MACKY SALL RENONCE A SA REELECTION : UNE ANNONCE NECESSAIRE MAIS PAS SUFFISANTE POUR LA PAIX SOCIALE !
Dans une démocratie normale, où les institutions fonctionnent, l’annonce du président de la République (il n’est pas candidat à la présidentielle de 2024) entre dans l’ordre normal de la vie démocratique. Puisque Macky Sall n’a pas le droit de briguer un autre mandat, comme il est indiqué de façon claire et nette dans la Constitution. Alors pourquoi tant d’éloges dithyrambiques. Pour mieux comprendre la portée symbolique et historique de la décision du président de la République, il faut la situer dans le contexte des démocraties africaines. En Afrique, par une certaine ingénierie politique et juridique, nos chefs d’Etat trouvent toujours les moyens de faire un coup d’état constitutionnel pour conserver le pouvoir. Même s’il faut tuer les populations par dizaines, par centaines voire, malheureusement, par milliers. Le mérite de Macky Sall, dans sa prise de décision, est d’avoir froidement analysé la situation, d’avoir résisté à la « tradition » en Afrique, mais surtout d’avoir mis les intérêts de la patrie au-dessus de ceux de son parti.
Cela dit, Macky Sall aurait pu aller au bout de sa logique, celle de nous laisser « un Sénégal de paix ». Cela passe naturellement par l’organisation d’une élection présidentielle inclusive. Malheureusement, il persiste dans sa volonté évidente de vouloir éliminer Ousmane Sonko de la course. « D’ici la transmission du pouvoir au futur président de la république, in shallah, le 2 avril 2024, j’assumerai avec responsabilité et fermeté toutes les charges qui incombent à ma fonction. En vertu du mandat que vous m’avez confié et en étroite cohérence avec mon serment constitutionnel, je continuerai de consacrer toutes mes forces à défendre, sans failles, les institutions constitutionnelles de la république, le respect des décisions de justice, l’intégrité du territoire, la protection des personnes et des biens. Je resterai à vos côtés, à votre écoute et au service de la république et de la nation », a dit le président de la République, dans son discours à la nation, lundi 3 juillet.
Même s’il ne le cite pas nommément, l’allusion à Ousmane Sonko est plus que transparente. Macky Sall doit prendre conscience que si l’annonce de sa non-participation à l’élection présidentielle de 2024 est nécessaire pour la paix sociale, elle n’est pas, pour autant, suffisante pour faire revenir la quiétude dans notre pays. En effet, vouloir organiser une compétition électorale en écartant Ousmane Sonko, injustement condamné, c’est semer les graines d’une instabilité aux conséquences imprévisibles. Le dire, ce n’est pas prendre fait et cause pour le leader de Pastef. C’est une lecture factuelle de la situation. Aujourd’hui, il est incontestablement l’homme politique le plus populaire au Sénégal. Ses chances de remporter la prochaine présidentielle sont réelles. Bien évidemment, il reste un justiciable comme tous les autres. Le hic est que sa condamnation repose sur une flagrante injustice que ses nombreux partisans n’accepteront pas. Dans ce contexte, organiser une présidentielle sans le candidat de Pastef, c’est créer les conditions d’une crise politique avec son lot de pertes en vies humaines et de dégâts matériels.
Puisqu’il n’est jamais trop tard pour bien faire, espérons que le président de la République, après la sage décision qu’il a prise, pensera à mettre fin à la séquestration d’Ousmane Sonko, mais aussi à arrêter l’instrumentalisation de la justice pour l’empêcher de candidater. Le Sénégal ne s’en portera que mieux !
Cheikh Sidou SYLLA