Hommage : dix citations de Frantz Fanon à méditer
Atteint d'une leucémie, Frantz Fanon décède le 6 décembre 1961, à l'âge de 36 ans. Jeune Afrique revient sur certaines des citations les plus fortes d'un penseur humaniste et engagé.
Frantz Fanon s’est battu pour la libération de la France, a travaillé au service psychiatrique de l’hôpital de Blida, en Algérie, puis s’est engagé pour l’indépendance algérienne aux côtés du FLN. Mais le Martiniquais est surtout connu pour ses essais sur la colonisation, et sur les catastrophes psychologiques et psychiatriques engendrées par cette dernière.
Peau noire, masques blancs (Seuil, 1952), L’an V de la révolution algérienne (Maspero, 1959), Les Damnés de la Terre (Maspero, 1961), son livre le plus connue préfacée par Sartre, ou son ouvrage posthume Pour la révolution africaine (Maspero, 1964)… Son œuvre en a influencé plus d’un, des indépendantistes africains aux leaders du Black Panther Party notamment.
Extraits de Peau noire, masques blancs (1952) :
« Quand vous entendez dire du mal des Juifs, dressez l’oreille, on parle de vous. »
« Le Noir qui veut blanchir sa race est aussi malheureux que celui qui prêche la haine du Blanc. »
Extrait de L’An V de la révolution algérienne (1959) :
« Le régime colonial est un régime instauré par la violence. C’est toujours par la force que le régime colonial s’est implanté. C’est contre la volonté des peuples que d’autres peuples plus avancés dans les techniques de destruction ou numériquement plus puissants se sont imposés. Violence dans le comportement quotidien, violence à l’égard du passé qui est vidé de toute substance, violence vis-vis de l’avenir. »
Extraits d’un article du numéro 19 d’Afrique Action (qui deviendra Jeune Afrique), daté du 20 février 1961 et intitulé « La mort de Lumumba : pouvions-nous faire autrement ? » :
« L’ONU n’a jamais été capable de régler valablement un seul des problèmes posés à la conscience de l’homme par le colonialisme, et chaque fois qu’elle est intervenue, c’était pour venir concrètement au secours de la puissance colonialiste du pays oppresseur. […] En réalité l’ONU est la carte juridique qu’utilisent les intérêts impérialistes quand la carte de la force brute a échoué. »
« Le grand succès des ennemis de l’Afrique, c’est d’avoir compromis les Africains eux-même. [Ils] étaient directement intéressés par le meurtre de Lumumba. Chefs de gouvernements fantoches, au sein d’une indépendance fantoche, confrontés jour après jour à une opposition massive de leurs peuples, ils n’ont pas été longs à se convaincre que l’indépendance réelle du Congo les mettrait personnellement en danger. »
Extrait d’une lettre de Frantz Fanon envoyée peu de temps avant sa mort à Roger Taïeb (1961) :
« Nous ne sommes rien sur terre, si nous ne sommes pas d’abord l’esclave d’une cause, celle des peuples et celle de la justice et de la liberté. »
Extraits des Damnés de la Terre (1961) :
« Les nations européennes se vautrent dans l’opulence la plus ostentatoire. Cette opulence européenne est littéralement scandaleuse car elle a été bâtie sur le dos des esclaves, elle s’est nourrie du sang des esclaves, elle vient en droite ligne du sol et du sous-sol de ce monde sous-développé. Le bien être et le progrès de l’Europe ont été bâtis avec la sueur et les cadavres des Nègres, des Arabes, des Indiens et des Jaunes. »
« La mobilisation des masses, quand elle se réalise à l’occasion de la guerre de libération, introduit dans chaque conscience la notion de cause commune, de destin national, d’histoire collective. […] La construction de la nation, se trouve […] facilitée par l’existence de ce mortier travaillé dans le sang et la colère. »
« [La colonisation est] une négation systématisée de l’autre, une décision forcenée de refuser à l’autre tout attribut d’humanité. »
Extrait de Pour la révolution africaine (1964) :
« [La Guerre d’Algérie est] la conséquence logique d’une tentative avortée de décérebraliser un peuple. »
JA