octobre 2017, précisant « qu’elle elle ne saurait, sous peine de trahir sa mission et les principes qui régissent l’indépendance de la justice, s’immiscer dans le traitement d’une affaire en se prononçant sur la légalité ou l’illégalité d’une procédure pendante devant les tribunaux ». Le 1er acte fort posé par le Président de l’UMS a été de préciser que l’UMS n’interférait pas dans les affaires pendantes devant la justice, tout en précisant « qu’à l’instar de tous les justiciables, Khalifa Sall a droit au respect des normes qui garantissent la conduite d’une procédure juste et équitable ».Un communiqué sans parti pris.

Le communiqué ridicule du Ministre de la justice annonçant la saisine de la formation disciplinaire du CSM participe d’une tentative de manipulation de l’opinion visant à frapper les esprits et à faire croire qu’une saisine du CSM entraînera inéluctablement une sanction du juge TELIKO. C’est totalement faux et faire preuve d’une grande naïveté quant au fonctionnement du CSM en formation disciplinaire. En France, 3 hauts magistrats, membres de la chambre sociale de la Cour de cassation, étaient cités à comparaitre devant la formation disciplinaire du conseil supérieur de la magistrature, dans le cadre d’une procédure disciplinaire après une plainte déposée par des syndicats de salariés les accusant de « partialité ». Dans sa décision rendue le 19 décembre 2019, le CSM a considéré que les 3 hauts magistrats de la cour de cassation n’avaient commis aucune faute disciplinaire.

Le rapport d’enquête de l’IGAJ est une base et sera étudié à la lumière des éléments apportés factuels par le juge Souleymane TELIKO, devant le CSM, statuant en formation disciplinaire. Outre le ridicule qui atteint le Ministre de la justice, Malick Sall et dont il ne semble pas avoir conscience, c’est sa volonté délibérée de s’en prendre à l’institution judiciaire et à un de ses représentants (Président de l’UMS), qui choque profondément et constitue un affront intolérable à la justice.

Dans l’affaire du juge TELIKO, le conseil supérieur de la magistrature, en formation disciplinaire, statuera dans un délai de 2 mois à compter de sa saisine, et ce, hors la présence du Président de la République et du ministre de la Justice qui n’ont pas le droit de siéger (cf article 10 de la Loi organique n° 2017-11 du 17 janvier 2017 portant organisation et fonctionnement du Conseil supérieur de la Magistrature). En effet, seuls les magistrats (le premier président de la Cour, le procureur général près ladite cour, les premiers présidents des cours d’appel et les procureurs généraux prés lesdites cours ainsi que les membres élus) sont appelés à statuer sur le rapport d’enquête de l’IGAJ, transmis par le Ministre de la justice.

Il appartient donc aux magistrats statuant sur ce dossier de mettre fin au cirque du régime (ministre de la justice dont le zèle est proportionnel est à son incompétence).

L’affaire du Juge Souleymane TELIKO (un dossier totalement vide fondé sur de supposés manquements, inventés de toutes pièces) est un test majeur pour la justice sénégalaise qui doit s’affranchir du pouvoir exécutif, affirmer son pouvoir consacré par la Constitution (article 88 de la Constitution) et redorer son blason sérieusement terni (une justice soupçonnée d’être à la botte du pouvoir exécutif). Si les magistrats du CSM plient face à ce régime liberticide, alors ce dernier poussera son avantage jusque dans ses moindres retranchements (les droits des magistrats seront réduits à leur plus simple expression).
L’affaire Souleymane TELIKO dépasse sa simple personne. Le Président de l’UMS s’est investi, avec tous les risques, pour restaurer la crédibilité du magistrat et changer l’image d’une Justice dont l’image est écornée auprès des justiciables (crise de confiance). Les magistrats sénégalais doivent se constituer en bouclier, faire bloc autour du Président de l’UMS, et éviter de tomber dans le piège du régime qui joue la carte de la division (anciens magistrats contre jeunes magistrats) pour saborder l’UMS et affaiblir la justice.
Si le juge Souleymane TELIKO tombe pour des motifs fallacieux, nous tombons tous. Ce serait alors l’effondrement de la justice et la voie ouverte à tous les abus.
Il est hors de question.
Seybani SOUGOU – E-mail : sougouparis@yahoo.fr

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