Sénégal : fin de course pour Lamine Diack, l'ancien patron de l'athlétisme mondial

22 - Mai - 2019

Depuis quatre ans, des investigations sont menées afin de décortiquer le système mis en place par l'ex-président de la Fédération internationale d'athlétisme pour couvrir des cas de dopage en Russie.
Le parquet national financier (PNF) français a réclamé le renvoi de Lamine Diack devant le tribunal pour "corruption active et passive" et "blanchiment en bande organisée". Le Sénégalais de 85 ans a été pendant 16 ans, de 1999 à 2015, le tout puissant patron de l’athlétisme mondial (IAAF). Il est accusé d'avoir retardé des sanctions pour dopage concernant des athlètes russes.

Dans son réquisitoire, le parquet national financier est sans concessions. "Sous la direction de son président et forte de plusieurs années de malversations, l'IAAF a réussi à concilier corruption et encouragement du dopage", écrivent les juges.

D’un côté, la Russie installait une politique de dopage institutionnalisé. Les athlètes russes devaient briller coûte que coûte pour la grandeur de la mère patrie. En 2015, l’Agence mondiale antidopage (AMA) concluait à un "système de dopage d’Etat" en Russie. Découvert, ce système a privé les athlètes russes des J.O. de Rio en 2016 et des Mondiaux de Londres l’année suivante. Des fonds ayant été blanchis en France, la justice française a été saisie par l’Agence mondiale antidopage (AMA) en 2015.

Objectif politique

De l'autre, Lamine Diack cherchait de l’argent pour, a-t-il dit, barrer la route au président sénégalais de l’époque (2000-2012), Abdoulaye Wade. "J'avais donc besoin de financements pour louer les véhicules, des salles de meetings, pour fabriquer des tracts dans tous les villages et tous les quartiers de la ville", explique-t-il à la justice en 2015, selon Le Monde. Œuvre solitaire ou machine de guerre organisée par le vainqueur Macky Sall? L’actuel président du pays se défend de toute collusion.

Dans l'histoire, le corrupteur n’est autre que Valentin Balakhnichev, le président de la fédération russe d’athlétisme. Ce que l’intéressé dément. Curieusement, les athlètes visés par les procédures antidopages sont Russes eux aussi. A l’approche des championnats du monde à Moscou en 2013, de nombreux et juteux contrats publicitaires étaient en négociation. Tout devait être propre.
Le très influent fils de Diack, Papa Massata Diack, à l’époque conseiller marketing de l’IAAF, va jouer les intermédiaires. Moyennant finances, il intercède auprès des instances de l’IAAF pour nettoyer les dossiers d’athlètes suspects, ou retarder les procédures en cours permettant ainsi aux sportifs de participer à des rendez-vous importants, et aussi de signer les contrats publicitaires.

Médailles olympiques retirées

Fin 2011 une liste de 23 athlètes circule, soupçonnés de dopage. Parmi les noms, il y a Sergey Kirdyapkin (50 km marche) et Olga Kaniskina (20 km marche), à qui les titres olympiques de 2012 seront retirés pour dopage.

Sur la liste également, la marathonienne Lilya Shobukhova, dont un rapport d'expert soulignait un "usage massif" d'EPO. Elle a reconnu les faits. Elle a dû verser 450 000 euros pour passer entre les gouttes. Finalement suspendue en 2014, elle a réclamé et obtenu un remboursement de 300 000 euros ! Les transactions se sont faites via un compte bancaire lié à … Papa Massata Diack.

La fédération russe dans le colimateur

Et bien sûr, parmi les personnalités poursuivies par la justice française, on trouve tous les maillons d’un système de corruption. Le conseiller de Lamine Diack, Habib Cissé, ou le chef de l’antidopage de l’IAAF, Gabriel Dollé. Ce dernier reconnaît avoir ralenti les procédures concernant Shobukhova pour 190 000 euros.

Côté russe, le parquet financier demande un procès contre Valentin Balakhnichev et Alexeï Melnikov, ex-entraîneur en chef des courses de fond à l'ARAF, la fédération russe d’athlétisme. Tous deux sont sous le coup de mandats d'arrêt, le premier pour corruption passive et active, et blanchiment aggravé; le second pour corruption passive.

Quant au fils Diack, Papa Massata, lui aussi sous le coup d'un mandat d'arrêt, il est paisiblement installé au Sénégal. "Je ne suis pas citoyen français et je ne suis pas tenu de répondre à la justice française", avait-il déclaré au quotidien L’Equipe. Accusé selon lui à tort . "Celui qui veut tuer son chien…", reprend-il devant les journalistes. En attendant, il s’occupe de ses poulets et n’a jamais été entendu par la justice française, faute d’extradition.

Franceinfo

 

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