SÉNÉGAL, BURKINA FASO, CÔTE D'IVOIRE, GUINÉE, MALI ET GAMBIE : 68% des migrants de retour ont contracté au moins une dette

06 - Février - 2021

L’endettement touche 68% des migrants de retour dans six pays d’Afrique de l’Ouest, compromettant ainsi leur réintégration dans leur pays d’origine, a indiqué hier l’Organisation internationale pour les migrations (Oim).
Plus des deux tiers des migrants endettés considèrent que cette situation impacte négativement leur quotidien. Sur le plan personnel, beaucoup de personnes interrogées ont fait état de sentiments d’anxiété, d’échec, d’isolement social et de peur de ne pas pouvoir rembourser leurs obligations. L’enquête du Bureau régional de l’Oim pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre a été réalisée, entre février et avril 2020, au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, en Guinée, au Mali, au Sénégal et en Gambie.
L'étude montre une moyenne de l’équivalent de 511 euros d’endettement par migrant. Pour mieux comprendre l’importance de ce chiffre, on peut le comparer au salaire moyen dans la région du Sahel. Au Burkina Faso, « 800 euros sont considérés comme un salaire annuel moyen ». Comme la migration devient de plus en plus dangereuse et coûteuse, de nombreux migrants contractent des emprunts et s’endettent auprès de parents et d’amis pour financer leur voyage.
Au total, le montant estimé de l’endettement de l’ensemble des rapatriés des six pays étudiés peut atteindre 15 millions d’euros. Selon l’Oim, cette somme équivaut à environ 10% de l’ensemble des transferts de fonds envoyés au Mali par les migrants en France.
La famille reste le principal prêteur pour financer le projet migratoire avec plus de la moitié des prêts réalisés auprès de la famille. Suivent les amis et les proches, qui représentent 41% des prêts.
Des migrants endettés menacés ou maltraités pour rembourser leurs dettes.
Quelques disparités entre les pays sont cependant observées en termes de profil des migrants de retour endettés. C’est notamment le cas de la Guinée, où les migrants endettés sont plus jeunes, ou de la Côte d’Ivoire qui compte plus de femmes. La majorité des migrants de retour endettés ont moins de 35 ans et sont chefs de ménage. Plus d’un tiers d’entre eux sont sans emploi. Enfin, bien si principalement célibataires, 70% des migrants de retour endettés déclarent des personnes à charge. Si le quart des prêts ont déjà été remboursés, près de 60% ne l’ont pas été. Mais la fréquence de remboursement des emprunts est irrégulière. « Les migrants sont bien redevables à la famille qui les a soutenus, mais ne répondent pas à des obligations de remboursement préalablement définies », précise l’Oim.
De plus, le fait d’emprunter de l’argent pour émigrer et d’être ensuite incapable de rembourser ces prêts peut représenter un danger physique palpable pour les migrants et leurs familles. Selon l’Oim, un migrant endetté de retour sur cinq a déclaré avoir été menacé, maltraité ou soumis à des actes de violence pour le forcer à rembourser ses dettes.
12% des migrants de retour envisagent de migrer à nouveau pour rembourser leurs dettes.
Une petite fraction - environ 8% - a même admis avoir été physiquement agressée par ses créanciers. « Un rapatrié au Mali a déclaré avoir perdu l’usage de sa jambe gauche après avoir subi une blessure par balle administrée par un prêteur », note l’Oim. Un tel retour au pays dans un état encore « plus précaire qu’avant le départ », peut finalement constituer un échec pour les familles. « Cela a des conséquences durables sur la réintégration socio-économique des rapatriés », a déclaré Sokhna Sy, responsable de recherche au Bureau régional de l’Oim en Afrique de l’Ouest et du Centre. « La confiance que les créanciers ont placée dans le migrant est compromise et les rapatriés rencontrent de sérieuses difficultés pour rembourser les dettes sociales et financières », a-t-elle ajouté. Pourtant, le rapport note que 12% des migrants de retour endettés envisagent de migrer à nouveau pour rembourser leurs dettes.

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

26 - Mai - 2024

Le professeur Babacar Guèye nommé facilitateur des Assises de la justice

Le président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, a nommé le professeur de droit Babacar Guèye, facilitateur des Assises de la justice qui s'ouvrent mardi...

24 - Mai - 2024

Plateforme “Jubbanti” : Vers une gouvernance plus participative et une justice plus accessible pour les Sénégalais

En prélude de la journée du Dialogue national du 28 mai, une plateforme citoyenne dénommée « JUBBANTI », qui signifie redresser, rectifier ou corriger en...

24 - Mai - 2024

Rebondissement : L’affaire Didier Badji et Fulbert Sambou relancée, Bah Diakhaté visé encore

La famille de Didier Badji ne lâche pas l’affaire. Moïse Badji, résidant en Allemagne, au nom de la famille et des proches de l’adjudant gendarme en service à...

24 - Mai - 2024

Criminalisation de l’homosexualité : le député de Yewwi Askan Wi, Abass Fall, prêt à voter la loi

Le débat sur l'homosexualité a pris de l'ampleur suite à la conférence conjointe de Ousmane Sonko et Jean-Luc Mélenchon à l’Université Cheikh...

24 - Mai - 2024

Trafic de cocaïne : troisième retour de parquet pour la bande à Abdoulaye Seck, ouverture d’une information judiciaire

  Libération, qui donne l’information, rapporte que «le parquet a décidé d’ouvrir une information judiciaire comme c’est le cas dans les...