Une libération qui fait jaser…

27 - Mai - 2019

Y a-t-il deux poids, deux mesures dans la diligence de certains dossiers judiciaires ? La question se pose d’autant plus qu’avec la libération de Thione Seck, beaucoup de Sénégalais ont cette impression

La procédure judiciaire enclenchée contre le chanteur Thione Seck en 2015 a connu son épilogue la semaine dernière. Le juge Maguette Diop, président de la deuxième chambre correctionnelle du tribunal de grande instance (Tgi) de Dakar, a décidé d’annuler toute la procédure en se basant sur le règlement numéro 5 de l’Uemoa.

Cette jurisprudence risque toutefois de créer beaucoup de problèmes dans l’espace judiciaire d’autant que ce règlement avait été évoqué dans l’affaire Khalifa Sall mais avait été rejetée par les maîtres des poursuites. La fin des poursuites contre le chanteur risque donc, selon des sources proches du dossier, d’éclabousser la justice car beaucoup y voient des mains extra-judiciaires.

Y a-t-il deux poids, deux mesures dans la diligence de certains dossiers judiciaires ? La question se pose d’autant plus qu’avec la libération de Thione Seck, beaucoup de Sénégalais ont cette impression de justice à deux vitesses. Le chanteur et lead vocal du Ram Daan a bénéficié d’une annulation de la procédure grâce au dispositif de l’article 5 du règlement de l’Uemoa appliqué par le juge Maguette Diop, président de la deuxième chambre correctionnelle de Dakar. Or, lors du procès de l’ancien député-maire de Dakar, Khalifa Sall, cet article avait été évoqué mais le président du tribunal avait refusé d’en tenir compte. Invité de l’émission dominicale Grand Jury de la Rfm, Me El Hadj Diouf a rappelé les vices de forme que contenait la procédure initiée contre son ex client.

Selon lui, Khalifa Sall a été maintenu en prison, malgré le fait, comme le chanteur, qu’il n’a pas été assisté par son avocat dès son interpellation. Me El Hadji Diouf trouve que la décision de maintenir le maire de Dakar en prison, au mépris des dispositions du règlement 5 de l’Uemoa, est injuste. Il estime que Khalifa Sall doit en même temps que le chanteur sortir de prison pour vice de procédure. « Ce qui est valable pour Thione Seck, l’est aussi pour Khalifa Sall. C’est la même chose, ce dimanche. L’article 5 de l’Uemoa, qui confère le droit d’être assisté par un avocat dès l’interpellation, ne parle pas de personne. On a empêché à Khalifa Sall d’avoir un avocat et la Cedeao a condamné l’Etat du Sénégal à payer 20 millions Mais l’Etat a fermé les yeux sur la procédure » a-t-il tranché.

Pour Jean Paul Diaz, leader du Bloc des Centristes Gaïndé (Bcg), le maintien en prison de Khalifa Sall relève de la responsabilité des juges. «Ce sont les juges qui n’ont pas appliqué le droit. C’est un règlement de l’Uemoa qui, en termes de position, est supérieur à nos lois internes. C’est établi que Khalifa Sall n’a pas été assisté par un avocat lors de l’enquête préliminaire.

Son avocat, Me El Hadji Diouf, s’est présenté et n’a pas été autorisé à assister à son interrogatoire. Celui qui dit le contraire raconte des salades. Pourquoi n’a-t-on pas annulé ?» a pesté le leader du BCG dans l’émission « Objection » de Sud Fm. Une libération extra judiciaire L’immixtion de l’Exécutif dans le judiciaire est-elle une réalité au Sénégal ? Selon des sources judiciaires, la décision de libérer Thione Seck émanerait d’un dispositif hors circuit judiciaire en dépit de l’indépendance de la justice exaltée sur tous les toits par les magistrats.

Cela a participé à fragiliser le parquet lors du procès car chacun des délits pour lesquels le chanteur a été inculpé devait lui valoir une condamnation d’au moins 5 ans de prison.

C’est pourquoi, après la décision du juge de procéder à l’annulation de la procédure, le Ministère public a jugé nécessaire, pour sauver la face, d’interjeter appel. « La décision de libérer Thione Seck a mis mal à l’aise le procureur qui avait visé trois chefs d’inculpations tous susceptibles de condamnation d’au moins cinq ans de prison.

Cette décision (Ndlr, de libération) émane du Ministère de la justice » soutient une source judiciaire. Pour rappel, le président de la République, M. Macky Sall, avait reçu en audience, quelques mois avant l’élection présidentielle, Wally Ballago Seck. Ce dernier, extrêmement populaire au niveau des jeunes gens et jeunes filles, aurait accepté, selon des gorges profondes, d’appuyer le Président sortant pour la libération de son père.

Un père qui a été lui-même reçu en audience par le même président Macky Sall. « Que ne ferait pas un digne fils pour sauver son père ? » demande en conclusion notre interlocuteur.

LE TEMOIN

Commentaires
0 commentaire
Laisser un commentaire
Recopiez les lettres afficher ci-dessous : Image de Contrôle

Autres actualités

31 - Janvier - 2025

Le procureur rejette la demande de liberté provisoire de Samuel Sarr

Saisi par le juge du 2e cabinet en charge du dossier, le parquet a donné un avis défavorable à la demande de liberté provisoire déposée par les avocats de...

30 - Janvier - 2025

Détournement de deniers publics : Lat Diop présenté au juge après quatre mois de détention

L'ancien ministre des Sports, Lat Diop, sera présenté au juge en charge de son dossier ce jeudi 30 janvier. Selon Les Échos, qui donne l’information, l’ancien...

30 - Janvier - 2025

RDC : Après avoir pris Goma, le M23 progresse vers le Sud-Kivu

Le M23 a avancé ce mercredi sur un nouveau front en s’emparant de deux localités dans la province du Sud-Kivu, voisine du Nord-Kivu. Plusieurs habitants des villages concernés, qui...

30 - Janvier - 2025

Tshisekedi parle enfin et menace le M23 : « Le dispositif sécuritaire a été renforcé »

C’est la première fois que le président congolais s’exprime depuis l’offensive rebelle de ces derniers jours à l’est du pays, à Goma. Lors...

30 - Janvier - 2025

Affaire «Alima Suppo» : Tout est parti de la Côte d’Ivoire

«Alima Suppo», principale mise en cause dans l’affaire des boulettes pour fesses, et ses co-inculpés seront jugés ce vendredi devant le tribunal des flagrants...