Lamine Diack va-t-il rentrer au Sénégal avant la fin du ramadan ?
Un club de football local s’est engagé à verser la caution de 500 000 euros nécessaire au retour de l’ancien patron de l’athlétisme mondial. Condamné en première instance à quatre ans de prison, Lamine Diack reste sous le coup d’une deuxième procédure devant la justice française.
Où Lamine Diack dégustera-t-il son lakh traditionnel (bouillie de mil) pour célébrer la fin du ramadan ? Chez son fils Seydou, en banlieue parisienne, ou au Sénégal, auprès de ses petits-enfants ? L’ancien président de la Fédération internationale d’athlétisme, qui a passé cinq ans et demi sous le coup d’un contrôle judiciaire assorti d’une interdiction de quitter le territoire français, pourrait bien être de retour au Sénégal pour la Korité, la fête musulmane qui marque la fin du ramadan.
Promesse en a été faite par les dirigeants du Jaraaf, club de football dakarois. Réunis en assemblée générale extraordinaire le 17 avril, ils ont décidé de permettre au club de libérer une partie de son patrimoine pour régler la caution de Lamine Diack, fixée par la justice à 500 000 euros (328 millions de FCFA). « L’idée était dans les tuyaux depuis un certain temps, explique son secrétaire général, Léonard Diagne. Mais nous avons décidé de convoquer notre assemblée pour faire les choses dans les formes, et que la décision puisse être approuvée par l’ensemble du club. »
Le mal du pays
Depuis qu’il avait été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire avec interdiction de quitter la France, en novembre 2015, l’ancien athlète de 87 ans ne faisait pas mystère de son désir de rentrer dans son pays. Au cours de son procès, il avait été présenté par ses avocats comme un « vieillard » voulant « revoir son pays natal » et « avoir le droit de mourir dignement ». Jugé en juin 2020 devant le tribunal correctionnel de Paris, pour « corruption active et passive », « blanchiment en bande organisée » ou encore « abus de confiance », il avait été condamné en septembre à quatre ans de prison, dont deux années d’emprisonnement ferme, et 500 000 euros d’amende.
Il était jugé aux côtés de son fils, Papa Massata Diack, ancien consultant en marketing à l’IAAF (désormais World Athletics). La justice française avait estimé que les deux hommes avaient participé à un vaste réseau de corruption visant à couvrir des cas de dopage d’athlètes russes en échange de pots-de-vin. Chacun a fait appel de cette décision.
Des amis généreux
Le premier contrôle judiciaire de Lamine Diack avait été levé au moment de sa condamnation. À la suite de plusieurs demandes de ses avocats, la justice française avait accepté d’assouplir son deuxième contrôle judiciaire lié à une autre affaire. Lamine Diack n’avait toutefois pas réussi à réunir les fonds nécessaires pour régler sa caution et récupérer son passeport.
"En une semaine, peut-être moins, Lamine Diack pourrait récupérer son passeport »
En février, une cagnotte avait donc été lancée par un collectif. Le 27 mars, la famille de Lamine Diack informait que la plateforme utilisée, « GoFundMe », avait interrompu la campagne de levée de fonds « pour cause de non-conformité à leur règlement », sans donner plus de précision. Au total, 99 personnes y avaient participé, permettant de réunir 20 058 euros.
À en croire les dirigeants du Jaraaf, l’argent nécessaire, déjà disponible, pourrait rapidement être mis à disposition du parquet financier français. « Une fois les fonds reçus, les choses peuvent aller vite. En une semaine, peut-être moins, Lamine Diack pourrait récupérer son passeport », estime Simon Ndiaye.
Relations tendues entre père et fils
Si Lamine Diack revenait au Sénégal, son séjour pourrait toutefois être de courte durée. L’ex-patron de l’IAAF a certes fait appel de sa première condamnation, mais il est sous le coup d’une deuxième procédure, concernant l’attribution des Jeux olympiques de Rio-2016 et de Tokyo-2020. Dans cette affaire, l’instruction est « sur le point de se terminer », selon son conseil William Bourdon, qui évoque un délai de « quelques mois ».
"Le contrôle judiciaire qui leur interdisait de se voir a été levé, mais je ne sais pas s’ils se verront »
Ses avocats assurent aussi qu’en cas de convocation par la justice, l’ancien patron de l’athlétisme mondial y répondra. Ce ne sera sans doute pas le cas de son fils Papa Massata Diack, également concerné par l’affaire des JO et condamné en septembre à cinq ans de prison ferme et un million d’euros d’amende.
Ce dernier, toujours sous le coup d’un mandat d’arrêt, n’a jamais quitté le Sénégal, Dakar refusant de l’extrader. Pourraient-ils se voir si Lamine Diack rentrait à Dakar ? Entre père et fils, les relations sont tendues depuis le début de cette saga judiciaire. « Le contrôle judiciaire qui leur interdisait de se voir ou de communiquer a été levé, répond Simon Ndiaye. Mais je ne sais pas s’ils se verront. »
Jeune-Afrique